Vie(s) de folie(s)

56 - Sourire vide

Je n'arrive pas à arrêter
De t'aimer
De pleurer
D'errer

Mais comme pour tout
Ça s'arrêtera d'un coup
A en oublier les milliers de cailloux
Qui auront reboucher le trou

Je n'arrive pas à arrêter
De te regarder
D'envier
D'être perforée

Mais comme pour tout
Il faudra lutter pour un bout
Car on aura jamais un tout
Et la lutte c'est jusqu'au bout

J'ai voulu m'arracher les yeux
J'ai eu trop peur qu'on m'enlève le bleu
Que j'aime observer dans chaque creux
Je ne parie même pas quand la vie est un jeu

Un pieu a crevé mes yeux
Je suis de ceux qui se pensent audacieux
De supplier le conducteur oublieux
De ne pas les écraser quand ils sont déjà sous les pneus

Mes sentiments délaissent les bleus
Qui s'effacent sans enjeux
Ils préfèrent les traits disgracieux
Laissé par l'égarement des voeux

Mais si je m'étais arrachée les yeux,
Les battements du coeur rocailleux
Se confondraient avec des séismes périlleux,
Aurais-je su que j'étais en vie dans le noir infini de ce lieu ?

Je n'arrive plus 
A me réjouir pour toi
A te parler
A me projeter

Mais avec chacun pour parler
Il y a les potins
Il y a le prétendu destin
Il y a le quotidien

Je n'arrive plus
A t'approcher
A t'intéresser
A être entourée

Mais avec chacun comment parler
Quand on est déjà trop revenu sur le passé,
Quand le présent est vide à souhait,
Quand le futur est un désert inhabité ?

Je n'arrive plus à aimer tes sourires
Pour ne plus les voir, j'ai voulu faire le pire
Arracher mes yeux
Plonger vers les cieux

Mais tes sourires éblouissants
M'ont enlever la vue de leurs dents
Le problème des sourires éclatants
C'est que j'y vois l'absence du mien dedans

Tout ce qui brille renvoie des reflets
L'obscurité voudrait tout avaler
Une main surgit du trou noir pour s'accrocher
Elle n'a trouvé que la brûlure du soleil pour espérer

Dans les paillettes de ma mise en scène
As-tu saisi l'aubaine
De capturer les abysses à découvrir
Même sur la photo du plus vrai des sourires ?

Le sourire vrai est le sourire reflet
Le mien renvoie le vide avéré
De ton absence installée
De mon trop plein d'envie emprisonnée

Et si un sourire peut refléter le vide
Le vide ne renverra pas même la lumière la plus placide
Le vide ne me laisse même pas ton sourire
Plus rien en moi ne sait s'assouvir