La vie, ce long fleuve pas tranquille

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Une fois dans mon lit, impossible de m'endormir alors que, pour une fois, Lisa ne fait pas de bruit. Ces petites insomnies m'arrivent mais, le plus souvent, elles sont dues à mon stress de faire un cauchemar ou un rêve trop étrange.

Cette fois pourtant, ce n'est pas ça qui me préoccupe...

Je pense à ce visage incroyable et pourtant si familier. Je me demande ce que ça fait de le toucher. Puis je lève les yeux au ciel dans le noir tant je me trouve mièvre. Non mais sérieusement, faut que j'arrête de niaiser comme ça, c'est ridicule.

Je le revois encore face à moi, immobile, dans son bureau et dans la voiture. Son regard intrigué, comme s'il observait un petit insecte qu'il n'aurait jamais vu.

Argh, il faut vraiment que je dorme, ce n'est pas possible. Je me lève pour aller me chercher un verre d'eau et croise la photo de ma sœur, sur le frigidaire. Lou aurait adoré débattre avec moi sur le sens de la moindre phrase qu'il aurait prononcée, sur les silences et même la taille de mon chemisier.

Je n'ai pas toujours été la personne sérieuse que je suis devenue. Lou était ma petite étincelle, la personne qui savait me dérider depuis toute petite. D'aussi loin que je me souvienne, elle savait toujours comment me faire lâcher mes livres pour partir en quête d'aventures dans le jardin, qu'il s'agisse de chasse aux papillons ou de chasse aux garçons plus tard.

Durant nos études, même si elle était un peu plus jeune, son débarquement dans mon école avait signifié le début des réjouissances : elle me traînait de fête en fête et savait rendre tout drôle. On se retrouvait souvent mortes de rire toutes les deux rien qu'en se regardant. Alors l'histoire de monsieur Abramovicz, elle aurait adoré.

Mais quoiqu'il en soit, Lou n'est plus là pour refaire le monde avec moi. Je commence à me faire à l'idée même si ça reste difficile. Lisa s'est pointée dans ma vie pile au bon moment, quand j'allais tirer un trait sur toute vie sociale. Elle a su me dérider un peu, de temps en temps, mais ça reste différent, comme si elle ne pouvait jamais vraiment franchir le mur épais que le décès de ma sœur semble avoir érigé.

Je poserais bien des questions à Lisa mais étrangement, je n'ai pas envie de m'étendre sur le sujet auprès d'elle. On parle finalement peu de choses très intimes.

Alors, je décide de faire ce que Lou aurait fait : je m'installe sur mon lit et, quitte à ne pas dormir, je stalke monsieur Abramovicz sur le web. Parce que, comme disait Lou, « s'il y a quelque chose à découvrir, on peut le trouver sur un téléphone quand on sait où chercher ».

D'abord Google. Ah, le gars a son propre Wikipedia. C'est déjà énorme.

Ellie Abramovicz VII (né en novembre 1977 à Sydney, Australie) est un milliardaire d'origine australienne, héritier de l'empire Abramovicz, CEO de Abramovicz&co, conglomérat spécialisé dans le négoce de matières premières.
Héritier de Ellie Abramovicz VI, il a continué à développer l'empire familial.

On ne lui connait pas de famille directe. Sa fortune est évaluée à plus de 32 milliards de dollars et lui permet de figurer dans la liste Forbes parmi les 100 plus grosses fortunes au monde.

Ellie... c'est joli ça, Ellie. Attends... 1977 ??? Ça lui ferait 45 ans ? Non mais je lui en donne à peine 35 moi...

32 milliards de dollars. Je me demande ce que ça fait de savoir que tu es à l'abri pour un millénaire au moins.

Son wiki est super court en fait.

C'est le moment de filer sur Facebook. Rien. Il n'a pas de compte. Bon, c'est classique quand tu es riche à ce point. Il a même sans doute un faux compte.

Les cendres de NînlìnOù les histoires vivent. Découvrez maintenant