L'Atelier se découpe sur la ligne d'horizon. Son ombre menaçante est projetée sur le sol par la lune qui, ce soir, est haute dans le ciel. Aucun bruit ne vient troubler la quiétude des lieux. Rien ne s'échappe des lourdes portes en acier. Aucun cri. Aucune exclamation. Rien.
Figée devant le bâtiment, je reste un moment à l'observer. L'air froid de la nuit s'engouffre dans ma veste, faisant dresser les poils sur mes avant-bras. En ce début de mois d'avril, les températures sont basses. Les bourgeons des arbres sont aux abonnés absents, de même que les chants des oiseaux. L'hiver refuse de laisser sa place aux printemps. Nous laissant dans l'expectative du renouveau de la nature.
Cela fait un moment que je ne suis plus venue. Pourtant rien n'a changé. L'atmosphère est toujours aussi sombre et chargée d'histoires qui le sont tout autant. J'entends presque les mugissements d'horreur des hommes qu'Amor a torturés.
Un frisson remonte le long de ma colonne vertébrale, me faisant relever le regard par-delà l'entrepôt. La dernière fois, Esteban était encore en vie. Cette même fois où d'un accord tacite, nous étions devenus amis. La fois d'après, je lui tirai dessus, le tuant. Je ferme les yeux, ravalant ces souvenirs encore douloureux. Je ne suis pas venue pour pleurer sa mort. Ni, même pour supplier Amor de m'épargner.
Non.
Ce soir, je suis venue pour en terminer une bonne fois pour toute avec ces gringos.
Je ravale la boule d'angoisse, qui prend un malin plaisir à m'obstruer la gorge et avance, déterminée, jusqu'à la porte. L'odeur caractéristique des lieux, se faufile dans mes narines, m'arrachant un haut le cœur. Mes pas résonnent entre les hauts murs et quelques têtes se tournent vers moi. Aucun d'entre eux ne tente de masquer l'éclair de surprise qui traverse leurs visages. Ils me dévisagent, ouvertement et, un murmure de désapprobation se propage sur mon passage.
Je les ignore, et accours presque jusqu'aux escaliers. Ma main agrippe la rambarde. Chaque pas augmente mon stress. Je n'ai pas vu Amor depuis qu'il m'a étranglé. Bien que les stigmates physiques se soient effacés, ceux moraux sont encore ancrés et, je nourris une rage si profonde envers lui, qu'il me faut un effort surhumain pour me calmer.
Lorsque j'arrive devant la porte de la mezzanine, mon cœur bat tellement fort, que je ne m'entends plus penser. Je compte jusqu'à dix, puis ouvre le battant brusquement pour ne me laisser aucune chance de faire demi-tour.
Le spectacle qui se joue sous mes yeux, me foudroie sur place. Je reste, pétrifiée sur le seuil alors que je découvre Luciana, confortablement installée sur les genoux d'Amor. Ce dernier a glissé une de ses mains sous son tee-shirt et caresse son mamelon. J'aperçois ses doigts pincer sa poitrine et un sourire de béatitude étire les lèvres de la brune. Elle finit par ouvrir un œil et sa grimace d'extase se transforme en grimace orgueilleuse.
_Oh ! S'exclame-t-elle. Une revenante.
Un rire narquois vient ponctuer sa phrase alors qu'elle se cambre toujours plus contre Amor. Le chef des Encantadores se fige en m'apercevant et, tel en enfant pris en flagrant délit, retire sa main. Une ombre passe sur ses traits.
_Mi querida. Murmure-t-il, comme pour se convaincre.
_Je vois que tu n'as pas perdu de temps.
Je me campe face à eux, croisant les bras dans un geste de défi. Silencieusement, nous nous affrontons. J'ignore les signaux d'urgences qui résonnent en moi, me rappelant que la dernière fois que je lui ai tenu tête, il a tenté de me tuer. Mais, je ne peux pas laisser cette terreur me bâillonner. Je ne dois pas la laisser gagner.
_Dégage.
La voix grave d'Amor s'élève et je chancèle, perdant toute confiance en moi. La mine suffisante de Luciana me nargue ouvertement, heureuse que je me face renvoyer de la sorte. Je recule, blessée mais, aussitôt, il reprend.
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Los Encantadores [Terminé]
RomanceEllea n'a qu'un seul objectif dans sa vie : la vengeance. Infiltrée chez les Encantadores depuis deux ans, elle a enfin obtenu la place qu'elle convoitait, devenant la copine officielle d'Amor, l'un des plus dangereux narcotrafiquants de Camden. Ell...