Chapitre 40 ( Partie 2) - Camden, New Jersey

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La contemplation de mon plus grand fantasme - enfin achevé - est de courte durée. La porte de l'Atelier s'ouvre, libérant une foule compacte mais dangereuse d'individus, pressés d'en finir. Le silence qui s'est abattu sur l'entrepôt, lors de la chute mortelle d'Amor se distille dans l'air, désormais, surchargé de cris et d'insultes.

C'est un véritable chaos qui se déroule sous mes yeux. L'écho des tirs, échangés, résonne entre les murs, s'élevant avec fracas jusqu'à mes oreilles, déjà bourdonnantes de mes propres coups. Des corps s'écroulent –le bruit de leurs chutes étouffé par le vacarme - et du sang s'écoulent des plaies béantes de ces hommes et femmes qui ne cessent de se battre, même à terre.

Les Encantadores luttent et hurlent le nom de celui qui, gît dans une mare rouge, dans une vaine tentative de racheter l'honneur de leur chef. Malheureusement pour eux, leurs assaillants sont sans pitié. Les panthères noires –dictées par ces années de rancœur- et ces gringos - animés par une rage trop puissante à contrer – ne leur accordent aucun répit, tirant et tranchant à tout-va. Autant dire que face à cette vague sanguinaire, les hommes d'Amor ont peu de chances de remporter la victoire.

Lorsque mon regard se porte sur un visage familier, je ne peux empêcher une bouffée de bonheur de gonfler ma poitrine et libérer sa dopamine à travers mon organisme. Cette fois-ci, le sourire qui éclot sur mes lèvres, est tout sauf factice.

Maxwell me dévisage, un court instant, avant de reporter son attention sur son combat. Malgré cet échange bref et la distance qui nous sépare, je devine son soulagement de me voir saine et sauve. Et, je ne peux faire autrement que l'observer tandis qu'il avance, entouré de ses alliés.

Un mouvement parmi eux attire mon intérêt. Esteban, les bras levés, m'enjoint de m'éloigner de là. Et pour cause, j'ai à peine le temps d'amorcer un mouvement de recul, qu'une pluie de balles s'écrase sur les vitres encore intactes de la mezzanine. Enfoirés d'Encantadores.

Furieuse, je me détourne de mon perchoir et regagne la porte que j'ouvre brusquement. Dans l'escalier, je surprends Logan en mauvaise posture. Plaqué contre le mur et, dans un équilibre précaire, il tente de se libérer de la poigne du latino qui menace de lui trancher la gorge. Ses yeux –habituellement clairs- sont aussi sombres qu'une mer déchaînée et portent en eux toutes les promesses mortelles qu'il lui réserve.

Il ne m'a pas encore vu. Si bien, que lorsque j'abats la crosse de mon arme dans la nuque de son agresseur –qui s'effondre à nos pieds - il lui faut un instant pour me reconnaître.

_Ellea ?

Ses pupilles se rétrécissent, reprenant une taille normale et il cligne des paupières, hébété.

_En chair et en os, à ton plus grand dam. Raillé-je, en passant devant lui.

Je profite de son inattention pour lui dérober son pistolet, coincé dans sa ceinture.

_C'est mon arme. S'écrit-il.

_Je n'ai plus de balles. Me justifié-je, devant son air ahuri, en jetant la mienne, désormais inutile. Considère ça comme la taxe pour t'avoir sauvé la vie.

Moqueuse, je dévale les marches, qui tremblent sous chacun de mes pas.

_Evidemment, ça ne pouvait être gratuit. Peste-t-il dans mon dos.

Je ne réponds pas, effaçant la moue narquoise qui s'est installée sur mes traits avant de rejoindre la pièce principale des représailles orchestrées par ces gringos. Mes pieds foulent le sol bétonné, parsemé d'objets, divers, renversés et de corps figés, et je parviens à longer tant bien que mal un des murs, scannant l'étendu à la recherche de mes alliés.

Los Encantadores [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant