Chapitre 29

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Un mur.

Nous nous trouvions face à un mur !

Le sentier que nous suivions depuis le début de cette infernale quête de rédemption aboutissait sur une immense paroi de pierre qui menait à un plateau étroit, une vingtaine de mètre plus haut. Le cirque se trouvait après tout cela. J'en étais certaine. Je le sentais, du plus profond de mes tripes, de toutes les fibres de mon corps. Ma salvation n'était pas loin.

Mais il fallait encore franchir cet obstacle.

Bordel !

Alors que je fulminai, tournant en rond comme un lion en cage, maîtrisant avec peine la frustration et la rage qui enflaient en moi, brûlant mes yeux et érodant ma patience, Dante esquissa une grimace disgracieuse, passant une main nerveuse contre sa nuque.

« Nous n'avons pas le choix, Bella. Il faut monter.

Exaspérée, je levai les yeux au ciel. Oublié l'apaisement qui s'était saisi de moi quelques heures plus tôt, quand j'étais dans ces bras et qu'enfin, je déposai sur nos plaies respectives l'onguent apaisant du pardon.

Nous avions repris la route, nous marchions depuis des heures et voilà qu'un nouvel obstacle se dressait entre nous et notre salvation. Je me sentais bouillir de l'intérieur. Mes émotions se mélangeaient, le sentiment de panique se faisait de plus en plus pressant et ce décompte infernal qui résonnaient dans mon esprit depuis le début de tout ceci se précipitait, approchant de son terme. Je ne tiendrais plus longtemps. Au fond de moi, tapie, le Mal attendait que je tombe entre ses griffes.

Je ne pouvais plus. Il fallait que tout cela s'arrête, pitié...

Sentant le regard de nacre du poète peser lourd sur moi, je cessai mes mouvements, le toisant, intriguée :

Che ?

Il désigna du menton le sommet de la falaise.

— Vas-y. Envole-toi. Tu y seras plus vite. Je te rejoindrai après.

Quoi ?

À l'entente de ces mots, je me figeai une micro seconde, comprenant ce qu'il voulait dire, avant de me ressaisir. Il en était hors de question. Je refusais de m'y résoudre. Et qu'importe que mes deux ailes ne me servent à rien. Je secouai la tête, lui donnant une petite tape affectueuse sur l'épaule même si le cœur n'y était pas vraiment.

— Tu crois vraiment que je vais t'abandonner au pied de cette falaise ? Rappelle-toi, nous avons dit que nous resterons ensemble, quoiqu'il arrive.

Mon enthousiasme soudain ne trompait personne. Mais je connaissais l'effroi qui se saisissait de lui en cet instant. Je connaissais son vertige... Sur un chemin comme celui que nous avons emprunté pour arriver jusqu'ici, il pouvait lutter contre, se raccrocher à la sécurité d'un sol stable. Mais là... Il n'y aurait aucune stabilité, aucun repère. Il n'y aurait qu'un minuscule creux dans la pierre et le vide.

J'avais confiance en lui. Toutefois je ne pouvais pas le laisser seul face à ce mur vertigineux.

D'un ton enjoué pour tromper son angoisse qu'il ne parvenait plus à me dissimuler et ma propre lassitude face à cette montée infernale qui n'en finissait jamais, je lui passai devant, crânant faussement :

— Je suis plus habile que toi, je passe en première.

— Les dames d'abord... me répondit son ricanement mi-sarcastique, mi-fébrile.

Je scrutai un instant le flanc de la montagne à la recherche de la voie qui me paraissait être la meilleure. Il n'y aurait pas de demi-tour possible. Un instant, je fermai les yeux, inspirant profondément.

Mission "Ulysse" (Regana - tome 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant