Forgiveness

Partie 20

Bryan

Tout tourne dans ma tête. Son baiser, ses mains, sa chaleur, ses mots, son regard. L'amour qu'il me porte. L'amour que je n'arrive pas à décrypter. Sa voix, ses paroles. Ces quelques lettres qu'il a mélangé pour parler, pour me dire à quel point il m'aime. Mais avec quel amour ? Celui d'un frère pour un frère ? D'un ami pour un ami ? Ou d'un amour éternel à celui pour qui on donnerait chaque parcelle de nous, de notre temps ?

Mon front cogne la porte d'entrée alors que je soupire. J'entends le rire de Claire dans l'appartement : Emilie a déjà dû rentrer. Je n'ai aucune envie de l'affronter, de lui faire face. De devoir l'embrasser, lui sourire, lui affirmer que je l'aime toujours. 

Merde. C'est devenu un putain de jeu malsain entre nous. Tout ça parce qu'elle maintient que pour Claire, je n'ai pas le droit de bousiller notre couple, je n'ai pas le droit d'effiler cette image douce et rassurante qu'elle a de l'amour. Mais si seulement Emilie pouvait réaliser à quel point c'est moche d'aimer, de se forcer à l'aimer elle. C'est si laid de devoir être un homme que je n'aime pas.

Il faut du temps pour réaliser les erreurs que nous pouvons faire. Parfois, les gens mettent une semaine, un mois, un an, peut-être même cinq voire dix. Moi, il m'a suffit d'un baiser. A peine quelques secondes. Mais Matt a toujours su comment faire avec moi pour que je comprenne. 

La main sur la poignée, j'ouvre la porte et souris à Claire avant de l'attraper pour la serrer contre moi. C'est une véritable petite princesse et elle ne mérite pas cette vie, cette situation minable. Elle ne dit rien mais je suis conscient qu'elle nous entend hurler, qu'elle nous entend crier à s'en arracher les cordes vocales. 

- Regarde ce que maman m'a acheté !

Je plisse les yeux et la repose sur le carrelage. Sa petite main attrape mon doigt et me force à la suivre dans sa chambre. J'écarquille les yeux lorsque je vois l'immense château Barbie, monté et décoré, et la multitude d'accessoires au sol. Ca coûte une blinde. Moi qui vient de hurler sur Matt qu'on manque de thunes... 

Emilie se cale contre la porte, bras croisés sur son torse et petit sourire de garce sur le visage. Elle est fière de son coup, d'avoir réussi à mettre Claire dans sa poche. Evidemment, bombarder une enfant de cadeaux, ça ne peut être qu'une bonne chose. Mais je n'aime pas du tout qu'elle se serve d'elle ainsi, pour me rappeler à quel point sa fille l'aime et ne voudra pas se séparer d'elle au moindre soucis. Je serre les dents avant d'expirer pour sourire à ma petite. Ma main glisse dans ses cheveux quand elle s'agenouille pour attraper la pauvre Barbie qui est secouée dans tous les sens. Elle nous a déjà oublié et elle reprend son jeu.

Je me tourne alors vers Emilie et la fusille du regard. Je n'ai pas envie de l'invectiver devant Claire, elle ne doit plus assister à tous ces hurlements. Elle ne devrait pas avoir à vivre ça.

- Faut qu'on parle, je siffle en l'attrapant par le bras, la forçant à me suivre dans le salon.

Je n'ai pas besoin de dire un mot qu'Emilie a déjà un poing contre mon torse et ne se prive pas pour me cracher au visage à quel point son achat a rendu si heureuse notre petite fille. Sauf que je l'arrête bien vite, venant attraper ses poignets fermement. 

- Tu vas sagement m'écouter maintenant, je la coupe froidement et ses yeux se plissent. Je ne veux plus que tu achètes Claire, ok ? C'est une enfant et elle n'a pas à subir ça. Surtout qu'on en n'a pas les moyens et...

- Matt m'a menacé ce matin. Il a voulu me tabasser.

Mes mots meurent immédiatement alors qu'un coin de ses lèvres se soulèvent. Son rictus machiavélique me fait frissonner violemment. Je la repousse et secoue la tête, refusant d'y croire. Jamais il n'oserait lever la main sur une femme. Il a des tords, mais pas celui là. Pas qu'il soit dans l'idée où on ne frappe pas une femme -certaines savent bien mieux se défendre que certains mecs- mais simplement que se battre avec n'importe qui n'est pas dans sa nature. Je suis celui qui cogne. Pas lui.