Chapitre 36-Je vous jure que c'est pas moi

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      Une espèce de puceron géant tenait dans sa gueule un prisonnier. Je fis un geste pour le secourir mais quand je vis sa tête qui était normale, sans expression, j'eus un doute. En effet, le puceron géant déposa sa victime et fonça droit vers moi comme un chien surexcité. Il me prit dans sa gueule sans cérémonie et ses dents se mirent à me frotter doucement le corps. Drôle de sensation, on aurait dit la sensation d'une craie qui grince sur un tableau d'école noir, sauf que le tableau c'était moi et la craie les dents du puceron géant. Il me reposa ensuite à terre, hocha la tête comme pour me saluer et s'en alla en gambadant vers sa prochaine victime. Qu'est-ce-qui m'était arrivé alors ? J'éprouvais le contact de ma peau et je notai soudain qu'elle était parfaitement lisse et propre. L'insecte en format géant m'avait nettoyé de toutes saletés. C'était ça notre douche. Ouf. Je regardai autour de moi. Tiens l'autre prisonnier avait disparu. J'étais toujours au milieu des hautes herbes et je me demandai quelle était la suite. Quelle était ma réelle motivation dans cet amas de tiges hautes ? Pour mon bien-être, je dormis.

      Et après ? vous me demanderez. Après il n'y eut rien, je n'entendis même pas l'hélicoptère qui me souleva de terre et qui m'emmena sur le toit de la prison. Enfin si, je l'entendis mais je n'en eus que vaguement conscience, comme si la prison, le puceron géant, les monstres, le mauvais réveil, le cadavre carbonisé n'étaient qu'un rêve. Je volais. Pour une fois je ne fus pas traiter avec brusquerie et je fus simplement réveillé par une lumière aveuglante. Difficilement, laborieusement, j'ouvris les yeux. Après quelques secondes où je voyais tout flou, je pus enfin distinguer une salle d'interrogatoire en carrelage blanc, avec une table - blanche évidemment car tout était pur et angélique ici - et un homme grand et mince, une mallette posée sur les genoux, un léger sourire au coin des lèvres et des lunettes noires rondes. Vu sa position - avancé sur sa chaise- il attendait quelque chose de moi. Je ne lui donnai pas. Il fit une petite moue puis il commença à dire :

      « Bonjour. Bien réveillé ?

      -Est-ce-que c'est vraiment important pour vous finalement ?

      -Oui.

      -Ah, ben oui alors. Disons que là ça va. Par rapport au seau d'eau glacée de ce matin, ça va.

      -Combien d'heures as-tu dormi tu penses ?

      -J'en sais rien, 2.

      -Le double.

      -Ah, quelle importance ?

      -4 heures de repos tu as eu donc.

      -Gloups, et du coup ? Vous allez me faire quoi pour me les faire rattraper, allez-y torturez moi direct au lieu de poser des questions qui ne servent à rien ?! Vous allez me plonger dans un bain d'acide cette fois, m'arracher la peau ou me carboniser comme l'autre gars ?

      -Non je ne ferai pas ça.

      -...

      -Selon vous, qu'avez–vous fait ? Pour vous retrouver en prison j'entends.

      -Rien.

      -Allez, un petit effort de mémoire.

      -Ta gueule.

      -...

      -...

      -Est-ce un serment qui vous tient la bouche, la culpabilité, la honte ou alors le dénis complet de vos propre choix ?

      -J'ai dit...

      -Ta gueule oui ! J'ai entendu aussi, j'ai haussé le ton pour que vous soyez sûr de m'avoir bien entendu de même. Alors, revenons-en au fait. Tu as détourné les chemins de la transition artistique, saccagé un tableau et puis tu confirmes tes actions de délinquant d'autant plus que tu étais dans un village de rebelles complotant contre ton ancien colonel Étienne. Et d'ailleurs c'est un crime aussi ce qui s'est passé avec lui, tu le sais très bien mais heureusement pour toi, le colonel est bon. Il a dit qu'on se chargeait déjà de toi et que tu étais gracié.

VS le tableauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant