Chapitre 7

251 43 0
                                        

La semaine suivante, Lance ne pointa pas le bout de son nez. Nous poursuivîmes notre de travail de groupe en duo, dans une ambiance nettement plus légère. 

Annabelle avait recueilli de nouvelles informations, rassemblé plusieurs références et nous réfléchissions à une problématique intéressante. « Comment le contexte historique a-t-il stimulé la production de romans ? ». En voilà une question intéressante.

— Je pense qu'il faudrait en lire certains, commenta Annabelle.

— J'aurais pensé que c'était déjà fait, rétorquai-je avec un sourire en coin.

— En fait, je cherche une bonne excuse pour les relire.

Nous nous mîmes à rire. Annabelle prit un stylo rose et nota la liste des ouvrages que nous devrions lire. Elle me laissa le soin d'en choisir deux et avisa le reste ensuite.

— Il faudrait peut-être en garder un ou deux pour Lance. Il ne va pas esquiver ce cours tout le semestre, si ?

Elle me jeta une œillade hésitante. Ses jolis yeux en amande donnaient l'impression d'être vaguement effrayés. Munie de mon sourire le plus rassurant, je haussai les épaules. 

— Je n'en sais rien. Mais, ce serait vraiment idiot. 

Elle ne répondit pas. Annabelle n'était pas au fait de notre conflit, pas de sa source en tout cas. Je n'avais pas eu envie d'en discuter plus amplement avec elle. Si ça n'avait rien à voir avec la relation que j'entretenais avec elle, c'était en revanche parfaitement lié à la relation qu'il y avait entre eux. En dépit de nos différends, nous devions produire un projet d'ici la fin du semestre. En apprenant la vérité, j'avais peur que notre groupe déjà fragilisé n'implose pour de bon. Pour l'heure, il valait mieux taire les raisons de notre dispute. 

Cela étant dit, Annabelle n'était pas dupe. Elle n'en disait rien, mais ses grands yeux sombres me communiquaient ses questionnements.

— J'ai hâte de relire Orgueil et Préjugés, lui dis-je en quittant la salle de cours. La dernière fois que je l'ai lu, je n'étais même pas majeure !

— C'est aussi un de mes favoris. J'aime beaucoup Bingley, ajouta-t-elle l'air rêveur.

— C'est vrai qu'il est charmant.

— J'aime sa douceur. Sa gentillesse. Ça change un peu, non ?

— Sûrement.

Je n'avais pas envie de la contredire. À cet instant, elle dégageait une sorte de vulnérabilité, une impression de délicate fragilité. J'eus l'impression d'apercevoir une cicatrice encore rougeoyante sous son pelage blanc. 

— Viktor !

Le jeune homme s'avançait vers nous, une expression contente sur le visage. Je le saluai avec un grand sourire et lui présentai Annabelle.

— Nous nous sommes déjà croisés, fit-il remarquer.

— C'est vrai, confirma-t-elle l'air timide.

Ils s'observèrent sans un mot, un peu gênés, un peu curieux. L'image de deux animaux issus de différents habitats, pas supposés se rencontrer, me frappa instantanément. Tandis que l'une semblait un peu sauvage, presque craintive, l'autre était nettement plus curieux et impatient. 

Je secouai vivement la tête. Drôles de pensées.

Un peu à reculons, Annabelle nous accompagna jusqu'à la cafétéria. Viktor prit son habituel sandwich au poulet tandis que, pour cette fois, je me rangeai du côté de mon amie et optai pour une salade. 

Louve [En pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant