Lysaelle avait passé une nuit agitée, ne dormant que par à-coups. Ainsi quand Anyla vint la réveiller, elle était déjà habillée. Ses traits étaient tirés et elle repassait en boucle le discours qu'elle tiendrait au roi avant l'entraînement des soldats. Anyla s'occupa seulement de refaire le lit et prendre les affaires sales de la reine avant de partir. Lysaelle quitta la pièce à son tour et se dirigea sans hésitation vers la salle du trône, où elle pensait trouver le roi à coup sûr. Les doléances n'avaient pas encore commencé, elle serait donc tranquille pour exposer ses idées.
— Majesté ! Cela faisait longtemps que je n'avais pas eu le plaisir de votre compagnie, s'exclama le roi en voyant la reine entrer.
Lysaelle sourit au roi avant de grimacer quand elle remarqua la présence du prince. Ce dernier leva les yeux aux ciels face à la réaction de son père. La reine ignora Ayden et se concentra sur ce qu'elle avait à dire.
— Je suis désolée mais j'ai eu beaucoup de choses à faire. J'ai notamment pu assister à l'arrivée d'un nouveau groupe de réfugié.
— Ils ont été pris en charge par mes gardes. Nous avons installé un camp près du port.
Le roi semblait presque fier de sa solution alors qu'elle ne faisait que retarder l'inévitable.
— Pitié encore ces histoires ! Que n'avez-vous pas compris dans « nous avions prévu » ? cracha le prince.
La reine fixa son regard sur le prince.
— Il ne change rien au fait qu'il n'y aura jamais assez de nourriture pour tout le monde si un rationnement n'est pas instauré dès à présent. En particulier au château.
— Vous nous demandez de nous affamer ?
Le ton d'Ayden était moqueur, il ne pouvait concevoir de sacrifier son confort pour son peuple.
— De vous rationner. Nuance. Pour la survie de tous. Car je tiens aussi à vous rappeler que nous aurons besoin d'hommes en pleine forme pour faire face à l'armée qui avance vers nous.
— Oui, d'ailleurs nous avons déjà commencé les recrutements, une première vague devrait arriver ce matin, s'empressa de rebondir le roi pressé de changement de sujet.
Lysaelle ravala sa déception. Sur ce point elle ne pourrait pas se faire entendre tant que la catastrophe ne serait pas en train de dévaster la ville. Au moins y avait-il un point sur lequel le roi avait travaillé. Ils pourraient commencer à former de nouveaux soldats et ce n'était pas négligeable.
— Vous n'aurez qu'à les attendre à l'esplanade, je vous les enverrais. En attendant commencez l'entraînement, proposa le roi.
L'échange avait tourné court et n'avait, finalement mené à rien. Trois cents ans après la Grande Famine qui avait ravagé son peuple, voilà que cela recommençait. Elle avait encore en mémoire le tiraillement de la faim, les corps trop petits pour devoir être enterré. Elle se souvenait surtout de la révolte que rien n'aurait pu arrêter. Elle avait envie de crier, de secouer le roi pour qu'enfin il agisse. Elle se contenta de ravaler sa frustration en serrant les dents. Elle fit la révérence et se détourna. Elle entendit rapidement des pas derrière elle et elle n'avait aucun doute quant à leur propriétaire. Rapide, engagé et terriblement énervant. Que lui voulait le prince ? N'était-il pas censé participer aux doléances avec son père ? Elle l'ignora sciemment et se dirigea d'un pas sûr vers l'esplanade. Elle se repérait de plus en plus facilement dans le château ce qui la soulageait. Quand les deux ennemis passèrent dans un couloir vide, le prince empoigna fermement la reine et la plaqua contre le mur. Lysaelle ne se défendit pas. Jamais le prince n'oserait la tuer ici, à la vue de tous, seulement quelques minutes après avoir parlé avec le roi. Il était beaucoup plus subtil. Il approcha son visage de celui de la souveraine et murmura :
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Ozavir
خيال (فانتازيا)Lysaelle, reine de Lekathos, dirige avec bienveillance son peuple coupé des autres pays. Les autres dirigeants craignent ces terres inhospitalières où vivrait, dit-on, des mages. Pourtant, le roi Orik, roi d'Arzaski, décide de demander une alliance...