Chapitre 8

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Encore installé dans la mairie de cette ville bombardée, l'évacuation continue à battre son plein. Chaque minute, ils retrouvent des personnes encore coincées sous les décombres, vivantes ou décédées. Tout le monde se met à la tâche, même Pierre qui est encore blessé aux bras droits :

"Tu es sûr que ça va mieux ?

-Oui Louis, ça me sonne encore à certains moments, mais je te promets que ça va."

Ils forment désormais des équipes de trois, sachant que Pierre et Jean-Charles ont été répartis dans un groupe chacun. Les deux ne pouvant pas rester sans surveillance, Julien a décidé d'adopter cette stratégie.

Ils reviennent tout juste de la fouille, ils tournent avec les autres escouades pour que personne ne se fatigue et qu'il y ait toujours des soldats enclins à évacuer efficacement. Le blond se gratte l'arrière du crâne, il a passé sa journée à demander à son ami comment il allait, si ce n'était pas trop douloureux, et plusieurs autres questions dans ce style. Jean commençait à en avoir marre mais en même temps l'attention de son ami à son égard lui réchauffait le cœur. Seul Thomas était à bout, il ne craint qu'à une autre question comme celle-là, il envoie balader le jeune blond.

Ils s'assoient sur les chaises de repos dans la grande salle sauf Louis qui part chercher de quoi s'hydrater sans oublier d'en ramener à ses coéquipiers. L'air de dehors était sec et rêche, la sensation de brûlure dans la gorge était présente en permanence à cause de la poussière et de la fumée. Il ne pouvait s'empêcher d'avoir une pensée pour toutes ces personnes coincées sous terre qui doivent respirer un air encore plus sale que celui dans les rues.

Tous ont entamé leur bouteille sans lésiner une seule goutte. Les soupirs de satisfaction juste après étaient signe que ça les soulageait ne serait-ce qu'un peu.

Dans un silence plat, chacun cherchait le repos à sa façon. Jean-Charles qui entendait encore un son strident et aigu dans le fond de son oreille, s'obligeait à se détendre pour essayer d'atténuer ce bruit.

Thomas dormait presque, affalé sur la chaise comme un enfant qui s'ennuie à l'école. Quant à Louis, il regardait ses coéquipiers avec ses yeux qui le brûlent jusqu'à la rétine. L'air n'a pas séché que les gorges et loin de là. Beaucoup d'autres dehors ont les yeux qui pleurent seuls à cause de ça. Le trio n'y a pas échappé.

Le soir arrivait et c'était leur tour de dormir après la nuit blanche de la veille. Une autre escouade va se charger de porter secours cette nuit, à leur place. Le blond désire attendre les cinq autres qui devraient bientôt arriver. Tout le monde risque d'être hautement fatigué mais il veut vérifier leur état physique.

Après toutes les épreuves qu'ils ont traversées, Louis s'est fortement attaché à ses camarades. Même si certains sont dans un autre état d'esprit, comme Pierre qui est encore furieux envers le blond. Le benjamin s'est juste très vite attaché, sa sensibilité a énormément joué aussi, il se sent lié à eux à cause des épreuves communes qu'ils ont traversé.

Par moments, il comprend mieux la relation de Julien et Jean-Charles. Les deux ont traversé tellement d'obstacles ensemble que leur lien est devenu très fort. Certaines fois, il vient se demander si ce lien ne serait pas plus fort que le leur. Le commandant et le brun ont survécu à la mort, ont vu leurs camarades tomber et ils ne restent qu'eux en bon état pour continuer à servir la guerre. Certains étaient tellement blessés qu'ils se sont révélés inutiles pour la continuer. Peut-être que ce sera le cas pour notre groupe aussi, pense-t-il avec le cœur lourd.

***

Bien une heure et demie après, les autres arrivent enfin. Ils sont au bout du rouleau, leurs vêtements sont remplis de poussière, de crasses. Le trio déjà présent n'était pas bien mieux. L'idée de prendre une bonne douche les faisait tous saliver comme si on leur proposait un steak avec des patates douces et une sauce bien relevée.

C'est toi que je ne déteste pasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant