Chapitre 18

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Not another Song about Love – Hollywood Ending

Quand elle se réveille ce samedi matin, Gaëlle est déjà partie. Sa sœur lui affirme que la capitaine avait déjà disparu quand elle s'est levé, et elle sait pourtant que Mallory est une sacrée lève tôt.

Contrairement à Gaëlle.

Mais elles n'en parlent pas ; Sand se contentant de l'aider à replier le canapé, et prise d'un élan, propose même de cuisiner des pancakes pour le petit-déjeuner.

Mallory saute de joie.

Pourtant, il y a ce reste de mélancolie qui s'accroche aux iris de Sand quand la plus jeune a le dos tourné. Elle n'a pas beaucoup dormi, retournant ses pensées dans tous les sens alors que les aiguilles de son réveil continuaient à avancer sans un bruit.

Le creux, dessiné dans les draps du lit de Mallory la nargue. Une forme vague qui a laissé des plis le long de ses contours, et la couverture amortie de chaque côté avant qu'elles ne replient le canapé comme si de rien était.

Mallory rit en remuant la pâte épaisse dans la jatte de la cuisine, tandis que Sand défile les chansons sur son téléphone à la recherche d'une bonne playlist. Elle tombe sur un enchaînement très spécifique, typique des musiques de l'île, et, sans savoir pourquoi, décide que ça fera l'affaire.

En silence, elle espère surtout conserver le sourire sur le visage de sa sœur, et le zouk qui sort de son portable semble y contribuer. Elles ne sont pas ici depuis très longtemps, pourtant cette playlist lui semble juste.

C'est la même musique que celle qu'écoutait Gaëlle le soir où elle l'a retrouvé sur le bateau. Sand préfère éviter d'y penser, et se contente de rejoindre sa sœur en se trémoussant.

-Tu danses mal, tête d'andouille, se moque Mallo.

Comme pour prouver ses dires, la plus jeune lâche la jatte et essuie les contours du fouet contre les bords avant de se mettre elle aussi a danser, le bout de l'ustensile utilisé en guise de micro.

Sand éclate de rire. Sa sœur lui jette un regard perçant du bout de ses yeux bleus mais continue son mauvais play-back en montant sur la petite table basse.

-Tu ne vas pas déjeuner de sitôt si tu continue ton show, Mallo, remarque Sand.

Sans prendre la remarque en compte, la blonde termine la chanson et fait tomber la sacoche de la capitaine par terre d'un coup de chaussette décorée de petits nuages. Elle finit à genoux sur la table basse, les bras écartés et la tête renversée en arrière comme le ferait une rock star mondialement connue.

Sand devrait l'engueuler comme le feraient des parents à cheval sur l'éducation et la tenue de leurs enfants, mais à la place, elle applaudit.

-Je t'avais dit que tu pouvais pas rivaliser, rétorque sa petite sœur en revenant dans la cuisine, légèrement essoufflée.

Sand se contente de lui arracher le fouet des mains, recommençant à mélanger la pâte à pancakes avec un sourire. La playlist défile et Mallory fredonne le début de la chanson suivante.

-En effet, confirme moqueusement la plus âgée. Je devrais peut-être songer à t'inscrire dans une carrière de chanteuse.

Mallory lui tire la langue, grimpant pour s'asseoir sur le plan de travail et l'observant sortir une poêle du placard. Face au sourire sarcastique de sa grande sœur, elle croise les bras, les sourcils haussés de défi.

-Tête d'andouille, rétorque-t-elle sur le même ton.

Une bataille de regard débute pendant moins de trente secondes, avant que les deux filles n'éclatent de rire.

-Il y a un garçon avec qui je m'entends bien dans ma classe, raconte Mallory quand l'odeur du petit déjeuner commence a imprégner la pièce. Je me demandais s'il pouvait venir un de ces jours.

Sand ajoute un pancake à la petite pile et hoche la tête.

-Ouais, bien sûr, répond-t-elle distraitement. De toute façon, plus le temps passe et plus cet appart commence à se transformer en auberge. Mais tu le laisse pas rentrer si tu es toute seule, je veux être là.

Mallory masque son grand sourire dans son sweat-shirt blanc.

-Merci ! rayonne-t-elle. Et en plus, tu exagère parce qu'a part Gaëlle, il n'y a personne qui est venu chez nous depuis qu'on est là. Bon, excepté le SAMU, mais c'est normal ça.

Mallory se tait trop tard, se rendant compte que sa phrase anodine a jeté un froid dans la cuisine, sa sœur ayant figé ses mouvements quelque secondes.

-Ouais, répond-t-elle finalement, comme si de rien était. Mais, c'est une collègue de travail, ce n'est pas comme si c'était une nouvelle meilleure amie à toi ou autre chose. C'est plutôt super bizarre comme situation, tu trouves pas ?

Ne voyant pas le problème, Mallo bat des jambes depuis le plan de travail où elle est installée, la tête penchée sur le côté.

-Elle est cool, coupe-t-elle comme si cela justifiait tout. Je l'aime bien.

Sand lève les yeux au ciel sans aucune discrétion.

-Mais tu aimes bien tout le monde, Mallo, rétorque-t-elle. C'est justement le problème. Donne-moi le nom d'une seule personne que tu n'aimes pas !

Mallory hausse les épaules.

-Pourquoi, tu l'aimes pas toi ? demande-t-elle avec suspicion.

Ouvrant le placard pour attraper le sirop d'érable, Sand résiste à l'envie de se taper le front dans la porte coulissante.

-Ce n'est pas ce que j'ai dit ! proteste-t-elle en emmenant l'assiette sur la table basse désormais vidée de son bazar. Je suis contente que tu ait apprécié ta soirée avec elle, okay ?

Sa sœur trotte derrière elle comme un âne à la poursuite de sa carotte, et s'installe sur le canapé en se servant dans l'assiette de pancakes chauds.

-Pas obligé de t'énerver, répond-t-elle la bouche pleine. Ch'est pas grave.

Le canapé rebondit un peu quand la jeune femme se laisse tomber à côté d'elle, mais au lieu de protester, Sand se sert elle aussi dans le petit-déjeuner. Quelque part sur le comptoir de la cuisine, la musique se coupe quand son téléphone vibre à la réception d'un message.

Elle s'en occupera plus tard.

-Bon, qu'est-ce que tu as envie de faire cette après-midi ? reprend Sand en se tournant vers sa sœur.

Léchant sa cuillère, Mallory joue avec le tissu éliminé de sa chaussette bleue, réfléchissant à la question.

La musique se coupe complétement cette fois, et le téléphone de Sand se remet à vibrer comme un fou, avançant le long du comptoir à chaque vibration, prêt à tomber.

Sand se lève en soupirant et attrape l'objet en question, allumant l'écran.

Le premier message date de quelque minutes et a été envoyé par Aurélien. Elle ne comprend pas tout à fait où il veut en venir quand elle lit les quelque mots qui lui sont destinés.

Aurélien

Envoyé à 08 : 52

« Besoin de toi pour t'assurer que cette andouille ne fasse pas de connerie ! »

Mais au vu de l'appel qui continue de faire vibrer son téléphone, Sand commence à avoir une petite idée de qui il parle. Son doigt appuie sur le bouton vert en dessous du nom Gaëlle Crivelli qui clignote sur l'écran, et elle pose le portable contre son oreille.

-Allô, est-ce que...

-Je te jure que je vais me faire ce bâtard, la coupe son interlocutrice en criant de fureur. Je vais me le faire putain !

Et si c'était elle ?  -    [Romance Lesbienne]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant