Flashback

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Je doutais que je pourrais un jour être plus heureuse que je ne l'étais pour l'instant. J'avais l'impression que tout allait bien dans ma vie : ma sœur me fichait la paix, j'avais de bonnes notes, de bons amis, et par-dessus tout, je sortais enfin avec l'homme que j'aimais. Cela faisait plusieurs mois que cela durait avec lui, et c'était le bonheur absolu. La surprise avait été immense lorsqu'il m'avait demandé de sortir avec lui, mais pas autant que la joie qui m'avait envahie juste après.

D'ailleurs, j'étais en route pour le rejoindre, dans le centre-ville. Nous voulions nous promener un peu, sans but précis – même si je savais que je finirais par le traîner dans une librairie.

Avec l'empressement de le voir, mes pas se faisaient rapides, et j'arrivai rapidement où nous devions nous retrouver. J'eus la bonne surprise de le voir déjà là.

Un sourire apparut dès lors sur mon visage, alors que je me précipitais dans ses bras, et que ses derniers finirent par m'entourer la taille. Il me pressa contre son torse, ses lèvres épousèrent les miennes, et les papillons se déchainèrent dans mon ventre.

Après notre doux baiser, nous décollâmes nos têtes, mais restâmes dans les bras l'un de l'autre. Son front se posa doucement contre le mien et un rire incontrôlable s'échappa de moi. Il haussa un sourcil, un rictus irrésistible au coin des lèvres.

« Qu'est-ce qui te fait rire ? »

« Rien. Je suis juste heureuse. »

Ses yeux s'illuminèrent d'une lueur tendre, et son sourire se fit plus doux.

« Si tu es heureuse, j'ai réussi ma mission. »

Je pouffai de nouveau, tandis que mes joues me faisaient presque mal à force de sourire. D'ordinaire, j'aurais été gênée de me conduire de la sorte, un peu idiotement, mais en cet instant, Léandre accaparait toute mon attention.

Nos doigts entrelacées, nous finîmes par nous écarter légèrement, et commençâmes notre petite balade. Nous nous dirigeâmes d'abord dans un café, dans lequel nous restâmes un bon bout de temps, trop pris par nos conversations. Puis, comme je l'avais prévu, je finis par l'emmener dans une librairie. Il protesta faiblement, mais je savais qu'il aimait tout autant que moi y aller. 

Nous saluâmes l'employé derrière le comptoir lorsque nous passâmes à côté de lui, avant qu'on aille s'arrêter entre des étagères.

« On fait comme d'habitude ? »

Un sourire joueur sur le visage, il hocha la tête.

Lorsque nous allions dans une librairie, nous avions une petite habitude que nous aimions beaucoup. Je choisissais quelques livres qui me faisaient penser qu'il allait les aimer, et il faisait la même chose. Celui qui trouvait le plus de livres que l'autre aimait dans un temps limité avait gagné.

Nous courûmes aussitôt vers les étagères, et de mon côté, je partis vers les livres orientés psychologie, ceux que Léandre adorait. Je retournai sans attendre les ouvrages afin de lire rapidement les résumés. Au début, je ne trouvai rien, mais ils commençaient doucement à s'entasser sur mes bras. Mais mon téléphone sonna soudainement, et je l'éteignis sans tarder, afin d'éviter d'attirer quelconque attention embarrassante. Je pris alors la direction de l'entrée du magasin, où il y avait une allée. De l'autre côté, je remarquai Léandre arriver, et, malheureusement, plus chargé que moi niveau livres.

Ou heureusement, selon le point de vue.

Il parut voir la même chose, car il releva la tête vers moi avec des yeux rieurs. Je levai les yeux au ciel, sachant d'avance qu'il avait gagné.

Nous échangeâmes les titres que nous avions trouvés, et effectivement, il avait cette fois-ci remporté le jeu. Évidemment, je ne pouvais pas tout acheter, alors j'en choisis un – bien que ce fut un choix difficile – et pris en photo les couvertures des livres que je n'avais pas pris, Léandre faisant la même chose de son côté. Après avoir payé, un sac qui les contenait à son bras, nous sortîmes du magasin, mais je m'arrêtai devant la devanture. Léandre s'immobilisa à mes côtés, perplexe.

« Un jour, mon livre sera vendu ici. » dis-je, la détermination durcissant ma voix.

Je tournai la tête vers mon copain, qui m'observait une nouvelle fois avec tendresse.

« Et ce jour-là, je serai à tes côtés pour te supporter. »

Inutile de dire qu'il ne l'avait pas été.

***

Il était encore tôt, lorsque je pris la direction de l'école. Je venais de descendre du bus, devancée par ma sœur qui ne prenait pas la peine de m'attendre. Dans la cours, je retrouvais mes meilleurs amis, et cherchai instinctivement du regard mon copain, mais je ne le trouvai pas. C'était étrange, car il arrivait tous les jours avant moi, et il ne m'avait rien dit par messages.

Mais ce n'était sans doute rien.

La journée se passa tranquillement, mis à part le fait que je n'avais toujours pas vu Léandre et qu'il ne répondait à aucun de mes messages. Je commençais un peu à m'inquiéter.

Tout bascula durant la dernière pause. J'étais assise à un banc, à l'extérieur, entourée de Louis, Neyla et Amalia, lorsque je vis au loin Elizabeth arriver dans ma direction, un sourire vicieux peint sur le visage. Là, mon inquiétude atteignit son paroxysme. Cela ne pouvait signifier qu'une chose : elle préparait un sale coup.

Elizabeth possédant une certaine popularité, les têtes de la majorité des personnes ici présentes se tournèrent vers elle et nombreux d'entre eux tentèrent de lui parler. Je trouvais toujours cela ridicule, cela faisait cliché des lycées aux États-Unis.

Ignorant tout le monde, elle monta soudainement sur la table qui séparait les bancs sur lesquels j'étais avec mes amis.

« Bonjour, tout le monde, j'ai une annonce à faire ! »

Je vis au loin Léandre arriver, et alors que je m'apprêtais à l'interpeller, il ne voulut à aucun instant croiser mon regard. Derrière lui apparut Axel, dont les yeux confus percutèrent les miens, qui devaient refléter la même expression. Je donnai alors toute mon attention à ma petite sœur, et un mauvais pressentiment m'envahit toute entière.

« Je voulais simplement vous annoncer à tous que Léandre et moi étions officiellement en couple ! »

J'eus alors l'impression que mon cœur se fissurait en deux.

Cela ne pouvait pas être vrai, elle rigolait, hein ? Ou alors Léandre allait réfuter, pour dire qu'il était en couple avec moi.

Mais il ne fit rien. Pas même lorsqu'Elizabeth descendit de la table pour s'approcher de lui, et sous les applaudissements et cris des autres étudiants, l'embrasser à pleine bouche. Il passa même, devant mes yeux humides de larmes tant bien que mal retenues, ses bras autour de sa taille, de la même manière qu'il l'avait fait, lorsque nous nous étions retrouvés l'autre jour.

Les murs de mon monde s'effondrèrent, me laissant sans défense face au sourire triomphant et perfide de celle supposée être ma petite sœur.

Et le pire, entre tout cela, était que Léandre ne s'embarrassa même pas de me jeter un dernier regard avant de partir, toujours accompagné d'Elizabeth. 

Nos cœurs meurtrisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant