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Mort en m'aidant.
Ma bouche s'ouvre sous le choc. Valentino redresse la tête vers moi et son regard, noir de peine et de rage, remue mes intestins et m'arrache un glapissement. La voiture démarre et escortée de deux véhicules, nous roulons un moment avant de franchir les grilles de la demeure de Valentino. Je n'ai rien suivi de la route. J'ai l'impression d'être ailleurs. Vide.

Un des hommes me soulève et m'emmène dans la chambre du maître des lieux. Une des bonnes entre avec une grosse valise, suivie d'un petit homme trapu et dégarni et d'une petite infirmière simencieuse. Sans un mot à mon adresse, il m'examine et fait noter consciencieusement ses observations sur un petit carnet. Il conclue son examen en m'expliquant que j'ai plusieurs côtes cassées mais encore en place. Il me bande le thorax en m'expliquant qu'une dizaine de jours et d'antalgiques de grande prudence suffiront à les réparer. Un traumatisme crânien léger ne nécessitant qu une surveillance constante pendant quelques jours complète le diagnostic de ma mésaventure dans la voiture des kidnappeurs. Le passage à tabac m'a également fait sauter deux dents mais il ne devrait pas être compliquer de redonner vie à mon sourire plaisante le vieux dégarni. Il part en me laissant des boîtes de comprimés, des bandages et une liste d'instructions dont s'empare la petite bonne. Tout le monde quitte la chambre et je me retrouve seule avec moi même.

Je me tourne sur moi même, assise sur le lit. Personne. Personne à qui parler. je me sens si seule, Après cette profusion d'humains me soignant, comme si les blessures physiques étaient urgentes, que seul mon corps comptait, mais que moi je n’existais pas. Sans m'en rendre compte des larmes commencent à dégouliner le long de mes joues. Puis c'est un torrent inextinguible. Je m'endors d'épuisement sur l'oreiller trempé.

Le réveil le lendemain est difficile. Vue la hauteur du soleil, on doit être en début d'après-midi. Mes pensées sont dévorées par une  migraine compressant mon cerveau comme dans un étau. Je me lève et me rend compte que je porte un t-shirt d'homme. Je n'ai aucun souvenir d'avoir enfile ça. Le lit n'est pas défait de l'autre côté, j'ai donc dormi seule et mon ventre de serre à cette pensée. Où est Valentino?
Je descends dans cet accoutrement, sans me soucier des regards des hommes de Valentino ou des domestiques. Il semble n'être nulle part et je le retrouve dans la cour, pieds nus. Sans réfléchir, j'avance le long de l'allée jusqu'à l'écurie.

Le poney montre des signes de nervosité. Il hennit à plusieurs reprises et renacle. Je ne m'intéresse pas plus à l'animal et descend l'escalier caché derrière la porte. Un bruit atroce de roulement aigu se fait entendre. Le son s'étouffe brusquement tandis qu'un hurlement de douleur me cloue sur place. Quelqu'un souffre là dedans ! Je devale les dernières marches pendant un second cri venu tout droit des enfers.

Mon premier regard tombe sur un corps au sol, ensanglanté, démembré, emasculé. Le type à l'arrière de la voiture. Celui qui a essayé de me violer. Étrangement, je ne ressens pas de soulagement mais de l'horreur. L'avant bras est détaché du bras, la main de l'avant bras, les doigts de la main, les phalanges sectionnées, les ongles arrachés comme un puzzle morbide. Je relève la tête, voulant fuir cette image traumatisante et la scène qui se déroule sous mes yeux me soulève le coeur. Valentino est debout face à un homme pendu par les bras au milieu d'une pièce. Il y a des cages au fond. Pas des cellules. Des cages.

L'homme a les bras couverts de sang. Les ongles ont été arrachés et on voit un trou au milieu d'une main, comme cause par une balle ou une perceuse. L'homme n.est plus bien vaillant, il se laisse prendre au bout de la chaîne en métal. Il est en sueur. Un oeil semble sort de l'orbite droit. Quand mes yeux rencontrent le dernier qui lui reste, je reconnais le passager avant de la voiture. Celui qui tirait depuis la fenêtre. De larges bandes de peau sont à vif et je me demande ce qui a bien pu le mettre dans cet état.
Il est entièrement nu et ses jambes sont zébrées de traces violacées qui s'enroulent autour d'elles.

Plusieurs hommes de Valentino sont installés dans de profonds fauteuils, l'un fume un cigare. Il tire une dernière bouffée, avant de l'écraser dans le cou d'un autre homme, attaché à une chaise que je n'avais pas encore aperçue. L'homme croisse et serre les dents sous la brûlure.
Le bruit de crécelle se fait à nouveau entendre: un grincement strident accompagné d'un bruit de roulement. Cette fois j'identifie de où il provient. Valentino tient dans sa main un appareil  relié à une prise électrique et il l'applique sur le ventre de l'homme. Il hurle instantanément. Valentino le fait rouler sur une dizaine de centimètres et lorsqu'il coupe l'appareil et l'écarte, je vois qu'une bande de peau parfaitement régulière est a vif. Arrachée. Il est en train de dépecer cet homme. Vivant.

Je m'enfuis en hurlant.

Série: Mafia. Tome 1. L'oeil de Monte scuroOù les histoires vivent. Découvrez maintenant