18. Kassyen

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La nuit était tombée il y a à peine trente minutes, mais tout le monde dormait déjà sur le bateau. À vrai dire, cela faisait des heures qu'ils avaient tous piqué du nez. Roman et Kassyen étaient les seuls encore debout, le premier car il manœuvrait leur embarcation et le second à cause d'une insomnie.

Assis à l'arrière, ils discutaient à voix basse.

- Elle sera bien plus en sécurité avec la résistance, murmura Roman.

Kassyen le savait bien, mais ça lui avait fait bizarre de la laisser derrière lui. Il avait eu la sensation de l'abandonner une seconde fois. Il sentait déjà la culpabilité monter en lui, alors même que c'était sa décision à elle et qu'il n'aurait pas pu la faire changer d'avis.

- Oui. J'aurais juste aimé pouvoir passer plus de temps avec elle, répondit-il.

Kassyen jeta un regard en coin à son ami, soupirant en voyant sa mine dépitée.

- Tu peux dire que toi aussi. Je sais que tu le penses.

Roman haussa des épaules.

- C'est pas ma mère.

- Et alors ? Elle s'est inquiétée pour toi, t'as crié dessus quand tu faisais des conneries et t'as tenu dans ses bras quand tu étais triste. Elle t'a élevé. Si ça ne fait pas d'elle ta mère, alors je me demande quels sont les critères.

Le brun croisa furtivement son regard, l'air incertain et coupable.

- Ce n'est pas de l'irrespect de la considérer comme tel. Tu ne déshonores pas tes parents en ayant trouvé des gens pour prendre soin de toi. Ils seraient heureux de savoir que tu n'étais pas seul. Et tu n'as pas intérêt à croire que ça l'est vis-à-vis de moi, parce que sinon je vais t'en foutre une.

Roman ravala un sourire et acquiesça. Cependant, Kassyen savait que ses mots ne s'étaient pas encore imprimés dans la cervelle de moineau de son meilleur ami. Alors il nota dans un coin de son esprit qu'il devrait les répéter.

- En tout cas, je refuse d'inscrire ton père comme ma figure paternelle attitrée, s'exclama le pêcheur.

Kassyen ricana.

- Je comprends parfaitement pourquoi.

Il l'effacerait bien de son certificat de naissance, ou de ses souvenirs.

- Pourquoi est-ce qu'on doit retourner à Straskà, déjà ? Je ne vais pas me contenter du « fais-le » que Zari "lyomir niashka" Nalyensky m'a lancé.

Kassyen arqua un sourcil en entendant le surnom.

- Rayon de soleil ? Elle est plutôt l'inverse. Un trou qui aspire toute la joie et la lumière qui l'entoure.

- Vous êtes faits l'un pour l'autre. Deux abysses sans fond et sans chaleur, sourit Roman.

L'assassin roula des yeux.

- Donc ?

- Je veux récupérer Arez. Elle veut récupérer Lazeh.

Roman haussa les sourcils.

- La raison pour laquelle on se rallonge notre chemin de plusieurs semaines, c'est parce que tu veux retrouver ton psychopathe de cheval ? fit-il, incrédule.

- Elle a aussi caché une partie de notre argent dans la ville.

- D'accord, ça je peux comprendre, concéda-t-il.

Il se concentra en apercevant le virage qui se profilait face à eux et tourna la barre avec précision. Ils pivotèrent tout en douceur, suivant parfaitement le tracé de la rivière. Pourtant, cela suffit à réveiller Zari, à l'avant du bateau. Elle se redressa et leur adressa un coup d'œil, puis grimaça en posant une main sur son abdomen.

The Assassins - T2. L'âge noirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant