Chapitre 23

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Vendredi 16 juillet

— Ça va bien se passer, renchérit Vicky.

— Si ça s'passe mal, j'leur donnerai une raison de faire... six mois de plus dans leur trou.

— Leï...

Une main sur la clé, près à faire démarrer le moteur, Vicky attendait une réaction, mais Leï se contentait d'observer l'autre côté de la vitre.

— J'ai été un de ces gosses...

— Vicky...

— Non. Je crois que c'est important de le rappeler.

Finalement, Leï se tourna, l'œil vif, la répartie au bord des lèvres.

— Et tu crois pas que c'est important de... rappeler que toi t'as jamais rapé la... gueule d'un de tes éducs ?

— Ce n'est arrivé qu'une fois et je t'ai dit que ce n'était pas contre moi à la base.

— C'est pareil.

La bouche dissimulée dans la paume de sa main, preuve que le débat prenait fin, Leï se cala dans le fond du dossier.

— En fait, tu as peur d'eux ?

Les sourcils froncés lui répondirent. Leï se retourna lentement, le défiant de répéter.

— C'est simple, tu as peur d'eux. Parce qu'ils sont capables de violence, mais surtout ils en sont au même stade que celui où tu en étais au lycée. À ceci près que tu n'étais pas physiquement violent. Juste verbalement.

— Eh, stop ton charabia... maraboutesque là, j'ai... rien à voir avec ces marmots. J'étais p'tet con... mais pas assez pour finir en taule, moi.

Il n'avait pas sitôt fini sa phrase que sa signification le percuta en pleine poitrine.

— Attends, nan. C'est pas c'que... je voulais dire...

— Il n'y a pas de soucis. Tu as le droit d'avoir cette opinion. Il me semble que j'avais la même avant d'être enfermé. C'est... mentalement plus simple de se dire que les gens qui finissent enfermés sont juste idiots ou mauvais. Ça donne une meilleure raison de ne pas les traiter comme des humains.

Leï ferma les yeux. Il ne voulait pas se disputer. Mais il lui paraissait évident que tous deux ne s'entendraient jamais sur le sujet.

— Sans vouloir t'offenser, tu peux pas non plus... penser que ce sont tous des enfants de chœur et... que chacun mérite une seconde chance... Bordel. Y'a des conneries plus graves que d'autres.

La main de Vicky glissa de la clé jusque sa cuisse. Il prit quelques secondes pour peser ses mots, maîtriser son ton.

— Sans vouloir t'offenser, Leï, c'est justement parce que j'ai bien conscience que tous ne se valent pas, que je prends la peine de passer du temps avec chacun d'entre eux. Parce que c'est justement ce qui me permet de déterminer qui peut s'en sortir... et qui ne le pourra pas. Et je crois sincèrement qu'il est hypocrite d'utiliser cet argument du « ils ne méritent pas tous une seconde chance » quand on les met tous dans le même panier et qu'au final la conclusion c'est qu'on ne donne sa seconde chance à personne.

Il plissa les lèvres, attendit que le ton monte. Leï ne répondit pas, le regard braqué droit devant lui, à travers le pare-brise.

— J'ai été un gosse paumé et... je crois vraiment avoir mérité ma seconde chance. Gabriel aussi, même si tu ne l'aimes pas. On a mérité cette chance et je pense qu'on s'en est plutôt bien servi. Et si nous on l'a mérité, alors il y en a forcément d'autres qui...

Ultraviolet - (L&V) T.3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant