Chapitre 47 Héna

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 Mon père est rentré à la maison, je le sais car je l'entends discuter avec Jane. Sont-ils en train de parler de ma réussite, de ma victoire ? Après une dizaine de minutes, j'entends les marches de l'escalier craquer, puis sans avoir le temps de calculer quoique ce soit mon père rentre dans ma chambre. Il ne passe pas vraiment le seuil, il prend le temps de m'observer avec une étincelle étrange dans son regard. J'ai l'impression d'y lire une certaine fierté mais au fond j'y aperçois aussi un éclat de regret. Fais moi confiance papa. Il finit par rentrer la tête basse, une pile de manuels sous le bras. Qu'est-ce donc ? Je ferme mon roman, mais reste assise sur mon lit. Il lâche dans un retentissement les manuels sur la surface de mon bureau. Je parviens à lire sur la tranches de certains Avoir mon bac à la maison. Je relève les yeux vers mon père, surprise de découvrir son application. Honnêtement je trouve cela ridicule.

- A la fin de semaine on te fera un test sur dix chapitres de ton choix, si tu n'as pas au moins douze sur vingt tu seras privé de sorties la semaine d'après.

Il m'annonce ça tel un cheveu sur la soupe. Suis-je surprise ? Non. Connaissant un minimum mon père, je devais m'y attendre. Et en vérité tant que je n'aurais pas loupé un de leurs fameux tests je ne vois pas sur quoi je pourrais râler. C'est bien la première fois qu'ils s'inquiètent autant pour une petite chose me concernant.

- Ok, avoue-je.

Et mon père semble un peu déconcerté par ma capitulation, mais je ne lis ce sentiment sur son visage qu'une fraction de seconde avant qu'il ne se ressaisisse. Sur lesquels, il sort de ma chambre sans un mot.

Je me lève et vais en direction de mon bureau pour voir d'un peu plus près le contenu de ces bouquins scolaires. Qui a eu le génie de se dire qu'il fallait écrire des manuels scolaires pour les déscolarisés, et surtout qu'ils auront leur bac avec juste ça ? Heureusement pour moi j'ai pris les choses en main, avec des cours en lignes et pas juste ces foutues manuels. Mais bon si ça peut les rassurer tant mieux.

Mon réveil sonne alors que le jour se lève à peine, il est six heures du matin. J'avoue que pour aller au lycée je me levais plus tard, mais bon c'est dans le contrats donc je ne vais pas déjà commencer à regretter mes premiers pas dans la vie d'adultes. Je m'habille en vitesse, mes parents ne sont même pas encore levés que je descends dans le garage pour m'emparer de mon vélo et aller à mon premier jour de boulot !

Le soleil à déjà bien pointé le bout de son nez alors que je parcours la rue dans le silence le plus apaisant qu'il soit. J'arrive devant le magasin il est sept heures moins dix. Je m'approche du volet de sécurité et cherche un pot de fleurs que m'a décrit Nicole pour y trouver la clef. C'est une vieille méthode peu sécurisante, mais bon c'est Nicole. J'aurais beau lui conseiller autre chose, elle garde ses vieilles méthodes bien au chaud dans son cœur.

Une fois la clef en main je laisse coulisser le volet métallique vers le haut, et une fois face à la devanture du café j'y trouve un sentiment de fierté et de satisfaction. J'ai dix-sept ans, bientôt dix-huit et j'ouvre seule cette devanture de café qui certe ne m'appartient pas, mais qui deviendra un petit morceau de ma propre route.

- Bonjour !

Quelqu'un derrière moi toussote, je me retourne et découvre un vieux monsieur aux cheveux grésillants, tout souriant. Alors, je lui rends moi aussi un beau sourire, contente d'accueillir mon premier vrai client.

- C'est donc toi la petite gamine dont m'a parlé Nicole hier soir. Ravi de faire ta connaissance petite.

Je regarde ce gentil monsieur, c'est à ce moment précis que je sus que j'avais bien fait de tenir tête à mon père. Me retrouver ici pour faire quelque chose qui avait du sens à mes yeux était la meilleure décision de l'année. Je n'avais plus peur de me planter.

Nous deux à travers la véritéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant