Je savais qui était Gaëtan. Il se désigna comme le chef du groupuscule que formait le dortoir. Il était orgueilleux et autoritaire. C'était tout ce que j'avais à savoir pour l'instant.
Je me couchai peu de temps après. J'avais beaucoup de pensées en tête et une mélodie se chantait en moi. Je reposai mes yeux tout en me souvenant de la combattivité de Louane au combat. Ses cheveux noirs virevoltaient au gré de ses mouvements gracieux. Ses yeux magnifiques n'avaient pas sourcillé une seule seconde. Mes soucis bouleversant lamorale avaient disparu instantanément. Je pensai à Louane, et mes pensées couraient sur son portrait rassurant. Plus rien, plus aucun événement étrange ne pouvait m'atteindre. Louane était mon pilier dans ce monde étrange... Le monde artistique... A présent, il m'était presque devenu familier. Le hic de ce monde c'etait qu'il était en guerre contre le monde réel. En gros ça foutait un bordel comme pas possible. C'etait dommage que le monde artistique soit en crise. Moi j'aurais bien aimé venir en simple touriste. Et puis autre chose : je n'appréciais vraiment pas ce Obnut, ce foutu tyran qui avait le pouvoir de toujours tout gâcher.
Mais finalement, si je n'avais pas acheter Affronter le tableau, je n'aurais jamais pu rencontrer Louane. Quelles circonstances étranges... Qui sait si tout reviendra en ordre un jour, et si avec la femme-ange il y avait moyen? Cette fille plus que spéciale à mes yeux avait osé m'appeler par mon prénom au lieu de me qualifier de "Pissotroum". Rien que ça, c'était un geste. Pour elle, je n'étais pas le "Pissotroum", une sorte de bête de foire mais juste un être humain imparfait, comme tous les autres. Ainsi, par mes défauts et mes faiblesses, j'étais possiblement attachant. Pour Louane, j'espérais l'être encore plus! Je ne savais toujours pas pourquoi on m'avait nommé «Pissotroum ». Je m'en contrefichais : je m'assoupis...
***** (personnellement, je vous conseille de finir l'écoute de la musique pendant cette brève pause; afin de finir de vous imprégner des paroles de "Hissons nos couleurs", la fameuse chanson des Pirates des Caraïbes)
Après quelques heures, je fus réveillé par une discussion animée. Une première voix -que je ne réussis pas à identifier- dit:
«Moi je te dis qu'il ne fallait surtout pas de Pissotroum! On avait déjà la transition artistique. Et c'était très bien.
-Ouais je suis d'accord. Notre monde est aussi normal que celui à l'extérieur. Le nôtre offre juste de nouveaux horizons en plus.
-Mais je te jure sur la vie de ma mère que ma famille et moi, on était enfermé ! Tu crois qu'il est parfait notre monde peut-être ?
-Ouais wallah, notre monde est maintenant confondu avec le monde de l'extérieur, qu'ils appellent la Terre, et c'est beaucoup mieux.
-Oh ma che cazzo dici?! T'es con ou quoi ? Y a Obnut qui prend de plus en plus de pouvoir je te rappelle.
-Moi les amis, je vous dis que le Pissotroum c'est l'élu! De un, parce qu'il est le seul qui puisse combattre le O et de deux, parce qu'il possède le tableau fétiche du tyran. C'est dit sur la prophétie que c'est lui: un artiste solitaire à l'air rebelle. Y a même une peinture de lui à côté de la prophétie.
-Ben tiens les petits potes, à votre avis en quoi le Pissotroum bouleverse tout? Parce que, certes il possède le tableau fétiche du tyran, mais il a aussi libéré le pouvoir de celui-ci. Le Pissotroum serait méchant alors? Lui aussi?
-Oui c'est un méchant! Du moment où il a acheté le tableau, il a permis à Obnut d'unir le monde extérieur et le monde artistique.
-Unir non, mais mélanger de façon chaotique oui. On en parle de l'incendie artificiel d'une mairie?
-Bah c'est la merde quoi.
-Bien vu.
-Ta gueule.
-Euuuh, intervins-je alors.
-Porca miseria, il est réveillé!
-Tu as tout entendu alors?
-Euh oui, mais j'ai compris que la moitié de ce que vous avez dit.
-Bah c'est ça aussi, de parler un peu arabe et italien.
-Tais-toi le raciste. Du coup, revenons à nos moutons, t'en penses quoi de ce qui nous arrive toi?»
A la suite de cette question, les regards des adolescents du dortoir se posèrent tous sur moi. Je me sentais oppressé, et... légèrement observé. Je ne sus que répondre. Je leur dis que, moi, ce que je savais c'était qu'Obnut avait commencé à recruter ses soldats dans la vraie vie, dans la brocante. Et quand ce fut moi qu'il piégea, leur monde artistique avait fait corps avec mon monde. Mon savoir se limitait globalement à ça. Je les sentis frémir quand je prononçais le nom d'Obnut. Le dire était-ce si moche que ça? Je ne connaissais guère les coutumes du monde artistique. Je venais à peine de rentrer dans le bain et, déjà, une foule de détails étranges me torturait les neurones. Autre problème: le débat reprit de plus belle, avec des propos que je n'étais pas capable de comprendre. Ceci montrait bien que je n'appartenais pas à leur univers. J'étais un gars de l'extérieur, du "réel" pouvait-on dire. Je posai une question sur un mot qui revenait souvent : la « Torture ». En fait, je compris qu'il s'agissait du Sentiment. Je leur dis que je l'appelais ainsi. Mais, à l'unanimité, ils trouvèrent le mot sentiment avec une majuscule pas assez fort. Personnellement, je préférais l'appeler le Sentiment, la "Torture" étant un nom peu poétique. Je savais alors que je n'étais pas au bout de mes peines.
Plus que tout, je redoutais de croiser de nouveau Obnut, ou Chiara et ses Bleuets. J'avais vite compris que ces derniers seraient mes ennemis plus que mes alliés, au cours de l'aventure. J'espérais deux choses, seulement deux: que Louane ne meure pas et que le Sentiment ne ressurgisse point. Les deux événements seraient des calvaires, enfin s'ils adviennent.
Ce qui n'est pas dit.
A suivre...
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VS le tableau
ParanormalC'est d'abord étonnant, puis bouleversant, et alors effrayant. Luke se retrouve au milieu de péripéties décoiffantes. Il ne sait plus ce qui est réel. Il agit mais sans penser. Il essaie de comprendre. Oui, débarquer dans un univers parallèle ça n'e...