Aere Perennius

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Sa déclaration m'a secouée. Elle est logique, au fond, mais il n'empêche que ça me fait l'effet d'une douche glacée et que j'ai l'impression que mes entrailles se congèlent.

- Ok, je tente d'avaler ma salive. D'autres comme toi, immortels, tu veux dire.

Il hoche la tête en scrutant mon visage.

- Ça va ? demande-t-il, se baissant pour mettre son visage à mon niveau.

- Oui... oui enfin, je digère. Ca fait beaucoup d'informations, là...

- Je sais, mais tu vas voir, tu vas intégrer tout ça très vite, au fond ça ne change pas grand-chose.

J'éclate de rire. Je suis littéralement prise d'un fou-rire et j'ignore s'il est sincère ou hystérique. J'essaie de répondre entre deux éclats...

- Pas... grand... chose ?

J'essaie de respirer.

- Pas grand-chose ? je continue. Non, ben non, tu m'annonces qu'une bande d'immortels se promène sur la planète à la recherche d'une tablette dont tu ne peux rien me dire sauf qu'ils sont prêts à me tuer pour l'avoir. Alors non, ça ne change pas grand-chose...

- Ce n'est pas ce que je veux dire : je veux juste dire que la donnée qui concerne notre... disons.. particularité... n'est qu'une donnée dans l'histoire. Faut pas faire de focus là-dessus, tu vois ?

J'expire bruyamment par le nez, me pinçant entre les deux yeux, histoire de me concentrer.

Puis je relève la tête.

- Qu'est-ce que tu attends de moi au juste, Ellie ?

- Je... eh bien... il s'assied de nouveau sur le lit.

- Oh pitié, ne me fais pas croire qu'en plus de 5000 ans d'existence, si je t'ai bien compris, tu n'as pas appris à formuler une idée claire ?

- Nina, tout ça, c'est très, très compliqué et j'essaie de te le dire depuis le début, il y a des choses que je n'ai pas le droit de te dire sans que tu les découvres par toi-même.

- Pourquoi ? Je vais me transformer en citrouille si tu me les dis ?

Il esquisse un sourire.

- Non, non, bien entendu que non. Mais je sais d'expérience que les paroles dites sont moins comprises que les expériences vécues. Et crois-moi : si je te balance tout comme ça d'un coup, ça ne fera qu'empirer les choses.

- Donc tu as déjà dit ça à d'autres personnes ?

- Plus ou moins oui, on peut dire ça.

- Et ça c'est mal passé ?

- Oui, si je disais les choses trop tôt oui.

- Et où sont ces personnes ?

- Mortes, Nina. Elles sont mortes.

Je réalise alors que toutes les personnes au courant de sa nature n'existent plus, ou sont peut-être mortes à cause de sa nature. Quoiqu'il en soit, je le vois là, penaud et il semble tellement triste et finalement tellement seul.

- Est-ce que je risque quelque chose ? je demande.

- Non, pas vraiment. Je ne peux pas dire que des événements comme hier soir ne peuvent pas se reproduire mais je peux te protéger maintenant que tu es consciente que la situation est... disons... compliquée.

Je hoche la tête. Je sens qu'il est sincère et désespéré. Je m'approche de lui et pose ma main sur sa joue qu'il appuie doucement dans ma paume en fermant les yeux. Il prend alors ma main dans la sienne et tourne la tête, déposant un baiser sur mes doigts.

Les cendres de NînlìnOù les histoires vivent. Découvrez maintenant