17. Zari

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- Si je choppe le tétanos, je vous étripe tous, déclara Roman.

- Tu m'enlèves les mots de la bouche, enchaîna Inna. Tu es sûr qu'il n'y a pas un chemin moins...

Elle fit une pause, à la recherche de l'adjectif adéquat.

- Dégradé ?

Dégradé n'était pas assez fort pour décrire ce qui leur faisait face. Le réseau souterrain de Tvenyev était extrêmement complexe et n'avait pas été entretenu depuis des décennies. Les murs s'effritaient, ils étaient parsemés de trous d'où sortaient des rats, des araignées et tout un tas d'insectes dont Zari ne connaissait pas le nom. Le sol avait été envahi par les eaux usées, qui leur arrivaient à mi-mollet. Le pire, c'était l'odeur de renfermé, qui se mélangeait à la puanteur des excréments. Elle leur donnait des hauts-le-cœur, qui devenaient heureusement de plus en plus contrôlables à mesure qu'ils s'y habituaient.

- Tous les tunnels sont comme ça, leur expliqua Ilya. Même si on marchait jusqu'à une autre entrée, ça ne changerait pas grand-chose.

Depuis le petit sas d'entrée dans laquelle ils se trouvaient, Zari toisait le passage avec incertitude. Elle détestait les espaces clos. Or, des galeries taillées à même la pierre, serpentant à plusieurs mètres sous terre, entraient dans cette catégorie.

Pour se rassurer, elle se rappela que cela ne l'avait pas dérangée à Tvarni, alors qu'elle avait passé des jours enfermée. De même lorsqu'elle avait quitté Herzivka.

Ce n'était pas pareil... lui souffla la petite voix dans sa tête.

Non ça ne l'était pas. À Tvarni, les murs étaient espacés de bien plus que de quatre-vingt centimètres. L'air n'était pas rassis et étouffant. Les odeurs inspiraient la vie, une vie pleine de douleur et de désespoir, mais pas la mort implacable et solitaire. Dans les deux situations, elle pouvait se concentrer sur sa colère et sur sa douleur. Aujourd'hui, elle n'avait que sa peur.

- Quelques kilomètres et on sera dehors, murmura Esta juste à côté d'elle.

Zari lui jeta un coup d'œil en biais. Son visage était encore plus pâle que d'habitude et ses yeux affichaient une angoisse proche de céder à la panique. La Nolie saisit la main de son amie.

- Tout va bien se passer, lui dit-elle d'une voix se voulant rassurante. La traversée de ces tunnels ne s'accompagnera pas d'un souvenir horrible.

- Ne parle pas trop vite, on est pas encore partis, répliqua la rousse en grimaçant.

Zari ne sut quoi répondre à cela. Comment la rassurer quand elles partageaient les mêmes craintes ?

Elle avait un mauvais pressentiment. Le genre qui vous prenait aux tripes et vous donnait envie de régurgiter votre dernier repas. Quelque chose lui disait qu'il n'y avait pas que des insectes dans ces tunnels.

- Les barrages ne sont pas prêts de disparaître, s'exclama Kassyen. On ne pourra jamais quitter la ville en passant par la rue. C'est notre seule option.

Et c'était le cas. Ils n'avaient pas le choix. Ils devaient emprunter ces galeries. Les paroles soufflées par l'instinct de Zari étaient loin d'être suffisantes pour qu'ils renoncent.

- On perd du temps, fit-elle, rompant ainsi le lourd silence qui s'était installé.

Inna poussa un soupir et hocha la tête. Elle s'engagea dans le passage juste après Ilya, qui les guiderait avec sa carte. Zari passa à leur suite, suivie par Hefi et Esta, qui portait Aron dans ses bras. Juste derrière elles, Roman se plaignit de l'odeur et Arima le réprimanda. Kassyen ferma la marche.

The Assassins - T2. L'âge noirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant