Chostakovitch

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J'ai froid. 

C'est étrange. J'ai l'impression de ne pas avoir pensé depuis une éternité. Mes membres sont engourdis et mon esprit embrumé. J'essaie d'ouvrir les yeux, mais mes paupières refusent de s'ouvrir. Où suis-je ? Aucun son. Aucune odeur. Rien pour m'aider à me repérer. Mais j'ai froid.

Le temps passe... Une heure ? Un jour ? Une année ? Peut-être plus. Je ne sais pas. Lentement, le sang semble à nouveau couler dans mes veines. Je le sens parcourir l'entièreté de mon corps, et le réchauffer. Un bruit sourd et régulier se fait entendre. D'où vient-il ? Je crois qu'il est en moi. Mon coeur. Il bat. Le son résonne dans ma poitrine comme un tambour. A-t-il toujours battu aussi fort ? Je n'ai plus froid. Et mon organisme se remet en route peu à peu.

J'ouvre enfin les yeux.

Devant moi, une vitre légèrement opaque. Ma vision est encore trouble et je peine à distinguer ce qu'il y a de l'autre côté. Mes doigts tressaillent légèrement. Je peux bouger. Enfin je crois. Non sans peine, je monte ma main droite devant mon visage et l'observe. Elle n'a pas changé, pourtant j'ai le sentiment de la redécouvrir. Je la plaque contre la vitre. Cette dernière semble mobile. Je la pousse sans avoir besoin de forcer et elle s'éloigne de moi par le côté. Comme une porte ? Je prends alors conscience que je suis allongé sur le dos. Mais où ?

Avec beaucoup de volonté, j'arrive finalement à m'asseoir. Ma vision s'est rétablie, mais ça ne m'aide pas beaucoup. Il fait sombre. Je regarde où je suis assis. C'est doux et confortable. On dirait une sorte de lit, mais que l'on peut refermer avec la vitre que j'ai poussée plus tôt. Une sorte de sarcophage ? Mais en verre ? Comme dans Blanche-Neige. Un son étrange sort de ma bouche. Un rire ? Oui, je viens de rire en effet. Pourquoi ? Je ne sais pas. Mais ça fait du bien.

Mes yeux s'adaptent peu à peu à l'obscurité. Autour de moi, je distingue d'autres capsules comme la mienne. Je ne suis pas seul. Il y en a d'autres. Je ne comprends pas. Qu'est-ce que je fais ici ? J'essaie de me souvenir. Rien. Ma tête est encore dans le brouillard le plus complet.

Je décide de me lever. Je déplace mes jambes pour les faire pendre le long de ma couche. D'abord la droite. Puis la gauche. Je prends une grande inspiration. Puis j'expire. Lentement. Avec une légère impulsion, je me laisse glisser au sol. Mes jambes tremblent sous mon poids mais tiennent bon. Je fais un petit pas. Puis un autre. Puis encore un autre. Je peux marcher. Je m'approche du sarcophage le plus proche de moi. À l'intérieur, un homme assoupi au visage paisible. Les autres capsules dans la salle semblent également contenir des femmes et des hommes en pleine léthargie.

Après un long moment à contempler ces autres personnes, je décide de sortir de la pièce dans laquelle je me trouve. J'avance à tâtons dans l'obscurité et je trouve finalement une entrée. Une sorte de couloir je crois. J'hésite un instant avant de reprendre ma route. Un pas après l'autre, mes jambes gagnent en mobilité. Je marche à présent presque normalement.

J'arrive à un croisement. Par où continuer ? Je regarde à en face. Puis à droite. Puis à gauche. Une faible lueur émane de ce côté-là. Je prends donc cette direction. Une lumière au bout du tunnel ? Encore un rire fugace qui s'échappe de ma gorge. Est-ce que ça veut dire que je suis mort ? Non. Depuis mon réveil, j'ai l'impression de ressentir chaque cellule de mon corps. Je ne me suis jamais senti aussi vivant. Et c'est douloureux.

J'avance encore et encore sans savoir pendant combien de temps. Finalement, j'entre enfin dans une nouvelle pièce. À l'intérieur, je crois discerner des sortes de fauteuils et des tables, mais rien n'est moins sûr. Et au fond, en face de moi, un immense écran s'étend. La source de la faible lueur. Cette dernière provient de petits points lumineux qui s'affichent dessus. Pourquoi afficher des points lumineux sur un écran ? Lorsque je m'approche, les points bougent légèrement, comme s'ils réagissaient à ma présence. Une fois à portée, je pose mes mains sur l'écran. Soudain, le choc ! Ce qui se trouve devant moi n'est pas un écran, mais une fenêtre. Et les points lumineux sont en fait des étoiles au loin.

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