Chapitre 31

71 6 0
                                    


« Le silence est plus lourd à porter que la révélation »

- Fabrice Humbert

Les répétitions avec Adam frôlaient chaque jour un peu plus le désastre, et rien ne pouvait me faire décolérer de la manière dont j'avais obtenu mon rôle. Je n'arrivais même plus à être effrayée sur scène, je transpirai la rage à chaque mouvement. Ivanovich passait son temps à me reprendre, à pester dans sa barbe, et à demander à Arsène si sa cheville allait mieux. Parce que, oui, il assistait à toutes nos répétitions. Il n'était pas suffisant que j'ai envie de l'étriper à chaque fois que je posais les yeux sur lui, il fallait en plus que je supporte le poids de son regard pendant des heures ! Le pire ? Ce petit sourire en coin qui ne le quittait pas quand il voyait que mon duo avec Adam ne tenait pas la route.

Noah voyait les choses différemment. À la fin de cet énième désastre, il m'accompagna jusque la loge que me prêtait l'Opéra pour que j'entrepose mon costume.

- Rubis, mon coeur, tu sais que je t'adore, mais si tu pouvais au moins faire un petit effort pour avoir l'air amoureuse, ça arrangerait les affaires de tout le monde.

- Tu critiques mon jeu d'acteur ?

Il grimaça, se grattant l'arrière de la nuque avec ce regard contrit que je reconnaissais pour un mélange de moquerie voilée et de réelle inquiétude.

- Tu n'as aucun jeu d'acteur. Comparé à ce que c'était avec Arsène.

Incomparable. Adam et Arsène étaient diamétralement opposés. Et personne ne ravivait des émotions aussi brutes que la fureur ou l'amour comme Arsène le faisait. Et en ce moment, c'était plutôt la rage. Si Juliette ne m'avait pas dit que j'avais eu mon rôle à cause de lui, il aurait tu cette information indéfiniment. Je ne le digérai pas.

- Au moins ce n'est pas un menteur.

- Rubis...

- Ne le défend pas. Ça ne sert à rien.

- Ok. Je ne dirais rien. À demain, mon coeur.

Il embrassa ma joue avant de quitter l'Opéra. Je pris mon temps pour retirer mon costume dans ma loge, et me changer avant de rentrer. Deux semaines avant la représentation, deux semaines et l'interprétation du personnage ne me venait toujours pas naturellement, surtout pas avec Adam.

Je sortis des vestiaires la tête dans les nuages, et je manquais de percuter Arsène de plein fouet. Je ne pensais pas le confronter si tôt après notre horrible dispute. Je ne savais même pas si j'en avais envie, ou si ça en valait la peine. Être amoureuse d'un garçon capable de me mentir sans arrière pensée laissait un amer goût de déception dans ma bouche.

- Mais qu'est-ce que...

Oh. Ohhh. Mon coeur s'emballa stupidement à sa vue.

- Il est tant qu'on discute.

- Un autre jour.

- Rubis, insista Arsène en attrapant mon coude alors que j'allais partir. J'ai une réservation pour 20h30 que je compte bien honorer, je ne repartirai pas avec mes fleurs, et certainement pas tant que nous n'aurons pas discuter ensemble, comme deux adultes.

Mes yeux tombèrent sur l'énorme bouquet de roses rouges qu'il tenait à la main, puis remontèrent jusqu'à ses deux iris mordorées. Je me doutais bien qu'il ne portait pas un costume noir avec chaussures en cuir cirées juste pour faire beau.

- Par rapport à quoi ? Ton mensonge ? Le fait que je ne sache toujours pas pourquoi tu avais toutes ces bouteilles d'alcool chez toi ? Ou tes sentiments, peut-être ?

l'Opéra : le lac des cygnes (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant