Je n'ai jamais été bien en forme les lundis matins, et particulièrement lorsqu'il s'agit d'un retour de vacances. Bien entendu, aujourd'hui ne fait pas exception à la règle ; après avoir franchi le seuil de la porte de ma classe sans cacher mon soupir las, je me dirige vers ma chaise avant de m'y laisser tomber lourdement.
La sortie nocturne avec Shinichiro m'a perturbée tout le reste de la deuxième semaine. Lorsque mon esprit s'égare, il me ramène immédiatement dans ce port, allongée à ses côtés.
« Moi, en tout cas, j'adore les étoiles qu'il y a dans tes yeux. »
Pourquoi est-ce qu'il m'a dit un truc pareil ? À chaque fois que j'y repense, j'ai l'impression de sentir de nouveau ses doigts effleurer ma joue.
Je pose inutilement ma main sur cette dernière, comme si je m'attendais à ressentir une marque brûlante de son passage.
— Je crois que le pote de Sano me drague, lâche Aria en apparaissant à côté de moi.
— Wakasa Imaushi ? je demande.
— Oui, lui. En fait, c'est vraiment mon genre mais...
Elle s'arrête au milieu de sa phrase, soudain plongée dans ses pensées.
— Mais le soir des vacances il m'a dit..., reprend-elle, mi-amusée, mi-gênée. Oh, Rin, il est vraiment mauvais en drague !
Pour qu'Aria réagisse comme ça, il a vraiment dû y aller fort... Lui qui prétendait mieux s'y connaître que Shinichiro !
Elle se retient à grande peine de rire en essayant de reprendre la parole :
— Il m'a dit ; « Je m'appelle Wakasa, mais toi tu peux m'appeler ce soir », et il m'a glissé son numéro dans la main !
Nous éclatons toutes les deux de rire. Je n'aurais jamais cru qu'il serait capable d'une chose pareille. Finalement, je ne suis même pas étonnée qu'il s'entende aussi bien avec Shinichiro.
Nous tentons de reprendre contenance lorsque les deux intéressés entrent dans la classe. La mine habituellement désintéressée de Wakasa s'éclaire lorsqu'il s'aperçoit de la présence d'Aria. Il n'a cependant pas le temps de se tourner vers elle, car le professeur lui emboîte le pas.
Il s'affale sur sa chaise avec un profond soupir d'ennui tandis que mon regard s'oriente naturellement sur la nuque de Shinichiro. À l'horizon, les premiers rayons du soleil viennent éclairer ses cheveux noirs. La journée ne promet pas d'être si désagréable que ça, finalement...
✧.* ✧ *.✧
Lorsque la cloche sonne la fin de la journée, tous les élèves se précipitent vers la sortie.
— À demain, Takahashi ! me lance joyeusement Shinichiro en quittant la salle de classe.
Tout sourire, je lui réponds par un signe de la main.
— Il se passe un truc entre Sano et toi, c'est officiel, déclare Aria en jetant son sac sur son épaule.
— Hein ? Non ! On est juste potes...
— C'est pour ça que t'avais sa veste le soir où Kyo m'a larguée, souligne-t-elle. Sans compter que tu le regardes tout le temps avec des yeux de merlan frit.
Vexée, je ne dis plus un mot en quittant le lycée. Comme à son habitude, Aria prend le même chemin que moi pour rentrer chez elle. Même si sa rupture a un peu affecté son humeur, je suis contente que nous puissions redevenir aussi proches qu'avant. Ce n'est pas très moral de ma part... Mais c'est plus fort que moi.
Comme l'a cependant dit Shinichiro, elle a tout gagné en n'étant plus avec un type pareil, surtout quand on s'intéresse de près au charisme inexistant de Kyo.
Mettant finalement ma fierté de côté, je sors deux taiyakis de mon sac pour lui en tendre un.
— Depuis quand tu manges ces gâteaux pour gosse ? s'étonne-t-elle en le prenant.
— Ils sont très bons, je rétorque, de nouveau piquée au vif.
— Je blaguais, rit-elle en voyant ma mine renfrognée. Moi aussi je les adore.
Cela me déride mais je n'ajoute rien.
J'ignore si Aria a compris, mais si jamais elle me pose la question, je mentirais si je disais que je ne me suis pas mise aux taiyakis grâce à Shinichiro.
D'ailleurs, concernant Shinichiro...
— Tu aurais pas une idée de comment je pourrais remercier Sano pour ce qu'il a fait pour moi ?
Elle avale sa dernière bouchée avant de répondre sur un ton d'évidence ;
— Ben en lui disant merci, non ?
— J'aimerais que ce soit plus qu'un simple merci, dis-je avec un haussement d'épaules.
Arrivées devant chez moi, nous nous arrêtons sur le trottoir en réfléchissant. J'ai déjà songé à la question, mais aucune idée brillante ne m'est venue à l'esprit...
Aria pousse alors une exclamation victorieuse, le visage soudain rayonnant.
— Offre lui un cadeau !
— Un cadeau ? je répète, à moitié convaincue. Mais quoi ?
— Oh ça peut être n'importe quoi..., dit-elle. Un truc qui soit en rapport avec ce qu'il aime. Non, ne me demande pas ! ajoute-t-elle en me voyant ouvrir la bouche. C'est toi qui connais Sano, pas moi.
Je la dévisage quelques instants en fronçant les sourcils.
Après tout ce qu'il a fait pour moi, je me vois mal exprimer ma reconnaissance avec de simples remerciements. L'idée d'Aria n'est pas mauvaise... Mais pour ça, il faut connaître les goûts de Shinichiro. Or, à part à son gang et aux motos, à quoi d'autre peut-il s'intéresser ?
— Je vais rentrer avant qu'il ne fasse nuit, reprend Aria en se remettant en marche. À demain, Rin ! Réfléchis bien !
— Ouais..., je réponds vaguement, perdue dans mes pensées.
Piquée sur le trottoir, je la regarde s'éloigner sans vraiment la voir.
Mon esprit me ramène fatalement à la dernière soirée que j'ai passé avec Shinichiro. Le film de mes souvenirs se rembobine pour la énième fois... La moto, la mer, sa veste, et les étoiles.
Et les étoiles...
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Comme une étoile (Shinichiro x OC)
FanfictionÉté 1997. Je pouvais m'attendre à tout, sauf à croiser Shinichiro Sano dans un cimetière. Réputé pour s'être pris une vingtaine de râteaux, je ne pensais pas que cet homme pourrait avoir un quelconque impact sur ma vie. Mais ça, c'était avant qu'i...