Chapitre 19 Héna

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Les pieds dans l'eau nous marchons l'un à côté de l'autre. Je regarde mes pieds avancer dans l'eau claire, mes chaussures à la main. Et lui regarde droit devant les mains dans les poches. Je ne peux m'empêcher de le trouver courageux, l'image que j'avais de lui à complètement changé.

- Puis-je te poser des questions quand même ? Me demande-t-il soudainement.

- Oui.

Ses longs cils blond et intense brille avec le soleil quand il pose son regard sur moi :

- Tu vis avec ton père depuis longtemps ici ?

Je baisse la tête, et sourit bêtement.

- Non. Je ne vis ici que depuis mes huit ans.

Ses pupilles me transpercent alors que je n'ose le regarder. Il vient de faire le lien. Je suis venu vivre avec mon père quand j'ai perdu ma mère.

- Et avant tes huit ans tu ne voyais pas ton père ?

Il avait dit une question... Mon regard se fixe au loin, en me souvenant des heures passées dans la voiture afin d'avoir une famille autour de moi. A l'aller je laissais mon frère et ma mère un peu triste puis au retour c'était mon père qui avait la gorge noué. La durée sans se voir était juste plus longue pour mon père que pour ma mère.

- Je ne voyais mon père qu'un week-end sur deux.

J'avais ma mère, mais j'étais trop souvent loin de mon père. Pourtant il n'avait jamais revendiqué sa garde. Il avait tout laissé à ma mère pour que je sois heureuse. Mais il n'était pas là. Et une petite fille a autant besoin d'un père que d'une mère. A cette pensée, la petite Juliette passe dans mon esprit. Elle, elle n' ni l'un, ni l'autre.

- Et toi ? Ton père a refait sa vie ? Demande-je.

Je n'ose pas demander pour sa mère, je ne sais pas si elle a la possibilité de faire ça en étant interne dans un hôpital.

- Il a essayé de refaire un gosse avec sa maîtresse, en vain. Je crois qu'ils ont adopté un enfant avant même que je sois émancipé. Il doit avoir onze ans maintenant quelque chose comme ça...

Je compte les années comme s' il pouvait revenir. J'aurais dû fêter ses onze ans avec lui cette année. A mes seize ans je me suis prise une grosse claque dans la tête, et toute l'année qui suivit me torturait. J'avais passé huit années de ma vie avec ma mère, et huit autres sans elle. Ce jour-là j'avais laissé paraître que tout allait bien, mais au fond je voulais juste courir dans ma chambre et pleurer ma mère. J'aurais tellement voulu que la vie se passe autrement, et je le désire encore plus que tout.

- Héna tout va bien ? M'interroge-t-il alors que je suis au fin fond de mes pensées.

- Quoi ? Oui oui.

- Héna... Tu pleures...

J'essuie les larmes qui s'échappe en roulant sur ma joue d'un revers de la main, je ne m'en suis même pas rendu compte :

- Oui, c'est juste que... C'est l'âge qu'aurait eu Nylon, s' il était encore là, ou même sans être là. Enfin il aurait dû avoir onze-ans aussi. Désolé ! C'est que c'est un sujet sensible et je... J'ai du mal...

Son regard est sur moi alors que mes larmes coulent sans s'arrêter. Pourquoi diable je pleure maintenant ? Qu'est ce que je déteste ce sentiment. Mon ventre est tout serré et je ressens cette pression dans ma gorge qui me menace. Il me scrute et pourtant alors que je ferme les yeux pour reprendre le contrôle de mes émotions, je sens ses bras entourer mes jambes. Il me balance sur son épaule comme un vulgaire sac à patates. Il trottine, comme si j'avais le poid d'une plume et me lâche d'un seul coup. Je suis sur les fesses avec de l'eau jusqu'aux genoux. Je m'apprête à m'énerver contre lui, mais il vient se placer à côté de moi dans la mer. J'arque une sourcils :

Nous deux à travers la véritéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant