le Magisteril et les anneaux de feu

CHAPITRE 28 : à la vie - et surtout - à la mort

Après avoir installé de petits abris pour nos nouveaux compagnons dans notre dortoir, Maude et moi retournâmes à l'arène, voulant profiter de notre ticket d'or au maximum, tandis que Kyliane alla rendre visite à Tina, qui devait sortir demain. 

Nous passâmes une fois de plus devant les satyres en leur montrant notre ticket plaqué or, et descendirent les marches des escaliers.

- Êtes-vous certain de vos accusations ? Ce genre de propos ne peut être avancé sans preuves tangibles, résonna soudain une voix féminine, pleine d'autorité et de gravité.

Avant que je ne comprenne ce qu'il se passait, Maude, qui marchait devant moi, me plaqua vivement contre le mur du couloir. Sa main recouvrit ma bouche pour étouffer mon cri de surprise. Lentement, elle retira sa paume avant de poser un doigt sur ses lèvres, exigeant le silence.

J'acquiesçai d'un hochement de tête et me rapprochai à pas feutrés pour mieux entendre la conversation.

- Croyez-vous que je me serais déplacé personnellement si la situation n'était pas d'une gravité exceptionnelle, Eleanor ? répliqua une voix grave, empreinte de colère contenue, que je reconnus presque immédiatement.

- Eleanor Adams, murmura Maude, à peine audible. L'épouse d'Ernest Adams. Ce sont tous deux d'anciens combattants, ensemble, ils forment le couple le plus influent du royaume.

Une image vague me revint en mémoire : celle d'un couple âgé, installé à la table d'honneur des invités prestigieux.

- Et l'autre voix... poursuivit Maude, de cette même voix à peine perceptible.

- C'est le père d'Aloïs, coupai-je.

La fille me gratifia d'un regard grave, et hocha de la tête pour affirmer mes propos.

- Que comptez-vous faire, à présent ? poursuivit Eleanor, sa voix trahissant une inquiétude mal dissimulée.

- Je ne peux rien révéler ici. Ce lieu n'est pas sûr, et l'ampleur de la situation exige la plus grande prudence, répliqua sèchement le Chancelier Mage.

- Vous croyez sérieusement qu'un étudiant pourrait être impliqué dans cette affaire ? répondit-elle, abasourdie.

J'entendis ses talons claquer au sol, et compris qu'elle désignait la salle derrière elle, à gauche. À travers la vitre teintée et insonorisée, je vis Brice et Jude, hurlant à pleins poumons, accompagnés de Piper et Rachel, qui grignotaient du popcorn. De quoi les accusait-elle exactement ?

- Je vous l'ai dit, insista le Chancelier Mage, d'un ton tranchant. Je ne peux pas en dire davantage ici. Chaque mot prononcé dans ce lieu peut être un risque que nous ne pouvons nous permettre.

Soudain, un frisson parcourut ma colonne vertébrale alors que je sentais quelque chose grimper le long de mon dos. Consciente que le moindre bruit pouvait être fatal, je retins ma respiration, redoutant ce qui se cachait derrière moi. Je vis alors Ange sortir discrètement de mon tee-shirt, un petit sourire aux lèvres. Ma tension se dissipa instantanément. Mais alors que je commençais à me détendre, le petit démon - ainsi aurais-je dû l'appeler  - bondit hors de mon vêtement pour s'agripper aux cheveux de Maude, devant moi.

Elle ne sembla pas remarquer sa présence. Je tentai de l'alerter, mais elle était trop absorbée par la conversation. Ce n'est que lorsqu'elle sentit mes tapotements qu'elle se retourna brusquement. Ce geste projeta violemment ses cheveux en arrière, et dans un mouvement presque ralenti, je vis mon compagnon se détacher de sa chevelure et voltiger dans les airs.