21. Zari

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Zari entendait son pouls battre dans ses oreilles, alors qu'elle avançait vers le camp. Chaque pas semblait lui prendre une quantité astronomique d'énergie. Ses jambes lui paraissaient faibles et elle avait la sensation d'avoir perdu toute force dans ses doigts.

Elle s'arrêta avant de dépasser la lisière du bois et tenta de calmer sa respiration. Elle avait décidé d'y aller seule, malgré l'insistance d'Esta. Même si la présence de son amie aurait été d'un certain réconfort, elle savait qu'elle devait le faire sans elle. C'était sa famille et son passé. Il lui revenait d'y faire face.

Zari serra les poings et ferma les yeux, prenant une grande respiration. Elle se répéta qu'elle avait subit des situations bien pires, mortelles même, et que celle-ci n'avait rien de comparable. Puis, elle se remit en marche.

Lorsqu'elle dépassa la première tente, une bonne odeur de nourriture vint lui caresser les narines. Son cœur se serra douloureusement en reconnaissant le plat. La nostalgie pouvait être agréable, mais en cet instant, elle avait un goût amer, à l'opposé de celui de l'ukurlijan qu'était en train de cuisiner sa mère à quelques mètres.

Elle sentit les regards se diriger vers elle. Curieux, inquisiteurs, méfiants. Rares étaient ceux qui la prenaient pour une amie, malgré sa couleur de peau, identique à la leur. Zari ne pouvait leur en vouloir. Elle savait l'image qu'elle renvoyait. Elle avait pourtant fait un effort, afin de ne pas trop effrayer ses parents.

Elle avait revêtu un pantalon noir et un haut à manches longues gris foncé, sous son manteau. Elle avait laissé la plupart de ses dagues à Kassyen, n'en conservant que deux, attachées dans son dos, là où personne ne pouvait les voir. Elle avait prit le temps de tresser ses cheveux et s'était assurée qu'elle n'avait aucune tâche de sang sur les mains.

Mais elle n'était pas habillée comme une Nolie. Elle arborait la tenue d'une Osnovienne, d'une criminelle.

Remarquant le changement d'atmosphère, Sarama releva la tête de ses courgettes. Elle haussa les sourcils en voyant Zari, la reconnaissant instantanément. Elle sauta sur ses pieds et la rejoint au milieu de la plaine.

- Je ne m'attendais pas à te revoir un jour, s'exclama-t-elle en noli.

- Je m'en doute.

- Que fais-tu ici ?

Zari se fit violence pour détourner le regard vers sa mère. Elle eut l'impression de se prendre un boulet de canon dans le torse lorsqu'elle rencontra les yeux bruns de Yona. Ils étaient écarquillés et humides. Sa bouche était ouverte et elle avait une main serrée autour d'un pendentif qu'elle portait au cou.

Zari s'était longtemps demandé si sa mère la reconnaîtrait. Elle avait maintenant la réponse.

Yona fit tomber sa planche à découper, les morceaux de viande s'écrasant sur l'herbe. Elle sembla encore plus fébrile que sa fille en s'avançant. Même si cette dernière ne se rappelait pas parfaitement des traits de son visage, elle remarqua qu'elle avait vieilli. Son visage, qui était auparavant aussi lisse que la surface d'une épée, était ridé au niveau des yeux et des pommettes. Ses cheveux étaient parsemés de mèches grises, mais elle était toujours belle. Elle était toujours sa mère et lorsqu'elle arriva à son niveau, Zari ne sut quoi faire.

- Hyd vakham, nali, dit-elle maladroitement à cause de sa langue sèche.

Cela fit craquer Yona, qui laissa ses larmes s'écouler tout en prenant le visage de sa fille en coupe.

- Tu es réelle, murmura-t-elle avec soulagement. Tu es vraiment là.

Elle pleura de plus belle et l'attira contre elle. Zari se crispa face à son étreinte et posa sa main droite dans son dos sans pour autant réussir à se détendre.

The Assassins - T2. L'âge noirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant