Chapitre 7

20 4 0
                                    

Elle fut surprise de ne trouver, dans la salle de repas, que le roi Orik. Nul conseiller, œil perçant ou regard noir. Le prince n'avait pas fait acte de présence, ce qui ne l'étonnait guère. Elle se méfia cependant de l'absence du roi Ganbaatar. Que pouvait-il bien faire ? Comploter ? Cela ne l'aurait pas étonnée. Lysaelle se retrouva donc en tête-à-tête avec le roi. Il n'y eut aucune parole échangée et elle en fut heureuse. Le roi n'était pas de mauvaise compagnie, le repas était presque agréable. Si elle savait pouvoir compter Soren dans ses alliés, elle avait l'intime conviction que le roi l'était aussi. Il tentait, par tous les moyens, de faire de Lysaelle, si ce n'était une amie, au moins une partenaire de guerre. Elle ne savait pas combien de temps durerait cette gentillesse ni si elle continuerait après la guerre. Au fond, malgré sa rancœur, elle voulait y croire. Créer une alliance d'échange entre les deux pays pouvait apporter beaucoup à la petite île de la reine.

Autrefois, sous le règne de ses parents, Lekathos avait été prospère avec de nombreux villages sur toute l'île. Mais lors de la Grande Famine, tout s'était effondré. Les cultures avaient péri, les animaux étaient morts, les terres étaient devenues stériles. Les villageois avaient rejoint en masse la capitale, Valsyt, dans l'espoir de trouver de quoi manger. Ils avaient eu tort. La situation avait empiré, la révolte avait éclaté et Lysaelle s'était retrouvée au pouvoir, à peine âgé de onze ans. Bien plus jeune que le prince Ayden. Les rumeurs avaient commencé, certaines parlaient de démons. Les habitants du royaume se méfiaient, ils ne voulaient plus commercer avec l'île. Les ponts avaient donc été coupés avec le continent. Il leur avait fallu des décennies pour se relever. Et ce qui restait de l'île n'était qu'une pâle ombre de l'ancienne richesse du pays.

— Comment s'est passé l'entraînement ? Demanda le roi après qu'ils eurent fini le dessert.

— Vos hommes sont doués. J'essaye de leur apprendre de nouvelles techniques. Votre fils ne vous a pas fait de rapport ?

Sa curiosité, elle le savait, était malsaine. Elle avait encore le sentiment de victoire en elle. Si le prince n'avait rien dit sur sa défaite, elle ne comptait pas en parler. Ce serait une munition qu'elle pourrait sortir plus tard.

— Je n'ai pas revu mon fils depuis qu'il est parti à votre entraînement. Il doit encore ruminer dans sa chambre.

— Il n'approuve pas ma présence, remarqua Lysaelle pour tenter de faire parler le roi.

Cela fonctionna bien plus qu'elle ne l'espérait. Il était bien plus enclin à la considérer comme une alliée qu'elle ne le croyait.

— Heureusement pour nous, il n'est pas roi. Je ne doute pas que ce pays se serait effondré. Son orgueil, c'est cela qui le conduira à sa perte. J'ai pourtant essayé de lui inculquer d'autres valeurs mais il ne veut rien entendre. Enfin, il aboie fort mais il ne mord pas.

Lysaelle doutait des dernières paroles du roi. Ayden était tout à faire le genre de personne à mordre. Très fort. Mais avec trop subtilité pour que le roi s'en aperçoive. Elle devrait donc redoubler de vigilance si elle ne pouvait pas compter sur la protection de ce dernier. La discussion se termina là. Le roi Orik lui donna rendez-vous dans la salle de réunion, dont Lysaelle ignorait l'emplacement, dans l'après-midi avant de la laisser seule. Avec des gardes. Ne souhaitant pas tenter le destin, elle s'en alla elle aussi, déambulant dans les couloirs sans but.

Elle s'autorisa une visite du château. Elle croisa principalement des domestiques ainsi que quelques gardes en service. Si elle tentait de retenir les différents lieux clés de la demeure, elle observait aussi les tapisseries et statues liées à la religion du pays. Dans l'ensemble on retrouvait les mêmes éléments que dans celles qu'il y avait eues à Lekathos. Des dieux majeurs ainsi que des dieux mineurs expliquant tel ou tel phénomène. Il y avait la naissance du monde, les guerres ainsi que les prédictions d'apocalypse. Elle n'avait vu aucun temple ou lieu de cultes mais elle ne doutait pas qu'il y en avait.

OzavirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant