Nos cœurs meurtris

08 | Olivia

Je détournai sans attendre les yeux en m'éloignant de là où j'étais, afin qu'il comprenne que je n'avais pas envie qu'il me parle. Il semblait avoir compris ce que je souhaitais, car il ne me suivit pas.

Attendez.

Ce n'était quand même pas mon livre qu'il tenait entre ses mains, n'est-ce pas ?

De ce que je me souvenais, il ne lisait pas beaucoup, et lorsqu'il le faisait, c'étaient très souvent des thrillers. Or, tous mes livres sont des romances.

Avant de savoir ce que je faisais, je m'élançai déjà entre les rayons, me cachai derrière l'un et observai de là où j'étais Connard être servi par Abigail.

Et il payait l'un de mes romans.

C'était une blague, hein ?

Ce n'était pas que j'avais honte de ce que j'avais écrit, j'avais appris au fil des années à en être fière, mais ce cas-ci était différent.

C'était une ancienne connaissance, un ex.

Après tout, peut-être que j'en faisais tout un plat ? J'étais écrivaine, mon boulot était d'écrire des livres, ce n'était pas bizarre.

Mais une autre peur s'insinua en moi.

Et si... et s'il achetait l'un de mes romans pour le lire et se moquer de moi avec ma sur ?

Ce ne serait pas nouveau.

Mais alors, pourquoi me dirait-il qu'il était désolé et qu'il voulait me donner des explications ? Avait-il l'intention de me manipuler en essayant de me faire croire qu'il y avait eu une raison derrière tout ce qu'il s'était passé, simplement pour de nouveau m'humilier avec ma sur ?

Je ne voulais pas devenir parano, mais je ne voulais pas être naïve pour autant. Et même sil avait une bonne raison d'avoir fait ce qu'il avait fait – ce dont je doutais –, je n'étais pas sûre de pouvoir un jour lui refaire confiance. . Soudain, je sentis une vibration venant du devant de mon pantalon. Jen sortis mon téléphone et l'allumai, voyant à peine quelques secondes plus tard un message qui était apparu sur l'écran. Une irritation fugace m'envahit durant un court laps de temps – je crus d'abord que cela venait de ma sur, mais l'expéditeur se révéla en fait être ma maman. J'avais une relation fusionnelle avec cette dernière, nous ne pouvions pas passer longtemps sans nous appeler. C'était un peu plus compliqué avec mon père. Il n'avait pas été quelqu'un de vraiment présent, trop accaparé par son travail. Ce n'était pas pour autant que nous n'avions pas d'affection l'un pour l'autre, simplement notre relation était assez distante.

Je jetai un regard circulaire sur la librairie, afin de vérifier qu'il n'y avait pas de clients dans le besoin et que je pouvais donc m'occuper du message un petit moment. Je me mis dans un coin légèrement reculé, à l'écart des étagères. Je rallumai mon téléphone qui s'était entretemps éteint et cliquai sur la notification.

Maman :

« Bonjour chérie, ça va ? Je voulais simplement savoir si tu était disponible pour venir dimanche soir, pour souper à la maison. Bisous, je t' aime ! »

Un sourire fendit irrésistiblement mon visage. Cela faisait un petit temps que je n'avais pas été mangé à la maison, cela me changerait sûrement les idées, puis ils me manquaient.

Je répondis donc positivement à ma mère, mais une idée tortueuse s'insinua dans mon esprit.

Ma sœur sera-t-elle là ?

***

Alors que j'avais hâte que dimanche arrive, le temps semblait me narguer en ralentissant. Les journées remplies de mails barbants et d'angoisses liées à mon manque d'inspiration commençaient sérieusement à me peser sur le moral, et je me disais que, peut-être, ma carrière d'écrivaine se finissait déjà. Que j'étais arrivée au bout, qu'il n'y avait plus de place pour moi dans ce milieu. D'autant plus que les messages d'abonnés se posant des questions sur mon absence affluaient de plus en plus, et même si cela m'attendrissait de voir qu'ils s'inquiétaient pour moi, ils rajoutaient inconsciemment à mon angoisse, car je savais qu'au-delà de la volonté de retrouver ma passion, j'étais en train de faire attendre mes lecteurs.