Chapitre 25

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Les deux femmes ne restèrent pas bien longtemps dans la petite maison. Stoïana ne supportait pas de rester enfermé à être une parfaite femme au foyer et Lysaelle avait besoin de grand air. Elles partirent ainsi discrètement vers la plage, emportant avec elles quelques armes, celles que la forgeronne avait faites. Elle avait pu comparer le travail des deux frères et sœur et le talent de Stoïana était indéniable. Les armes de son frère Ratislav, Rati pour les intimes, manquaient de passion. Il ne faisait qu'appliquer ce qu'il avait appris tandis que sa sœur créait des œuvres mortelles.

— Tu as réfléchi à ma proposition ? demanda Lysaelle quand elles furent arrivées sur le sable.

Stoïana baissa la tête et joua quelques instants avec son épée afin de se donner une contenance.

— Je ne peux pas quitter ma famille. Ils ont besoin de moi.

— Ne savent-ils pas laver la vaisselle ? demanda Lysaelle avec un sourire espérant dérider la forgeronne.

Elle réussit à lui faire esquisser un sourire mais il s'effaça bien trop rapidement à son goût. Évidemment la reine comprenait que la jeune femme soit attachée à sa famille mais gâcher un tel talent lui serrait le cœur. Les véritables artistes étaient rares. Stoïana en était une. Elle n'insista cependant pas, préférant ne pas envenimer les choses. Peut-être aurait-elle l'occasion d'en reparler plus tard.

Lysaelle souleva son épée et dirigea la pointe en direction de la forgeronne. Sans attendre Stoïana répondit en frappa l'arme de sa propre épée. La reine, toujours prête à se battre, ne se laissa pas surprendre et rendit le coup sans attendre. Ainsi commença la danse entre les deux femmes. Aucune d'elle n'avait la volonté de prendre le dessus sur l'autre. Elle n'était là que pour se vider l'esprit. Enchaîner les parades et les attaques, travailler leur endurance et leur agilité. Le sable, glissant et mouvant, était l'idéal pour leur entraînement. Il les obligeait à garder leur équilibre avec plus d'attention. Le choque des lames se perdait dans l'immensité de l'océan. Lysaelle avait l'impression d'être de retour chez elle, la chaleur en plus. Il lui arrivait souvent de s'entraîner au bord de la mer durant les beaux jours. C'était souvent Andrzej qui lui tenait compagnie. Il lui manquait terriblement.

Alors qu'elle était toujours dans le combat, ses pensées dérivèrent. Que pouvait-il se passer sur son île ? La vie avait-elle repris son cours ou bien tous retenaient-ils leur souffle en attendant le retour de leur reine ? Comment se débrouillait Andrzej ? Avait-il besoin d'aide ? Reconnaitrait-elle son pays à son retour ? Les questions s'accumulaient sans réponse satisfaisante. Jusqu'à présent elle avait réussi à les laisser de côté pour se concentrer sur les menaces immédiates. Mais ici, face à la mer, aux côtés d'une guerrière née, elle se laissait aller. C'est à ce moment qu'elle sentit un coup remontait le long de son bras et son épée vola sur le côté.

— Vous n'êtes pas concentré, constata Stoïana sans animosité alors qu'elle ramassait l'arme.

Elle la tendit, dague en avant et Lysaelle la récupéra avec un signe de tête. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas perdu ainsi un combat. La forgeronne avait raison, elle avait eu les pensées ailleurs. Même à présent elle peinait à s'en détacher.

— Désolé.

— Nous pouvons rentrer si...

— Non, c'est seulement qu'avec la menace qui approche, je me pose beaucoup de questions, expliqua Lysaelle bien que ce ne fût qu'une demi-vérité.

— Nous gagnerons.

La voix de la jeune femme ne flancha pas. Ses yeux, brillant d'une détermination sans faille, lançaient des éclairs. Voir une telle foi était réconfortant mais je ne permettais, hélas, pas de gagner des guerres. Pour cela il fallait des hommes entraînés. Beaucoup. Des millions. Ils en étaient loin. Tout se jouerait à la chance. Ou au destin.

OzavirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant