Chapitre 17

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Je traversai toute la maison d'un pas rapide et déterminé. Je n'arrivais pas à me calmer, il fallait que j'aille m'isoler dans le seul endroit qui pouvait me détendre et me soulager de toutes mes peines.

J'ouvrai la porte arrière de la maison et inspirai un grand bol d'air frais. J'avais atterri dans mon jardin, tout aussi sombre que la lumière que la nuit renvoyait. Je poussai du coude toutes les personnes qui se mettaient en travers de mon chemin, en faisant trébucher certaines qui étaient trop ivres pour tenir debout. Certaines filles que je croisai tentaient vainement de m'adresser la parole d'une voix aiguë et éméchée. Plus aucun son distinct, mis à part un brouhaha incertain, ne me venait aux oreilles. Bordel pourquoi y a-t-il autant de monde dans cette maison ?

Mon esprit n'était centré que sur une chose : elle.

Connaissant même inconsciemment le chemin par cœur, je laissai mes pieds me guider vers le lieu de mon désir. Je sentais ma jugulaire sautiller dans mon cou sous l'effet de la tension et de la colère endurées. Enfin, à quelques mètres de moi, je la voyais.

La cabane.

Sa petite structure boisée me donnait un sentiment de réconfort et de sécurité. Je ne voulais qu'une chose, m'y réfugier. J'en avais besoin.

J'arrivai au bas de la petite échelle qui servait de point d'accès à la maisonnette. Je déposai ma main sur le premier barreau en chêne. C'est alors que des rires me parvinrent aux oreilles. Je me stoppai net, et écoutai attentivement. Quelques secondes plus tard, ces mêmes rires retentirent à nouveau. Putain de merde. Je me précipitai aussi vite que possible et grimpai cette fichue échelle, pris dans un élan de fureur. Alors que mes pieds touchaient désormais le plancher de la hutte, je croisai les yeux hébétés d'un garçon brun que je ne connaissais ni d'Adam ni d'Eve, et ceux d'une nana blonde qui l'accompagnait. Ils étaient visiblement entrain de se bécoter. Les yeux injectés de sang, les poings serrés et la voix sévère, je m'approchai d'eux d'un pas décidé.

«Bordel de merde, qu'est-ce-que vous foutez ici ?! »

Les deux têtes de cons en face de moi me regardaient éberlués, ne sachant pas si j'étais sérieux ou pas.

«Qu'est-ce-que vous regardez ? Barrez vous d'ici ! »

J'attrapai le col du jeune brun et le poussai à l'extérieur, le faisant presque tomber à la renverse. Il se rattrapa de justesse en me lançant une ribambelle d'injures plus stupides les unes que les autres.

«Non mais t'es malade ! On faisait rien de mal, puis d'abord t'es qui espèce de gros pervers ?! »

Je me retournai vivement vers la blonde qui venait de parler d'une voix nasillarde. Je détaillai plus en détail cette pimbêche : son t-shirt rose flashy était à demi tombé, laissant à découvert son épaule droite où y était tatoué un petit cœur noir. Son short en jean était aussi court que ma coupe de cheveux, et son maquillage semblait tout droit sorti d'un cirque.

Je m'approchai doucement de son visage peinturluré et lui chuchotai d'une voix grave mais sombrement calme. Ma voix s'élevait petit à petit au fil de ma phrase.

«Je suis celui qui habite ici, et je vous demande, bande d'enfoirés, de vous casser de ma putain de baraque.

Perdant à présent mon sang froid, je criai à pleins poumons, comme pour me débarrasser de toute la haine que je ressentais.

— Dégagez ! »

La blondasse accourut d'un pas apeuré vers son amant de la soirée afin de descendre au plus vite de la cabane. Avant qu'il ne parte à son tour, j'attrapai le bras bronzé du garçon et ancrai mes yeux dans les siens. Mon ton se faisait calme mais tendu.

«Maintenant écoute moi bien. Je ne veux plus jamais vous revoir ici, c'est bien compris ? Et fais dégager tout le monde, je veux plus voir personne. »

Le garçon hocha doucement de la tête puis se retira de mon emprise. Il me lança un dernier regard étrange puis entreprit de retourner dans le jardin et de rejoindre sa blonde.

Je soupirai bruyamment en les regardant partir, puis passai ma main dans mes cheveux. Je secouai la tête, désespéré par ce que devenait ma maison tous les week-ends.

«C'est pas vrai...»

Tout avait dégénéré depuis quelques années maintenant. Peu de temps après avoir coupé tout contact avec Hannah, je m'étais mis à tomber dans le délire d'organisateur de soirée. Au début j'avais commencé à faire ça pour essayer de me changer les idées, sauf qu'avec le temps et les habitudes des gens, la chose avait évolué et grandit. Le problème, c'était que plus j'attendais, moins il était simple d'arrêter. Alors je me retrouvais là presque un week-end sur deux, à organiser une soirée où je ne souhaitais pas être, bien malgré moi.

J'allai m'asseoir nonchalamment dans l'angle de la cabane, le plus loin possible du bruit et de la lumière. Je reposai ma tête sur le mur derrière moi et fixai mes yeux sur un point invisible au sol. Hannah était mon petit rayon de soleil, elle me redonnait goût à la vie et encore hier j'avais réussi à m'en éloigner, comme si j'étais destiné à être seul avec moi-même, à avoir un destin funèbre.

Un Chemin Pour Deux - Tome 1 [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant