Chapitre 32 (Partie 2) - Indianapolis - Indiana

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L'impression d'avoir embarqué –sans mon consentement- à bord d'un train lancé à pleine vitesse se renforce. Impuissante, je me laisse porter par le roulement continu de révélations qui s'enchaînent si rapidement, qu'elles me donnent l'envie irrépressible de vomir. Lorsque je comprends qu'au bout des rails, il n'y a plus rien, il est trop tard. Je tombe, tête la première - le garde-corps sur lequel j'étais appuyée cédant avec une facilité déconcertante –, quittant la sécurité mensongère de ce chemin de fer.

Et je ne peux faire autrement que subir cet impact, si puissant, qui me coupe le souffle.

_Tu le savais.

Ma phrase sonne le glas de cette vérité illusoire, créée de toute pièce pour moi. Tel un château de cartes, ma perception des événements s'effondre et je me retrouve, à terre, sans aucune chance de me relever. Depuis le début, tout le monde sait que je suis envoyée par Amor pour les espionner.

Livide, je n'ose rompre mon échange oculaire avec Maxwell.

_M'aurais-tu sous-estimé, Ellea ? Demande-t-il en laissant échapper un ricanement aussi faux que ces derniers mois.

Je ne veux pas paraître plus pathétique que je ne le suis. Pourtant, je ne peux m'empêcher de frissonner face à son ton condescendant.

_Penses-tu, sincèrement, que tu serais là, à l'heure actuelle, si je n'avais pas enquêté sur toi ? Me demande-t-il en se penchant vers moi.

Ses pupilles noires tracent le contour de mon visage, bien loin des caresses nocturnes qu'elles m'ont offertes hier soir.

_ A la seconde où Amor t'as confié cette mission, je savais qui tu étais. Je dois avouer que je ne m'attendais pas à...

Ses yeux se troublent laissant apercevoir, derrière ce masque impassible, l'homme qui m'a tendrement aimé le temps d'une nuit.

_...ça. Conclut-il en me désignant d'un geste vague de la main.

Ma gorge est si comprimée que l'air vient à me manquer. Je sens mon cœur pulser si fort que ma cage thoracique me lance. J'ai mal. Terriblement mal. Mais cette douleur physique n'est rien comparée à celle morale. Encore une fois, mes démons prennent un malin plaisir à jouer avec ma psyché.

Alors, je réalise que ce répit, offert, n'était qu'un leurre servant à me bercer d'illusions pour mieux m'attaquer. J'ai baissé ma garde, aveuglée par ce semblant de bonheur qu'il me promettait. Encore une fois, Maman avait raison.

Car ce n'est pas pour rien que l'on dit tomber amoureux. Parce que pour tomber, il faut un obstacle sur lequel se prendre les pieds. Puis, vient la chute, toujours plus longue qu'elle n'y parait. Avant de finir sa course, dans le meilleur des cas avec un cœur brisé, dans le pire des cas avec les os démembrés.

Et tandis que je soutiens son regard vide d'émotion, je me dis qu'il aurait été préférable que je termine disloquée. Parce qu'une chose est sûre, le trou béant dans ma poitrine sera, désormais, impossible à combler.

_Alors, le Lux...

Les événements affluent dans ma mémoire avec la délicatesse d'un bélier enfonçant une porte. Je suis incapable de poursuivre, coupée par ce flot impromptu qui se déverse, m'alimentant d'une réalité aussi fourbe que véridique.

Idiote.

_Il n'y avait pas de réunion prévue. Réplique Maxwell, faisant écho à mes propres pensés. Tout comme la stripteaseuse n'a pas eu d'overdose et me doit encore moins d'argent.

Ses propos aigres-doux me font l'effet d'une claque. Je réalise n'avoir été qu'une imbécile à leurs yeux et cette prise de conscience m'arrache un grognement d'exaspération.

Los Encantadores [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant