Beauté intemporelle

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- Ma Reine, vous pensez que le Dieu du Soleil fait exprès de nous cramer la couenne en été ?

Béëlyss soupira lourdement.

- Vous me fatiguez avec vos questions débiles, Sir Tyrlair.
- Qu'est-ce que j'ai encore dit ? demanda ce dernier troublé.
- Je vous rappelle qu'il n'existe qu'un seul Dieu, le Tout-Puissant, l'Unique, et que le Soleil n'est qu'un astre céleste sans volonté.

Le chevalier se tut un instant, le temps d'assimiler l'information.

- D'accord, reprit-il. Mais Dieu contrôle tout, donc contrôle le Soleil, donc peut-être qu'Il fait en sorte qu'il brille plus.
- Certes, mais croyez-vous vraiment que l'Éternel est vraiment intéressé par la température de vos miches ?
- Je ne sais pas. Peut-être que...
- C'était rhétorique, Sir Tyrlair, le coupa Béëlyss.
- Ma Reine, vous savez bien que je pige que dalle quand vous utilisez des mots compliqués.
- « Rhé-to-rique », ça veut dire que vous ne devez pas répondre à la question.
- Mais, pourquoi poser une question si je ne dois pas répondre ?
- Oh fermez-la ! En plus nous y voilà, c'est pas trop tôt.

Devant eux, dans la clairière, se dessinait un petit lac entouré de rochers d'un blanc éclatant, comme si quelqu'un les avait placés là pour délimiter l'étendue d'eau. Sa surface était étincelante, parsemée de milliers d'éclats brillants, reflets de l'astre solaire. Le Miroir du Destin. Mais quelque chose clochait...

- Ma Reine, c'est normal ce machin rose qui flotte au milieu du lac ?
- A votre avis, Sir Tyrlair ?
- Eh bien, je dirais que...
- C'était encore rhétorique ! s'emporta Béëllys. Évidemment que cette chose n'a rien à faire là.
- C'est compliqué la rhétorique.
- Sur ce point, je ne peux pas vous donner tort.

Ils s'approchèrent avec précaution du lac et observèrent le machin rose. L'étrange objet avait l'air inanimé, et assez léger pour ne pas couler. Et sur le sommet, on aurait dit... des yeux ?

- C'est peut-être un message de Dieu, pensa tout haut le chevalier.
- C'est possible, en effet. Je ne comprends pas, mais il est vrai que le Seigneur a toujours été très cryptique.

Tyrlair s'apprêtait à parler, mais fut une nouvelle fois interrompu par sa reine.

- « Cryptique » ça veut dire que c'est compliqué à comprendre.
- C'est ce mot qui est cryptique.
- Mais pas du tout, c'est juste vous qui êtes con !

Le chevalier resté perplexe, Béëllys commença à retirer ses vêtements.

- Qu-qu-que faites-vous, m-ma Reine ? bégaya Tyrlair.
- Ça se voit, non ? Je me déshabille pour aller chercher cette chose et essayer de comprendre ce que ça signifie.
- Mais vous... je...

Ne prêtant pas attention aux remarques du chevalier, Béëlyss se retrouva presque nue, lorsqu'une lumière vive jaillit de derrière les arbres. Une silhouette féminine apparut alors, prenant la parole :

- Mamma mia ! Elle est bien gaulée la demoiselle !

La reine sursauta et vint se cacher derrière le chevalier.

- Qui êtes-vous ? demanda-t-elle.

L'inconnue s'approcha d'un pas franc. Béëlyss et Tyrlair purent ainsi l'observer plus attentivement. Elle portait d'étranges vêtements très colorés, très proches de son corps voluptueux, et très courts. Jamais une femme de bonne vertu n'aurait laissé entrevoir autant de peau. Elle avait également des cheveux rasés d'un rouge flamboyant, et sur l'ensemble du visage, des dessins à l'encre et de petits bijoux en métal.

- Je suis... commença l'étrange femme.
- Une déesse, compléta le chevalier en s'agenouillant. Votre beauté éblouissante ne fait aucun doute là-dessus.

L'inconnue fut surprise de cette affirmation, puis elle eut un large sourire et lui adressa un clin d'œil.

- Je t'aime bien, toi ! En plus t'es un bg aux cheveux longs, j'adore.

Tyrlair s'empourpra. Lui qui n'avait jamais eu beaucoup de chance auprès des dames venait d'être complimenté par une déesse, même s'il ignorait ce qu'était un « bégé ». Béëlyss, agacée, se racla la gorge.

- Elle ne peut pas être une déesse, Tyrlair, puisqu'il n'existe qu'un seul Dieu. Tu n'écoutes donc pas quand je te parle.
- Et qu'est-ce qui te fait croire que je ne suis pas Dieu ? répliqua la mystérieuse femme avec un regard espiègle.
- Eh bien vous êtes...
- Une femme ? Écoute chérie, t'es bien mignonne mais pas très open-minded. Ariana Grande chantait God is a woman, alors je vois pas pourquoi je pourrais pas être Dieu, wesh.

La reine ne sut que répondre. Elle n'avait pas compris un traître mot à ce que venait de dire cette femme.

- Bon, ajouta cette dernière, c'est pas tout ça mais je dois y aller moi. Je récupère ma bouée flamant rose et je m'arrache.

Sur ces mots, elle se dirigea vers le lac, marcha sur l'eau comme si c'était toujours de la terre ferme, et prit sous son bras le machin rose. Elle revint sur les berges et salua Tyrlair et Béëlyss d'un signe de la main.

- Allez, je me tire ! Ciao les poulets !

Alors qu'elle repartait vers la source de la lumière intense d'où elle était venue, le chevalier l'arrêta.

- Attendez ! Emmenez-moi avec vous !

L'inconnue se retourna, vint se camper devant Tyrlair, et l'attrapa par le menton.

- Écoute bg, je t'aime bien, mais ça va pas être possible. J'ai déjà complètement fucked up le continuum temporel en vous rencontrant, donc si je t'emmène avec moi, ça va être le bordel. En plus, la Grande Prêtresse a interdit aux hommes d'avoir des cheveux longs chez moi, parce que, je cite, « c'est contre natureuh. » Déso bg.

Elle lui mit une petite claque amicale et reprit sa route. Le chevalier hésita un instant. Il regarda la reine, puis la femme qui s'éloignait, puis de nouveau la reine. Une lueur de détermination s'était allumée dans son regard.

- Me pardonnerez-vous, ma Reine ?
- Qu'est-ce que vous...
- C'était rhétorique, la coupa-t-il.

Il dégaina son épée, se trancha les cheveux d'un coup net et précis, et courut à la suite de l'inconnue. Avant que celle-ci n'eût pu réagir, il la propulsa avec lui dans la lumière, et ils disparurent.

Béëlyss se retrouva seule et toujours à demi-nue. Elle ouvrit la bouche, puis la referma. Que venait-il de se passer ? Et surtout, comment allait-elle pouvoir expliquer cela une fois de retour au château ? Elle resta ainsi plusieurs heures à essayer de comprendre la scène qui s'était déroulée devant ses yeux. Sans succès.

Alors qu'elle était sur le point de repartir, elle prit conscience d'une terrible vérité. C'était Sir Tyrlair qui avait la carte sur lui...

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