Le soir même, suite à la perte de leur coéquipier, en plus de leur situation délicate, une équipe de remplacement a été envoyée. La troupe de Julien peut donc retourner au camp de base, sans le corps de Jean. Le grand brun s'était chargé avant le départ d'expliquer la situation au chef de l'équipe remplaçante, mais surtout de l'amener au corps de Jean pour pouvoir l'enterrer comme il se doit.
Louis n'avait rien dit sur le moment, mais il avait fortement remercié son collègue pour cette initiative. Il ne sait pas s'il allait pouvoir assister à l'enterrement de Jean, pouvoir hurler auprès des parents de son frère adoptif pour tout le mal qu'ils avaient causé. Il ne savait plus rien. Il venait juste de perdre, encore une fois, en l'espace de quelques semaines, un membre de sa famille.
Pour Julien, tout était différent. Pour surmonter au plus vite cette douleur, son cerveau ne cesse de lui répéter que c'est ce que Jean désirait, qu'il est heureux là où il est. Probablement avec Evangeline. Il ne faisait que se mettre des œillères pour se protéger du véritable chagrin que représente la perte de son ami le plus proche.
Pierre et Marc sont silencieux, ne sachant quoi dire ou quoi faire. Ils sont plongés dans leurs pensées. Ils n'étaient, certes, pas aussi proches que Louis ou Julien pouvaient l'être avec Jean-Charles, pourtant ils ressentaient une forte douleur dans la poitrine.
En quelques mois, un lien s'était formé. Il en était de même pour les deux conducteurs. Lucien trouvait le camion plus léger, peut-être était-ce une réaction psychologique ou alors une illusion, mais cela le bouleversait réellement. A l'arrière, il manquait bel et bien une personne qui était pourtant présente le matin même.
William repense au corps de son camarade qu'il n'a pu voir que quelques secondes, des secondes qui lui furent suffisantes pour s'en souvenir dans les moindres détails. En y repensant, il espère juste que Jean-Charles est mort sur le coup, face à l'impact de l'explosion. Il espère qu'il n'a pas eu le temps de voir le regard des enfants qu'il n'a pas pu sauver. Il espérait beaucoup de choses.
Ce n'est que plus tard qu'ils arrivent enfin au camp. Pierre et Marc entreprennent directement de monter toutes les tentes pour dédommager les autres. Lucien et William se chargent de la cuisine, pendant que Thomas s'occupe des deux soldats abattus. L'ambiance était pesante, maussade dans chaque pièce occupée :
"Je vais chercher les ordres pour après-demain."
Julien ne perd pas un instant pour aller s'isoler dans la salle où se situe la radio. Il prend soin de fermer derrière lui, et s'assoit sur la chaise devant la radio qui grésille. Son regard se plante sur la machine devant lui, il ne sait pas comment demander à son équipe de combattre le surlendemain après cette perte. Lui-même ne sait pas comment il va faire, il est juste épuisé. Dans cette situation, Jean-Charles aurait été d'une aide précieuse, il n'était pas le sous-chef pour rien. Pourtant il n'était pas là. Cette pensée le fait repartir dans des pleurs silencieux où seul les larmes silencieuses se déversaient sur ses joues..
Alors qu'il ne pouvait retenir ses larmes, quelqu'un toc à la porte. Le major ne répondit rien, fixant juste l'embrasure et le bois brun. La personne insiste et toc à nouveau, ajoutant d'une voix faible :
"C'est moi, Julien."
Il reconnut la voix brisée de Louis. Le fait qu'il l'appelle par son prénom lui fait ressentir que son coéquipier n'est pas là en tant que soldat, mais en tant qu'ami. Il souffle une invitation à entrer et le blond ne se fait pas prier. La poignée s'abaisse et il entre rapidement dans la petite salle en refermant soigneusement derrière lui.
Ses yeux sont d'une rougeur frappante, ses cernes sont marqués, mais pourtant, il arbore un petit sourire niet. Il vient se caler contre le mur, dans un silence de mort. Après plusieurs secondes où les deux écoutent leurs larmes couler et leur cage thoracique s'élever pour s'affaisser dans un rythme frénétique, le plus jeune rompt le silence :
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C'est toi que je ne déteste pas
Fiction généraleUn jeune homme est envoyé à la guerre. Contre tout attente, il va intégrer une escouade d'arrière-garde chargée des évacuations. Dans cette nouvelle troupe, il va rencontrer d'autres hommes, dont un. Au départ, une tension négative planait entre le...