Ils traversèrent de nombreuses rues aussi vivantes que le port. La foule s'écartait de leur chemin. Les regards de biais et les messes basses étaient aussi nombreux. Ils n'étaient absolument pas les bienvenues sur ces terres et la population était déterminée à le faire savoir. Lysaelle s'étonnait que l'un d'eux n'ait pas encore essayé de les tuer. Ses soldats n'étaient pas à l'aise, elle sentait la tension qui émanait du groupe. Mikolaj, à ses côtés, serrait et desserrait les poings en jetant des regards noirs à ceux qui osaient le défier. Elle sentait Lyan user de son don avec délicatesse pour tenter d'apaiser les tensions. Il manquait cependant d'entraînement pour qu'il y ait un effet notable sur autant de mondes.
Le chemin serait encore long avant qu'ils n'arrivent au château, elle fit donc, autant que possible, abstraction de la mauvaise humeur ambiante pour se laisser le loisir de découvrir la ville. Tout ici était différent de l'unique cité que comptait Lekathos, Valsyt. Les maisons construites dans des matériaux solides reflétaient, avec magie, les rayons du soleil. Les volets étaient peints de couleurs différentes, seules choses qui différenciaient les habitations alignées avec précision. Les rues étaient faites de dalles blanches parfaitement entretenues, aucun déchet n'était visible. La verdure était aussi présente partout. Des arbres, des buissons, des fleurs... il semblait que chaque famille avait ses propres plantes. Comme une tradition. À Lekathos, la forêt restait forêt et la ville, ville. Mais il était peut-être plus facile de comprendre ce choix ici, il n'y avait pas autant de nature et d'espace sauvage que sur l'île de la reine. Si elle reconnut certaines espèces, d'autres paraissaient presque irréelles. De couleurs chatoyantes, elles semblaient, elles aussi, accrocher le soleil. Était-il possible que de telles plantes existent ? Que leur vert soit si vert, leur rouge si rouge ? N'y avait-il pas là une quelconque magie ? Non c'était évidemment impossible, ce territoire abhorrait cette pratique. C'était bien pour cela qu'ils étaient si peu accueillants. C'était sûrement une autre de leurs inventions, comme celles qui se trouvaient sur le bateau.
Enfin les maisons se firent plus espacées. Le brouhaha de la ville se tarit tout comme les murmures et les regards de travers. Cela laissa place à d'immenses champs jaunes qui ne semblaient pas avoir de fin. Jamais Lysaelle n'avait vu si grande culture. On voyait dans les champs de nombreux paysans travaillant la terre mais aucun ne leva les yeux de son travail. Elle sentit aussi l'étonnement de ses gardes. Les terres cultivables de Lekathos étaient limitées, la ville vivait principalement des ressources de la forêt et de la mer, bien assez riches pour les nourrir. Lysaelle vit aussi d'étranges machines, guidées par un seul homme. Elles étaient peu nombreuses en comparaison des bêtes, mais elles intriguèrent tout de même la reine. Ce pays avait quelque chose de fascinant et de terrifiant à la fois. Lekathos n'était pas aussi grande que l'Arzaski, la reine n'avait sûrement pas besoin d'une telle technologie mais sa curiosité avait été piquée.
Une fois les champs dépassés, ils arrivèrent enfin au pied de la colline où trônait le château. Lysaelle ne comprenait pas bien pourquoi il était si éloigné de la mer et surtout pourquoi les champs séparaient la ville du château. En cas d'attaque, les paysans auraient peu de chances de rejoindre l'enceinte du château à temps. Elle ne s'en préoccupa pourtant pas longtemps car toute son attention était dorénavant tournée vers l'édifice royal. Si, de loin, il avait paru majestueux, elle le trouvait plus beau encore en s'approchant.
Elle distingua tout d'abord les immenses murailles qui entouraient le château. La pierre était aussi blanche que les pavés des rues et restait bien fade en comparaison de ce qu'elles protégeaient. Un pas après l'autre, de nombreux détails sautèrent aux yeux de la reine. Il y avait le premier étage dont le cadre des fenêtres était délicatement décoré d'arabesques et de motifs floraux. D'ailleurs les ouvertures étaient si nombreuses que Lysaelle ne put les compter toutes. Le second étage était plus large que le premier et pourtant rien ne semblait soutenir les excroissances. Comment le château pouvait-il tenir ainsi ? Lysaelle avait l'impression d'avoir devant ses yeux un château de cartes prêt à s'effondrer si l'on soufflait trop fort. Encore une ingéniosité technique qu'elle ne comprenait pas. Plus on montait et plus il semblait improbable qu'il tienne debout. Il y avait çà et là des sols qui sortaient de la forme préétablie aussi grands qu'une chambre, des vitres qui semblaient remplacer les murs. L'apesanteur n'avait aucun effet sur cet édifice.
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Ozavir
FantasyLysaelle, reine de Lekathos, dirige avec bienveillance son peuple coupé des autres pays. Les autres dirigeants craignent ces terres inhospitalières où vivrait, dit-on, des mages. Pourtant, le roi Orik, roi d'Arzaski, décide de demander une alliance...