Je ne suis pas certain d'avoir déjà vu mes parents et ceux de Bryan à une même table. Pourtant, ils sont tous les quatre là, sur ma terrasse, à prendre le soleil, un verre de rouge à la main.
La musique en fond, la table dressée, Muesli qui roupille dans l'herbe, je ferme les yeux et tire sur ma clope. Pendant une seconde, je profite juste de ce qu'il y a autour de moi. Mais le calme explose rapidement, alors que Lorian sort de chez moi en hurlant. Torse nu, je le dévisage quand il fait un bond pour sauter de la terrasse et fuir Aly qui lui court après, une bouteille d'eau à la maison. Qu'est-ce qu'il fout à moitié à poil, merde ?
Son rire résonne dans mon jardin, il esquive adroitement un arbuste mais Aly finit par l'attraper. Le plaquage me fait grimacer et Tom me rejoint, calant son coude sur mon épaule. Tout sourire, on ne lâche pas des yeux mes collègues qui se roulent au sol dans des insultes et rires.
- Ils sont intenables.
-Pire que nous, je confirme en hochant la tête. Hip n'était pas avec vous ?
Un haussement d'épaules me répond alors je tourne la tête vers l'intérieur. Le petit nouveau du garage est avachi dans mon canapé, en train de laminer Antho sur la console. Ils ont le même âge, mais c'est bien la seule chose qu'ils ont commun. D'ailleurs, c'est assez incroyable qu'ils ne soient pas en train de se foutre sur la gueule, comme la plupart du temps.
En cinq mois qu'il bosse avec nous, Hip a eu le temps de se faire sa petite place dans notre groupe. Ce type aux allures de skateur ténébreux a d'abord fait mauvaises impressions auprès de Steel. Je n'ai pas forcément aimé son attitude désinvolte pendant l'entretien, jusqu'à ce qu'il me balance droit dans les yeux qu'il n'était pas un petit branleur et qu'il voulait sa chance. Pendant un instant, je me suis vu en lui, au lycée, quand personne ne croyait en mes potes et moi. Du coup, deux semaines plus tard, il entamait son mois d'essai. Trente jours après, il signait un contrat. Depuis, il est resté.
- Je leur ai dit que si je les entendais se disputer, ils pouvaient dire adieu à leur bière, me lance alors Tom quand il remarque que je fronce les sourcils. J'essaye d'asseoir mon autorité.
- Ca a l'air de fonctionner.
- Tu parles, ils ont ri ensemble avant de se poser là, grogne Tom et je me marre. T'es pas censé me soutenir ?
- Rêve, je souffle en m'écartant. C'est mon anniversaire, pas le tien.
- Petit con !
Je lève un pouce en lui tournant le dos. Mon sourire s'effrite avant que je me force à le garder, Lo et Aly qui me rejoignent, trempés. Je lève un sourcil et immédiatement, ils tentent de s'expliquer mais c'est juste un véritable bordel. Alors, comme souvent, mes pensées s'écartant du brouhaha pour revenir à l'essentiel : Bryan n'est toujours pas rentré.
Huit mois qu'il est parti. Le trou dans mon coeur ne saigne plus autant, le manque continue de me ronger doucement. Sauf que j'ai appris à vivre avec, j'ai compris que le harceler de messages comme il y a deux mois ne servirait à rien. Je prends mon mal en patience, sa promesse qui continue de me maintenir à flot. J'espère seulement qu'il compte la tenir, qu'il ne m'a pas déjà remplacé.
Putain, je dis que de la merde. Il me l'a dit : il m'aime. C'était peut-être il y a deux mois, quand il a fini par craquer et me renvoyer ces trois petits mots, mais ça fait toujours chier. J'ai besoin de le voir, de le toucher, de respirer son odeur. J'ai envie d'entendre sa voix, son rire, de croiser son regard qui me transporte toujours loin de la réalité. Je pourrais mourir pour un baiser tellement il me manque.
- Parle à mon cul, hein.
Je secoue la tête, plongeant dans le regard amusé de Lorian. Une main dans sa tignasse, il étire son sourire mesquin et cogne son poing sur ma poitrine.

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Forgiveness
General FictionÀ 25 ans, Matt et Bryan ont pris des voies différentes. L'un vit seul mais gagne bien sa vie. Quant à l'autre, il a une fille, une femme et travaille. Leur vie respective les éloigne mais leur amitié est trop forte pour qu'ils s'abandonnent. Jusqu'à...