Chapitre 23

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La tête calée dans le camion comme il en avait si souvent l'habitude, il ne parvenait pas à fermer l'œil. Fixant ce même point que depuis le départ. Il quitte les anglais pour rejoindre enfin le camp de Louis. C'est cette pensée qui le maintenait éveillé malgré la fatigue qui marquait tous ses traits, rongeant au passage chaque fine partie de son corps.

Il avait passé deux semaines complètes à aider au mieux dans le nord du pays. Ce jusqu'à qu'un lieutenant vienne lui annoncer que la demande de retraite pour sa personne avait été acceptée. Il avait été peiné pendant toute la durée à cause de son œil à moitié mort. Il ne voyait plus grand-chose, ce qui était particulièrement handicapant, mais il savait que cela reviendrait avec le temps.

Pendant ces semaines, il a eu vent des bombardements à Reims et cela n'avait fait que l'inquiéter. Il connaissait Louis. Il n'avait pas été là au moment où le blond risquait d'avoir besoin de lui.

Une crevasse des routes de campagne bouscula tout l'arrière du camion. Les caisses s'étaient entrechoquées avant de revenir à leur place. Cela n'avait même pas fait baisser les yeux de Thomas qui commençait à devenir impatient. Comme un enfant qui attend d'aller au parc, il était pressé :

"Château-Thierry."

La voix du conducteur après ces longues heures sonnait telle une récompense aux oreilles des soldats de l'arrière. Ils commençaient à s'éveiller, bouger pendant que Thomas baissait enfin la tête, une boule au ventre de découvrir l'accueil que lui réserve Louis. Ils ne s'étaient pas revus depuis l'arrivée au camp, il n'était donc pas certain que le blond allait garder son avis sur sa personne, si cela se trouve il allait se faire rejeter. La pire idée restait cependant qu'il ne se soit jamais réveillé.

Le camion freine, et les premiers au plus près de la sortie passent le rebord. Deux grands bruits sourds et voilà le "coffre" ouvert. Ils commencent alors à pousser les caisses vers l'extérieur et d'autres soldats inconnus arrivent pour les aider à décharger. Thomas se dépêche d'aider le jeune rouquin qui semblait avoir du mal avec la caisse à vin. Il l'aide à pousser et quatre autres soldats prennent la relève. Voilà que le camion était vidé.

Il se baisse pour s'asseoir et glisser avant d'atterrir sur la terre dure.

Son regard dérive directement vers l'entrée du camp et il analyse toutes les personnes jusqu'à tomber sur ces visages aux regards pétillants prêts à pleurer. Cela ne faisait nul doute, malgré sa faible vision, que c'était Louis.

Le blond fait un pas vers l'avant, comme si cela n'était qu'un rêve. Il était en partie figé, penché vers l'avant légèrement hésitant. C'est Thomas qui entreprit de franchir les quelques mètres qui les séparaient. Une fois à son niveau, à se regarder dans le blanc des yeux confus de savoir quoi faire. Louis décide de suivre son cœur et ses pulsions, venant entourer la taille du grand brun et collant sa tête au torse de celui-ci. Thomas était au premier abord surpris, puis vint lui aussi entourer le corps frêle de son bien-aimé.

Un large sourire était perceptible sur les deux visages. Pour les soldats curieux autour c'était des retrouvailles entre frères de cœur, alors que pour eux c'était retrouver un fragment d'eux chez l'autre.

C'était terminé, ils étaient placés en retraite et ils allaient pouvoir suivre leur propre chemin. Dès le lendemain, ils savaient qu'ils allaient devoir tout recommencer à zéro :

"Allons dans ma tente ! Je dois te raconter plein de choses !"

Louis était plus souriant que jamais, il recule en prenant le poignet de Thomas pour le mener jusqu'à sa tente. L'intérieur était simple, mais cela paraissait plus confortable que durant les deux dernières semaines :

"Allonge-toi, tu dois être exténué."

Le grand brun posa son regard sur le lit simple, hésitant il vient d'abord s'y asseoir et d'ici il peut voir un sac déjà prêt. Sortant de la poche avant le bout de l'enveloppe qu'il avait écrit avant de partir. Ses pupilles finirent par se poser sur Louis, grommelant face à la douleur que cela lui infligeait de s'asseoir sur la chaise. Mais il passe outre rapidement, commençant à raconter les derniers jours à Thomas, celui-ci qui commençait à être bercé par la voix du blond. L'entendre rire et raconter des événements joyeux l'apaisait, il était enfin capable de trouver le courage de fermer les yeux, au risque de vexer Louis.

Le plus jeune l'avait fait exprès, la fatigue intense dans le regard et le visage de son bien-aimé était visible comme une maison au centre du visage. Il ne voulait pas inquiéter Thomas et souhaitait l'apaiser au mieux. Sa mission fut réussie lorsqu'il entendit les roupillements du brun qui venait de s'endormir dans son lit.

Son regard se posa sur la blessure presque refermée au-dessus du sourcil du soldat à la retraite. Elle était moins laide que la dernière fois, tout comme sa blessure à lui.

Discrètement, il se lève afin d'aller préparer de quoi manger pour quand il se réveillerait. Désireux de le faire se sentir apaisé et en forme.

C'est toi que je ne déteste pasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant