Encore cinq minutes! (en relecture)

30. Une pour la science

Mont Golden Hinde, île de Vancouver

Le bruit d'un moteur brisa le silence avant que le véhicule tout terrain fasse son apparition entre les arbres tandis qu'Aodhan atterrissait près de Raphaël.

Des patrouilleurs venaient de découvrir un drone suspect n'appartenant pas à la tour écrasé dans la montagne. L'équipe de Vivek Kapur était formelle, il ne s'agissait pas d'un modèle enregistré au pays.

— Les législations humaines sont assez rigoureuses à ce propos, avait dit le Vampire au moment de faire son rapport.

L'ami d'Elena était précis, professionnel et courtois, preuve qu'il apprenait vite à tenir son nouveau rôle. Il prenait souvent des initiatives qui s'avéraient bénéfiques et était doté d'une capacité impressionnante à prendre des décisions rapidement et surtout, à les mettre en oeuvres. L'Archange interagissait peu avec lui, mais à chaque fois, il pouvait apprécier sa valeur. Illium principalement était convaincu que l'informaticien serait appelé à jouer un rôle important dans le futur.

À cet instant précis, Vivek Kapur avait eût l'air de vouloir dire autre chose mais restait muet. Un autre Archange aurait sans doute choisi d'ignorer le subalterne se disant qu'il en avait déjà assez fait, mais Raphaël n'était pas un Archange ordinaire. Il s'était donc enquit de ce qui troublait le Vampire:

— Vous avez une experte en drone à portée de mains. De visu, elle saura certainement vous en dire davantage et beaucoup plus rapidement que moi.

Raphaël n'avait pas eu besoin d'en entendre plus. Vivek avait raison et voilà pourquoi il avait communiqué avec Aodhan afin de faire venir Emma dans la montagne. Le Vampire avait mentionné la présence potentielle d'un transmetteur et il était hors de question d'emmener cet engin à la base sans s'assurer d'abord que c'était sécuritaire.

Dès que le véhicule fut immobilisé, Aodhan se dirigea vers la portière du conducteur et l'ouvrit. Emma bondit au sol, bientôt suivie de Morgan du côté passager.

"Aodhan a raison de s'impatienter. Elle fond à vue d'oeil", songea Raphaël en observant les deux amis de loin.

Doc Martens rouges à huit trous, pantalons cargo dont les poches débordaient d'objets divers, t-shirt noir avec une citation d'Albert Einstein: "If we knew what it was we were doing, it would not be called research, would it?"*1, queue de cheval en fontaine et immense lunettes, la fille - que Galen avait commencé à surnommer Brindille - attirait les regards et faisait chuchoter ceux de la troupe de sentinelles qui ne l'avaient pas encore vue de près. Elle avait maigri et avait l'air plus malade que la dernière fois qu'il l'avait vue et l'Archange éprouva une profonde compassion pour son Sept qui était forcé d'assister à la dégradation de sa protégée. L'impuissance n'était pas faite pour les Anges de sa trempe.

Raphaël restait en retrait, observant la scène, ne voulant pas l'intimider. D'autant plus qu'il était très curieux de comprendre pourquoi elle avait attiré l'attention de son Sept. Après l'avoir vu tenir tête à Aodhan pour s'accrocher à sa liberté de mouvement dans le ravin la veille, mais surtout après les paroles étranges de l'Ancien Vampire Huecuvas, il devait admettre qu'il avait bien envi de la voir en action. Visiblement, Zaria l'estimait beaucoup et les sentiments qui l'unissaient à Aodhan et Vivek étaient évident, mais l'Archange se disait que même son Sept le plus posé, raisonnable et égal de tempérament n'était pas exempt de faire des bêtises. Il était encore très jeune, il avait encore beaucoup d'expérience à acquérir.

C'est seulement lorsqu'il la vit à l'oeuvre qu'il comprit. Sûre d'elle, à son affaire, donnant des directives précises à ceux qui se trouvaient autour d'elle et ne se laissant pas intimider par la présence extraordinaire des Anges, Vampires et même, remarqua Raphaël, de lui. L'Archange se demandait s'il s'agissait d'inconscience, mais ses observations le portèrent vite à la conclusion que lorsqu'elle était en train de travailler, son sérieux et son assurance lui conférait une espèce d'aura que tous avaient envi de respecter.