33. Le parachute

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Depuis son retour à New York, Aodhan s'occupait principalement de l'entraînement des soldats et des rondes de surveillances les plus près de la cité. Il ne pouvait pas supporter de s'éloigner à plus d'une demi-heure de vol de la Tour, tenant à pouvoir répondre rapidement si Emma l'appelait.

Il savait qu'elle était mal en point, mais n'avait pas réalisé la gravité de la situation avant de croiser le regard de Keir ce matin-là. Entêtée comme pas une, Emma se maintenait en vie seulement à la force de sa rage de vivre. Elle brûlait la chandelle par les deux bouts, travaillant, faisant fonctionner son cerveau, effectuant le plus de tâches possibles. Et à chaque soir, rompue de fatigue, elle tombait de sommeil devant eux. Aodhan ne comprenait pas pourquoi Vivek ne la forçait pas à s'arrêter. Ces deux-là partageaient une vision du monde qui n'appartenait qu'à eux et dont tous étaient tenus à l'écart.

Pour Aodhan, il était impensable que son amie ne consacre pas toutes les secondes de sa vie à guérir.

Rangeant son téléphone, il ordonna à l'escadron de poursuivre les exercices et rentra à la Tour, une peur dévastatrice le dévorant de l'intérieur. Il n'avait jamais volé aussi vite de sa vie, poussant son corps à la limite de ses capacités. Il put atterrir directement sur le balcon de l'appartement de Vivek Kapur, celui-ci ayant vécu, au début de sa vie vampirique, avec un préposé Angélique. Le message d'Emmie, sans émoji, sans surnoms ni fioritures en disait long sur le sérieux de la situation. Si elle ne prenait pas la peine d'agrémenter ses textos, cela signifiait qu'elle allait mal. Et sa voix! Lorsqu'elle avait fini par l'appeler pour lui dire qu'elle préférait l'attendre, il avait senti une douleur monstrueuse lui déchirer la poitrine. Depuis quand sa voix avait-elle perdu son éclat?

La scène qu'il découvrit en entrant dans le salon de l'informaticien finit de le terroriser. Emma était affalée sur le canapé, un linge humide sur le front, Vivek, installé face à elle l'observant attentivement, les bras ballant, une expression troublé sur le visage.

— Elle voulait t'attendre, dit le Vampire. J'ai pas...

— Je suis encore capable de communiquer, fit Emma d'une voix faible, levant la main qui ne tenait pas le linge humide.

Il n'y avait plus aucun doute possible, ils la perdraient. Depuis le matin, elle avait encore fondu et son teint était limite cadavérique tandis qu'elle gisait là.

Aodhan s'approcha et la souleva délicatement dans ses bras. Elle était devenue un petit oiseau fragile en l'espace de quelques heures. Il posa les lèvres sur son front fiévreux exactement comme il l'avait fait avec tout ceux qu'il avait dû accompagner dans leur agonie.

— Elle a fondu en cinq minutes, devant mes yeux, émit Vivek, choqué. J'ai déjà communiqué avec Keir. Ils l'attendent.

— Northern Lights, ne pleure pas, souffla-t-elle, sa petite main effleurant son visage. Laric m'a dit que les guérisseurs ont une autre idée si le sang ne fonctionne pas.

Il ne s'était même pas aperçu que des larmes coulaient sur son visage.

L'ascenseur les attendaient, tout comme le guérisseur, dès qu'ils arrivèrent au département médical.

— On va recommencé les intra-veineux, dit Keir tentant de cacher sa déception à la vue de l'état de détresse soudain d'Emma. Suivez-moi.

Une fois dans la chambre des soins intensifs, Aodhan déposa Emma sur le lit et s'écarta afin de laisser le personnel médical faire son travail. Vivek, d'un ton presque mécanique rapporta ce qui s'était passé chez lui tandis qu'on branchait la jeune femme sur tout un tas de moniteurs.

— Je vais demander à Lucius de prioriser les nouveaux échantillons, dit Keir, se précipitant chez son collègue.

— Je dois me rendre en physio, soupira Vivek, le regard rivé sur la frêle silhouette de son ami.

Encore cinq minutes! (en relecture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant