Chapitre 12 - Camden, New Jersey

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_Je ne t'ai pas donné la localisation de leur entrepôt pour que tu viennes exposer le corps d'Harry ! Je m'écrie furibonde, en pénétrant sur la mezzanine de l'Atelier.

La fureur file dans mes veines, alimentant mon cerveau d'idées meurtrières. Je n'ai pas réfléchi, lorsque Logan m'a déposé à Philadelphie, j'ai pris le premier bus pour Camden dans l'optique d'exposer à Amor le fond de ma pensée. Ce que je regrette instantanément, en apercevant sa silhouette, recourbée sur la table, de la poudre blanche étalée sur la surface. Je ne pouvais pas tomber au plus mauvais moment.

Amor se tourne vers moi, les yeux injectés de sang. Le pas lourd, il se rapproche, emprisonnant ma gorge de sa main. Ses doigts rêches, s'enroulent autour de ma peau fine, tel un serpent ceinturant sa proie. Ses ongles s'enfoncent dans ma chair alors qu'il m'enserre, me faisant suffoquer.

_Je ne te dois rien. Siffle-t-il, collant son visage près du mien.

Cramponnée à ses bras, je tente de me libérer mais, il est bien trop fort. Plus aucune trace d'humanité ne l'habite. Comme dépossédé, son regard n'exprime que du vide. D'habitude, ses démons prennent possession de lui lorsqu'il participe à ses réjouissances. Sauf, qu'aujourd'hui, je suis la cantatrice qu'il souhaite faire crier. Malheureusement pour lui, je n'ai préparé aucune partition. L'heure de ma mort n'a pas encore sonné.

_Lâche moi. Je bredouille, entre deux respirations.

_Ne lève plus jamais le ton sur moi. Il accentue la pression, et ma vision se trouble. Compris ?

Des milliers d'étoiles explosent ma rétine alors que ses paroles, lointaines résonnent dans mes oreilles. Mon cœur bat furieusement dans ma poitrine au même rythme que mes doigts qui griffent désespérément l'épiderme d'Amor.

_Compris¸ mi querida ?

Ses lèvres râpeuses m'effleurent la joue lorsqu'il se colle contre moi. Je sens le poids de son érection contre ma cuisse et je ne peux réprimer la nausée qui me tord l'estomac. Des larmes s'agglutinent au bord de mes yeux lorsque je revois le corps sanguinolent d'Harry –ou du moins ce qu'il en restait-, déposés devant l'immeuble et l'ironie de la situation me file la frousse. Ma mission a commencé avec lui et visiblement se terminera aussi avec lui.

_Amor, lâche-la.

Amor se fige à l'entente de la voix d'Esteban, qui vient de faire son apparition sur le seuil de la pièce. Doucement, je sens l'air s'infiltrer dans ma gorge alors qu'il dénoue sa poigne. Mes genoux touchent le sol dès qu'il me lâche et j'halète pour insuffler de nouveau la vie dans mes poumons.

_Allume moi une clope.

La flamme vacille lorsque le cousin d'Amor tend un briquet en direction de la bouche de ce dernier. Il ferme les yeux, tirant des bouffées sur son bâton de nicotine. Les vapeurs toxiques semblent l'apaiser et ses muscles se détendent et il réajuste brusquement son pantalon au niveau de son entre-jambe.

_Ça va ?

Esteban me soulève d'une main et m'entraine sur le canapé. J'acquiesce, plus par réflexe que par vérité alors que je sens son regard me détailler longuement. Je tousse, gênée par l'odeur de cigarette qui envahie l'espace.

_ « J'espère que le fait de trainer avec ces gringos¸ ne te monte pas à la tête. » Souffle Amor, adossé à la paroi de verre. Il regarde avec attention ce qu'il se passe en bas. « N'oublie pas que tu es une Encantadores ». Il s'arrache de sa contemplation, venant s'agenouiller devant moi. Sa main gauche vient saisir mon poignet et son pouce caresse mon tendon saillant. « Il serait fort dommage que je t'enlève la vie pour une simple erreur de jugement... »

Los Encantadores [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant