Cela fait maintenant un long moment que nous roulons. J'ignore totalement la destination que Shinichiro a en tête, mais il n'a jamais paru aussi sûr de lui. Dans tous les cas, je n'ai pas d'autres choix que de lui accorder une confiance aveugle pour l'instant.
« Maintenant je vais t'emmener dans un vrai endroit pour un rencard. »
Qu'est-ce que cela peut bien signifier à ses yeux ? Après tout, j'en avais presque oublié que je ne connais pas grand chose de lui... Il peut très bien m'emmener dans un endroit pire que celui que vous venons de quitter, tout comme dénicher le rendez-vous parfait.
Le vent commence alors à se mélanger à une odeur de sel et de marée. Ça ne peut que signifier qu'une seule chose...
— La mer !
Shinichiro s'esclaffe, visiblement très fier.
Mais plutôt que les côtes touristiques que nous connaissons, il a choisi le port avec tous les bateaux qui vont avec. Il diminue alors la vitesse de sa moto, me laissant pleinement l'occasion de regarder les allers-retours des voiliers, ainsi que de contempler la clarté de l'eau.
— J'emmène souvent mon petit frère ici, m'informe-t-il en freinant devant un muret de pierre.
D'ici, nous pouvons voir la mer s'étendre à perte de vue. Le soleil qui se reflète sur cette dernière la fait étinceler, créant de minuscules petites étoiles qui se mouvent au gré des remous de l'eau. Le son des vagues qui s'écrasent contre la côte rend le tableau à la fois irréaliste et apaisant. Il n'y a que cette odeur de sel, si particulière et caractéristique, qui me confirme que je ne suis pas en train d'imaginer tout cela.
— C'est bien mieux qu'une patinoire délabrée, non ?
Shinichiro cale sa moto contre le muret avant de s'assoir sur celui-ci, ses pieds pendant dans le vide. Il en profite pour s'allumer une cigarette au passage, sa fumée se mêlant à l'atmosphère maritime. Je le rejoins pour m'installer à sa droite.
Il n'y a pas de débat possible entre le choix de Kyo et celui de Shinichiro...
— D'ailleurs, je me demandais..., relance-t-il, brisant le silence. « Rin » c'est un prénom plutôt masculin, non ?
Je souffle du nez.
— Oui, il me semble que c'est pour les garçons.
— Pourquoi tes parents t'ont appelée comme ça, alors ? s'étonne-t-il.
— Ma mère m'a toujours répété que c'était « comme le sel dans une pâtisserie qui fait ressortir le goût du sucre. », et qu'elle voulait que je sois ce genre de fille.
Shinichiro me regarde longuement, essayant de déchiffrer mes dernières paroles.
— Ça n'a aucun sens, conclue-t-il en fronçant les sourcils.
— Et toi alors ? je me défends. Pourquoi « Shinichiro » ?
Il écrase son mégot de cigarette sur la pierre avant de me répondre :
— Tout ce que je peux te dire, c'est que mon prénom signifierait « vérité, réalité, authenticité ».
— Rien que ça, j'ironise.
Shinichiro a un léger rire mais n'ajoute rien. Seul le son des vagues brise le silence qui s'est de nouveau installé entre nous. Perdue dans l'observation de l'écume, je ne tente pas de relancer une quelconque conversation.
Étrangement, je ne me sens pas du tout mal à l'aise. Au contraire, ça faisait des années que je ne m'étais pas sentie aussi apaisée. J'inspire profondément une bouffée de cet air marin, profitant de chaque instant.
Je ne sais pas combien de temps nous restons assis sur ce muret à regarder l'horizon, ainsi que le soleil qui quitte son zénith pour entamer sa descente. Je me sens ailleurs lorsque Shinichiro m'invite à m'installer à l'arrière de sa moto pour repartir.
— Alors, ce rencard ? demande-t-il avec un sourire en coin.
— Tu considères donc réellement ça comme un rencard ? Ce n'était pas juste pour me prouver que tu étais capable de trouver de meilleurs endroits que Kyo ?
Il tourne la poignée de sa bécane pour faire rugir le moteur.
— Au départ, si, avoue-t-il. Mais finalement, tu ne trouves pas que ça a pris une autre tournure ?
Je considère un moment sa question.
Il n'a pas complètement tort... Cette mer, ce port, et le diaporama en lui-même, ainsi que ce silence compris entre nous... Les choses ne se sont pas du tout déroulées telles que je les imaginais.
Je ne lui réponds cependant pas et me contente de m'accrocher à ses épaules lorsqu'il démarre.
Le trajet du retour se fait bien plus rapidement que celui de l'aller. Arrivés devant chez moi, je pose pied à terre, presque déçue que l'après-midi touche déjà à sa fin.
— Content d'avoir sauvé ton aprèm', sourit-il. C'était cool, Takahashi.
— Ouais..., j'acquiesce. Merci, Sano.
Et en entrant dans ma maison, j'ai l'impression d'être bien plus légère que lorsque je l'ai quittée.
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Comme une étoile (Shinichiro x OC)
FanfictionÉté 1997. Je pouvais m'attendre à tout, sauf à croiser Shinichiro Sano dans un cimetière. Réputé pour s'être pris une vingtaine de râteaux, je ne pensais pas que cet homme pourrait avoir un quelconque impact sur ma vie. Mais ça, c'était avant qu'i...