Chapitre 40 (Partie 1) - Camden, New Jersey

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Amor me tient si fermement contre lui, que je peine à respirer. Chaque inspiration me coûte un effort à m'en faire tourner la tête. Mais je ne tente pas de me défiler. Cela ne servirait à rien. Car au moindre mouvement de ma part, il raffermit sa prise, me maintenant prisonnière entre ses bras. Alors, telle une poupée désarticulée, je me laisse choir sur son torse. Lui laissant le loisir d'encercler encore plus mes hanches dans cette étreinte qui se veut autant possessive qu'évocatrice, à en juger par la bosse sur laquelle je suis –inconfortablement- posée.

Assommé par la dose de somnifère versée dans son café, hier soir, il ne s'est pas rendu compte de mon absence. En revanche, il se souvient parfaitement que, depuis mon retour, il ne m'a toujours pas touché. Du moins, pas de la manière dont il rêve tant de le faire. Quand il s'agit de ses besoins personnels, ses idées n'ont jamais été aussi claires.

Heureusement pour moi, il a émergé si tard, ce matin, que le soleil était déjà haut dans le ciel. Couplé avec l'impatience d'El Carnicero –beaucoup trop présent à mon goût dans cet appartement- de rejoindre l'Atelier, cela a suffi pour le convaincre de repousser l'échéance.

Désormais assis autour de la table de la mezzanine, Amor se délecte de son nouveau met préféré –dont l'addiction est équivalente à son désir de me baiser-, qui n'est autre qu'une poudre blanche, aussi fine d'un grain de poussière, mais pour autant, redoutable.

Un grognement de satisfaction s'échappe de sa gorge alors qu'il s'essuie le nez, d'un revers de manche.

_Elle est vraiment bonne.

Son râle de plénitude m'arrache un frisson.

_Pas autant que toi, mi querida, ne soit pas jalouse. Murmure-t-il, en venant frotter ses lèvres rêches dans mon cou. Je rêve de la parsemer sur ta poitrine et de la lécher jusqu'au dernier gramme.

Il ne le sait pas encore, mais cette sombre envie, il n'aura jamais la possibilité de l'assouvir. Ni celle-ci, ni les dizaines d'autres qui galopent librement dans son cerveau et que je vois danser dans l'arrière-plan de son regard.

Car, aujourd'hui, Amor va mourir.

En quittant Maxwell, ce matin, je savais ce qu'il me restait à faire. Et tandis qu'il me serrait contre lui, j'ai réalisé que ma décision était déjà prise depuis longtemps. Alors, lorsque j'ai murmuré doucement un « Je suis désolée » à son oreille, avant d'embrasser, tendrement son front, je n'étais plus réellement sûre d'être si désolée que ça.

Amor continue de déblatérer au sujet de son fantasme, mais complètement distraite, sa voix s'évapore dans l'air sans même m'atteindre. L'impatience me rend fébrile. Je sens ses picotements familiers me chatouiller la nuque et traverser mon corps tel un sempiternel arc électrique. Par réflexe, mes doigts se crispent sur le rebord en bois dans une vaine tentative de contenir la fièvre qui monte en moi.

_Qu'est-ce qu'il fabrique ? Peste Amor.

Son changement d'intonation perce la bulle dans laquelle j'étais plongée. Contre mon dos, son buste se raidit et ses ongles s'enfoncent dans ma chair, malgré la barrière de tissu de mon haut. Sa soudaine mauvaise humeur nous enveloppe, saturant la pièce de son énergie négative. Mal à l'aise et toujours soumise à sa poigne, qui me comprime l'estomac, je me tortille sur ses cuisses.

Mon excitation se mue en nervosité que je peine à cacher. Esteban nous a convoqués tous les deux à l'Atelier - insistant plus que nécessaire sur ce dernier point – et ne pas savoir ce qu'il en retourne à tendance à exacerber mon irritabilité. Je ne l'ai pas revu depuis notre retour à Camden et bien que je n'aie aucune raison de penser à lui - ma rancune étant tenace -, je me surprends à m'inquiéter pour son sujet.

Los Encantadores [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant