Chapitre 3

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Samedi soir.

Vingt-trois heures.

La musique à fond et des gens partout.

Tout ça ne provenait pas de chez moi, mais de la maison voisine. J'essayais de regarder mon film tranquillement sur mon ordinateur, néanmoins rien n'y faisait, je n'entendais pas ! Je soufflai d'agacement et descendis dans la cuisine me servir un grand verre d'eau citronnée. En passant la tête dans le salon, je surpris mon père affalé sur le canapé, endormi devant une émission comique. Je souris et éteignis doucement la TV avant de déposer un plaid sur son corps. Je bus une grande gorgée d'eau et sortis de ma maison. Je regardai vers l'endroit où la fête avait lieu : quelques personnes étaient assises en rond sur la pelouse, tandis qu'une fille habillée comme si elle était à la plage vomissait ses tripes dans un buisson.

Beurk, vraiment cracra tout ça.

Je m'avançai doucement vers la maison de mes voisins puis toquai à la porte. Personne ne me répondit, chose étant logique au vu de tout ce boucan... Je ne m'essayai même pas à sonner, et ouvris donc doucement la porte tout en tirant les manches de mon pull sur mes bras. Des photos étaient accrochées au mur du hall d'entrée. Je m'avançai vers le reste de la maison mais mon regard accrocha l'un des clichés. Je restai bloquée un instant : il habitait toujours ici, les photos de lui petit et de sa sœur étaient encore là. J'effleurai le cadre photo du bout des doigts, soudainement pensive. Je ne m'attendais pas du tout à ce qu'il soit toujours ici. Aucune fac ne se trouvait à Glendale ou ses alentours.

Fronçant les sourcils, je m'aventurai un peu plus dans la maison, sous les regards interrogateurs des gens qui ne m'avaient jamais vue ici avant. Certains regards semblaient méfiants, d'autres indifférents. Je débouchai sur un petit salon contenant en son centre un billard. À ma droite se trouvaient un canapé en cuir rouge, une TV ainsi qu'un bar sur la gauche, à l'entrée de la salle.

Je regardai autour de moi, il y avait moins de monde dans cette pièce. Mes yeux analysaient tout l'espace, le moindre petit meuble, la moindre personne.

Et c'est là que je le vis.

Grand, blond, belle carrure, aux yeux bleus.

Tyler.

Le revoir était une sensation si étrange. Pour une raison qui m'échappait, même après tout ce temps loin l'un de l'autre, ça avait été comme une évidence. Jamais je n'aurais pu me tromper : c'était bien lui. Qu'est-ce que je suis censée faire maintenant ? Et si il ne me reconnaissait pas ? Et s'il ne voulait pas me revoir ? Les doutes se mélangeaient dans ma tête, me faisant presque mal au crâne. J'hésitais à rebrousser chemin comme si de rien n'était, seulement la tentation était trop forte. Je me tenais finalement là, face à lui, sans savoir quoi faire, quoi penser. Depuis cinq ans, nous ne nous étions pas revus, depuis trois ans, nous ne nous étions même plus adressé la parole.

La porte se referma derrière moi en un claquement sourd et c'est à ce moment-là que ses yeux rencontrèrent les miens.

Et là ce fut le bug total.

Je le regardai. Il me regarda.

Une minute.

Puis deux passèrent.

Au bout d'un moment, un raclement de gorge de la part d'un des garçons postés à côté de Tyler me sortit de mes pensées.

Il se leva, posa son verre sur la table et se dirigea vers moi. Lui aussi semblait totalement déboussolé. Lui aussi semblait se poser tout un tas de questions. Lui aussi semblait hésiter.

« Hannah ? C'est toi ?

— Salut, Tyler... »

Nous nous regardions sans rien dire, gênés par la situation. Il brisa le silence.

« Tu es rentrée depuis quand ? Je ne m'attendais pas à te revoir, c'est surprenant...

— Je suis revenue hier avec mon père. Ma mère a préféré rester à Seattle.

— Oh, je suis désolé que ça n'ait pas fonctionné.

Il fronça légèrement les sourcils, visiblement perturbé par ce qui était en train de se passer. Il ne devait pas savoir comment me parler, pourtant j'osais espérer que rien n'avait changé entre nous. J'essayai donc de paraître la plus à l'aise possible, tâche qui s'avérait bien plus compliquée que ce que je pensais.

— C'est rien, t'en fais pas. Mon père le vit plutôt bien alors moi aussi. Je ne savais pas que tu habitais encore ici.

Il me sourit gentiment en hochant la tête. Je ris doucement et continuai.

— Tes parents sont toujours en vadrouille, j'imagine.. Et ta sœur, comment va-t-elle ? Elle doit avoir quoi maintenant.. dix-sept ans, c'est ça ?

D'un coup, les traits de Tyler se durcirent et il perdit son sourire. Le mien retomba également, subitement inquiète.

— Ellie n'est pas là ce soir.

Il parlait sèchement. Je fronçai les sourcils d'incompréhension et fuyais son regard. Tyler sembla remarquer mon malaise. Il souffla doucement puis se radoucit. De mon côté, je triturais mes doigts à n'en plus finir.

— Excuse-moi. Qu'est-ce-que tu voulais me dire ?

— Euh eh bien... Simplement savoir si c'était possible de baisser un peu le volume de la musique parce que je n'arrive pas à écouter correctement mon film...

Tyler me lança un sourire en coin, amusé. Je le regardai, interdite.

— Je ne te promets rien, mais je vais voir ce que je peux faire. »

Je hochai la tête en le remerciant gentiment, puis tournai les talons pour retourner chez moi, non sans avoir le cerveau et le cœur tous retournés.

Tyler

Cinq ans que je ne l'avais pas vue, et voilà qu'elle réussissait à me parler de la seule chose dont il ne fallait pas ! Je regrettais un peu ma façon de lui avoir répondu au début, mais avais tenté de me rattraper. Quand je l'avais vue, au milieu de cette pièce avec ses longs cheveux roux, ses beaux yeux bleus et ses tâches de rousseur si mignonnes, j'avais cru rêver. Elle, qui n'était plus qu'un souvenir lointain, avait refait surface. Je ne pensais jamais la revoir.

Ce furent des retrouvailles étranges. J'avais, au fond de moi, toujours voulu la voir revenir ici, mais n'avait jamais envisagé que ça puisse réellement arriver.

« C'était qui cette bombe, Tyler ?

Isaac avait sifflé avant de dire cette phrase. Mon corps se tendit légèrement aux dires de mon ami. Il était du genre à draguer tout ce qui passait devant ses yeux.

— Ta gueule, Isaac, elle, c'est une vieille amie, mais tu la touches, j'te crame avec tes propres joints. Je la connais depuis bien trop longtemps pour que vous alliez la faire chier.

Le blond cendré avait rigolé en entendant ma phrase en levant les mains en l'air en signe de défense. De son côté, Charly, mon meilleur ami, me regardait avec un sourire en coin en haussant un sourcil.

— Et sinon, c'est qui ? Juste un nom et un prénom, c'est possible ?

— Hannah Williams. Voilà, c'est tout ce que vous aurez sur elle. »

Je me levai de mon siège en les laissant tous les deux plantés là et partis en direction de la salle de bain me mettre un peu d'eau sur le visage. Je relevai la tête et me regardai dans le miroir en me remémorant les événements précédents.

Putain.

Un Chemin Pour Deux - Tome 1 [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant