C'est sur un paysage blanc que le soleil rouge pointa ses premiers rayons. L'hiver était là et la morte-saison avec elle. Si, en été, ces terres à la réputation maudites étaient lumineuses et pleines de vie, en hiver elles faisaient honneur aux rumeurs. L'île, ensevelie sous la neige, ne permettait plus de cultiver et rares étaient les animaux à survivre au froid et aux tempêtes. Pourtant, il ne pouvait être démenti que ce lieu, coupé de tout, faisait partie des plus belles contrées du royaume d'Ozavir. Ses forêts denses abritaient la plus grande diversité de faunes et de flores, ses eaux fourmillaient de poissons. Pour ces raisons et bien d'autres encore, Lysaelle aimait son pays. Profondément. Elle y trouvait la paix, la joie, la douceur.
La chaleur de la chambre enveloppait la reine qui se trouvait bien heureuse de ne pas affronter le froid qui couvait dehors. Les températures, à cette époque, étaient parfois mortelles. La neige accrochait à présent le sol et ne fondrait pas avant de longs mois. Le premier jour d'un long hiver.
Elle observa encore un moment le paysage de sa vallée. Dans son château, construit sur les hauteurs d'une petite montagne, elle avait la plus belle vue du pays : d'un côté l'océan infini, de l'autre les forêts et les montagnes inhabitées et en face l'enceinte du château, ses quelques maisons et sa cour. Au-delà des murailles on devinait sans peine la ville, l'unique survivante de l'île. Une fumée claire et douce s'échappait des cheminées de fortunes.
Finalement, tout était comme chaque matin. Pas de famine dévastatrice, d'épidémie mortelle, de malédiction ancestrale. Un pays comme un autre, prêt pour une nouvelle journée, sous le regard bienveillant du soleil. Lysaelle offrit un sourire au monde et se détourna de la fenêtre.
Elle s'habilla seule, choisissant avec soin sa tenue. Si elle était une guerrière, elle était aussi une reine. Ses habits, bien que simples, se devaient d'être parfaits devant la cour. Comme dans tous les royaumes, les ragots étaient légion. Voilà bien l'une des rares choses qu'elle n'avait pas pu changer. On ne pouvait pas modifier la nature profonde des gens, la reine l'avait rapidement appris à ses dépens. Elle était, à présent, soigneusement protégée contre les commérages et avait appris, elle aussi, à lancer des rumeurs afin de contrer ceux qui lui voulaient du mal. Au début, elle avait eu honte de cela, à présent elle ne s'en privait pas. Sans ces préventions, elle aurait perdu sa place il y avait bien longtemps.
Une fois prête, elle sortit de sa chambre. Dans le couloir, quatre gardes attendaient. Deux d'entre eux l'accompagnèrent dans les méandres du château. Cette disposition aurait pu paraître démesurée mais Lysaelle savait que la prudence était mère de sûreté. De plus, elle aimait la compagnie de ses hommes et de ses femmes de mains. Tous issus de milieux différents, elle les avait choisis avec soin année après année tant pour leurs pouvoirs que pour leurs qualités humaines. Il lui fallait des personnes de confiance mais avant tout des amis. Personne n'acceptait de protéger quelqu'un qu'il n'appréciait pas.
— Bien dormi, Mademoiselle ? demanda le garde à sa droite.
— Parfaitement et toi Mikolaj ? répondit Lysaelle sur un ton plein de sous-entendus.
Il y eut un pouffement à gauche alors que le garde baissait la tête avec un petit sourire. Mikolaj était connu au château pour sa manie de ramener dans son lit nombre de conquêtes. Il ne devait pas ce succès à sa fonction mais bien à sa personnalité. Athlétique et charmeur, il pouvait convaincre une vierge de se donner à lui. Lysaelle aimait rigoler de ce talent.
— Te rappelles-tu son prénom au moins ? interrogea le second garde, Lyan, sans cesser de rire.
— Tu es censé me soutenir !
— Non, il soutient sa reine. Et je suis curieuse de connaître son prénom, rétorqua Lysaelle en lançant un regard à Mikolaj.
C'était ces conversations innocentes qui plaisaient temps à la jeune femme. Elle connaissait et était proche de ses gardes. Leur relation allait au-delà d'une protection.

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Ozavir
FantasyLysaelle, reine de Lekathos, dirige avec bienveillance son peuple coupé des autres pays. Les autres dirigeants craignent ces terres inhospitalières où vivrait, dit-on, des mages. Pourtant, le roi Orik, roi d'Arzaski, décide de demander une alliance...