« Le problème, quand on déborde d'imagination, c'est qu'on déborde aussi d'illusions »
- unknown
J'éliminai mon stress par la musique, depuis toujours. Et cette soirée pour Thanksgiving me filait les chocottes. Que Arsène et Noah passent me prendre m'angoissait aussi plus que la normale. Il n'y avait pourtant aucunes raisons, mais je sentais que je perdais, petit à petit, le contrôle de mes sentiments. Ils s'éparpillaient, s'étalaient dans tous les sens, et j'étais bien trop occupée à m'entrainer et à détester Juliette pour y faire pleinement attention.
À mesure que mon archer glissait sur les cordes du violoncelle, mes pensées se volatilisèrent. Au bout de quelques minutes, j'entendis la sonnette retentir par-dessus les notes de l'instrument. Essuyant mes mains moites sur ma jupe noire, je replaçai soigneusement mon archer avant d'aller ouvrir la porte.
Dans l'encadrement de celle-ci se tenaient Noah et Arsène, qui patientaient tranquillement. Leurs différences me sautèrent aux yeux. Je n'y prêtais pas beaucoup attention d'habitude, même s'il était particulièrement amusant que le garçon le plus craint de la promo s'entende si bien avec le plus aimé. Noah, dans son jean baggy et son t-shirt de street art, les boucles blondes de ses cheveux tout juste coiffées, m'offrit un sourire étincelant alors qu'Arsène, stoïque dans son pantalon beige pâle, cintré à la taille, et son imperméable crème, étira à peine un coin de sa bouche.
- C'est toi qu'on a entendu jouer ? Demanda Noah d'entrée de jeu.
- Oui.
- Musicienne en plus de danseuse ? Dis-moi, jolie Rubis, tu nous caches encore beaucoup de choses ?
Il avait vraiment l'air impressionné, ça me fit presque rire. Cette facilité qu'il avait à détendre l'atmosphère et à mettre les autres à l'aise m'épaterait toujours.
- Tout dépend, rétorquai-je en esquissant un demi sourire.
On se mit en route dès que j'eus fermé à clé. Noah continua de poser des questions, comme il en avait l'habitude.
- Contrebasse ou violoncelle ?
- Violoncelle, répondit instantanément Arsène, à ma surprise autant qu'à celle de Noah. Ça s'entend, tenta-t-il de se justifier en évitant nos regards.
Avait-il réellement une oreille aussi fine ?
- Tu devrais jouer plus souvent, rebondit Noah, c'était très beau.
- Je te ferai payer la prestation, rétorquai-je, m'accrochant à son bras pour me stabiliser.
Les pavés glissaient légèrement ce soir, humidité oblige, et je me voyais déjà tomber dans la rue alors que nous n'avions même pas atteint le restaurant. Roxanne avait planifié la soirée dans un restaurant du premier arrondissement, tout près de la rue où se trouvait mon appartement. Et je n'avais clairement pas anticipé le fait que je n'avais pas des chaussures adaptées aux conditions météorologiques.
- En intérêt ou en nature ? Renchérit Noah en soulevant un sourcil interrogatif.
Ce sous-entendu me fit doucement rire, Noah sautait toujours à pieds joints dans le second degré, et j'adorai ça.
- Ça reste à déterminer.
Son rire explosa dans la ruelle, Arsène en roula des yeux.
- Tu ris trop fort, lui reprocha-t-il, les yeux pourtant fixés devant lui.
Je tenais toujours le bras de Noah, mais ça ne m'empêcha pas de le voir donner un coup de coude à Arsène.
- Je ne pense pas que ça dérange qui que ce soit, nota-t-il ensuite d'un ton léger.
VOUS LISEZ
l'Opéra : le lac des cygnes (Terminé)
RomanceRubis se démène pour devenir la meilleure étoile de tous les temps ; difficile quand sa mère est déjà considérée comme telle. Plongée dans l'univers cruel et sans pitié du ballet, Rubis sait à quoi s'en tenir lorsqu'elle entame sa dernière année à l...