Une grande sensation de chaleur m'avait envahie tandis que mon corps semblait changé en poupée de chiffon. J'étais molle et sans volonté. Après m'être pelotonnée plus étroitement, mes paupières commencèrent à papillonner.
Après quelques instants de mise au point, je focalise mon attention dans une paire d'yeux noirs où je distingue quelques cristaux dorés logés au creux des iris, fixées sur moi dans un regard à la fois tendre et inquiet.
Lorsqu'il comprend que je suis tout à fait consciente, il me redresse un peu, c'est là que je me rend compte que je suis installée sur ses genoux depuis tout à l'heure. Une litanie à peine articulée s'échappe de ses lèvres, répétée en boucle, entre deux baisers sur mon front:
"- Valentina Mia... Tesorino...""- Valentino?"
"- Sì amore mio, sono tornato per te..." (Oui mon amour, je suis revenu te chercher...)
"- Mi hai fatto credere di essere morto!" (J'ai cru que tu étais mort!)Mes souvenirs me sont revenus quand j'ai pu croiser ses iris adorées. Notre rencontre, la façon dont il m'a sauvée, les gens torturés dans la cave, le petit, mon enlèvement et l'incroyable vide qui m a creusé le corps quand j'ai vu les roquettes s'encastrer dans les murs de l'usine désaffectée d'où il venait de me fairee sortir. Mon corps et mon esprit s'étaient alors dissociés pour ne plus se reconnecter. Les sensations étaient trop douloureuses, mon esprit trop déchiré. De nombreuses zones d'ombres demeuraient cependant. Comme s'il avait saisi le fil de mes idées, Valentino a commencé à m'expliquer :
"- quand nous nous sommes rencontrés, mon frère, qui est le parrain de la mafia sarde, venait de subir un attentat qui devait l'éliminer, lui et son fils. Nous ignorions qui en était responsable. Dans ce milieu, si la place reste vacante ne serait-ce que 24h, c'en est fini. Alors le temps de sa convalescence, et pour protéger mon neveu, j'ai pris sa place. J'ai toujours été associé aux affaires de près ou de loin. Mes activités au sein de la famille concernaient jusqu'alors la branche légale de nos affaires. La situation était grave, il fallait trouver lesquels de nos hommes étaient impliqués et les éliminer..."
"- la femme de ton frère..."
"- était le moteur de cette ... Révolte. Apparemment elle voulait éliminer mon frère et son fils, mais j'ignore quelles étaient ses motivations"
"- toi. Elle te voulait toi"
"- quoi?"
"- elle m'a dit qu'elle avait séduit ton frère pour se rapprocher de toi"
"- je l'ai vue une fois ou deux avant qu'elle soit avec lui. Je n'avais jamais imaginé..."
"- est-elle...?"
"- morte? Oui. Elle et ses associés. Ils ont fait beaucoup trop de dégâts et parmi les pires péchés punis par le code de la mafia, la trahison et ce qui touche aux enfants sont les plus sévèrement punis. Ils ont commis les deux. Ils méritaient la mort."
"- les roquettes "
"- dès que tu as été évacuée, j'ai fait sortir tous nos hommes, y compris les blessés et les morts, puis j'ai donné l'ordre de tirer."
"- il ne restait.."
"- qu'Ada et les siens. Quelques uns ont essayé de s'enfuir en voiture mais nous nous sommes occupés d'eux. Maintenant c'est terminé. Je t'ai fait évacuer pour quelques semaines le temps d'éliminer nos éventuels rivaux pour que tu sois en sécurité. J'ai été très surpris de ne pas te voir revenir."
"- j'avais perdu tous mes souvenirs de l'Italie..."Un léger baiser se pose sur mon front, et Valentino enchaîne :
"- et l'enfant, comment se porte-t-il?"
"- l'enfant?"
"- tu étais enceinte en partant d'Italie !"
"- non ! Non? Qu'est ce que tu racontes?"
"- les tests que tu as passé... J'ai demandé à..." Il s'arrêta un instant de parler, comme frappé par une évidence "ça doit faire partie de ce que tu as oublié... Tu es enceinte de plusieurs semaines maintenant si tout s est bien passé"
Je suis abasourdie. Il se tourne, décroche son smartphone et appelle un cabinet de gynécologie du coin pour un rendez-vous en urgence.C'est toujours dans cet état léthargique que je sors du cabinet, tenant dans les mains les images de l'échographie. Cinq mois. Cinq mois de déni. Au moment où je monte dans le véhicule de Valentino, une puissante berline noire, il prend ma main pour attirer mon attention.
"- ti amo Valentina... Tu e il bambino vi amo. On va prendre le temps de se retrouver. On va installer un petit nid pour le recevoir tranquillement. On va se marier tous les deux et nous formerons une famille. Je veux de tous les enfants que tu voudras bien me donner. J'ai bien assez d'argent pour assurer votre sécurité matérielle a tous les deux, même si nous devions vivre mille ans."
"- il ne s'agit pas d'amour Valentino. Nous nous connaissons à peine. Ce que je sais de toi et de tes activités, ce n'est pas ce que je veux pour notre enfant. Je veux de la sécurite tout court."
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Série: Mafia. Tome 1. L'oeil de Monte scuro
ChickLitValentine vient d'obtenir son bac et la tradition familiale veut qu'on lui offre le voyage de son choix. Seule. Elle quitte le foyer familial, avec une carte bancaire illimitée et ordre de ne donner aucune nouvelle pendant deux mois et de ne rentrer...