Chapitre 14

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Je prends une profonde inspiration avant de composer le numéro de maître Sanchez, mon avocate. J'ai besoin de savoir où en est le processus. Après quelques sonneries, sa voix enjouée se fait entendre.

— Bonjour Madame Dubois ou devrais-je dire madame Sullivan ! Comment allez-vous ?

Je grimace à l'appellation de mon nouveau nom. Une boule se forme au fond de ma gorge et je finis par répondre.

— Bonjour, maître. J'aimerais savoir si vous avez reçu le certificat de mariage, dis-je, essayant de dissimuler mon impatience.

— Oui, tout est en ordre. J'ai bien reçu tous les documents nécessaires, répond-elle d'un ton rassurant.

— Vous pensez que cela va prendre combien de temps ? répliqué-je, incapable de cacher mon exaspération. Je voudrais retrouver ma vie.

— Vous voulez déjà divorcer ? dit-elle avec un léger rire.

Voyant que je ne réponds pas à la plaisanterie, mon avocate reprend contenance et reprend.

—Eh bien, avant tout, vous devez passer l'entretien avec les agents d'immigration, commence-t-elle d'un ton professionnel. Cela devrait prendre quelques semaines. Ensuite, leur rapport devra me parvenir afin que je puisse soumettre le mien. Je dirais qu'il faut compter environ trois à quatre mois. Et ensuite, il vous faudra attendre au moins un an avant de pouvoir divorcer.

La boule qui se forme dans ma gorge devient de plus en plus grosse. Un an. Les mots résonnent dans ma tête comme une condamnation.

— Pardon ? Un an ! J'aurais mieux fait de rentrer dans mon pays et d'attendre ces foutus six mois, m'exclamé-je, désespérée.

— Madame Sul... Emma, calmez-vous, reprend-elle, sa voix se faisant plus douce. Dites-vous que dans quatre mois, vous et vos enfants serez des citoyens de ce pays.

Je ferme les yeux, essayant de digérer l'information. C'est pour mes enfants, je me répète en boucle. Des larmes s'accumulent sous mes paupières. Si je les ouvrent maintenant elles tomberont et je refuse. Je refoule le tout et conclut la conversation avec mon avocate.

— Oui, merci à vous, maître, dis-je finalement, essayant de masquer mon désarroi.

— Avec plaisir, Emma. Je vous contacte dès que j'ai du nouveau.

Je raccroche, le téléphone toujours dans ma main tremblante. Une vague de désespoir me submerge. Entre l'envie de tout casser autour de moi et celle de pleurer, je ne sais plus quoi faire. Cela fait une semaine que je suis mariée, une semaine sans aucune nouvelle de '' mon mari''. Il travaille beaucoup, d'après Nate, et je me plonge également dans le travail pour tenter de combler ce vide.

Je fais semblant, comme j'ai toujours su le faire. Après tant d'années aux côtés de Greg, j'étais devenue experte dans l'art de dissimuler mes émotions. Mais cette situation avec Jax est différente. Il m'a aidée, il m'a sauvée, et pourtant, je me sens plus seule que jamais.

Les nuits sont les plus dures. Je pleure souvent, en silence, pour ne pas réveiller les enfants. Chaque matin, je me lève, enfilant ce maudit masque de sérénité, pour essayer de masquer mes yeux rouges et gonflés, prêtant à tous l'image d'une femme forte et résolue. Mais à l'intérieur, je suis brisée, rongée par la solitude et l'incertitude. Les enfants sont ma bouée de sauvetage, mon ancre dans cette tempête émotionnelle. Leurs sourires et leur énergie sont les seules choses qui me maintiennent debout.

Le souvenir de Greg revient sans cesse. Tout le monde savait qu'il me trompait, et moi, je jouais les imbéciles qui ne voyaient rien. Au lit, je simulais tellement bien qu'il ne s'en rendait même pas compte. Les faux "je t'aime" que je lui répondais, il ne faisait pas la différence. Quand il est décédé, même mes larmes étaient fausses. Je ne voulais pas que l'on pense que je n'avais pas de cœur. Se sentir soulagée de la perte de son mari n'est pas quelque chose de normal.

Hearts torn ( TERMINÉ )Où les histoires vivent. Découvrez maintenant