Chapitre 22

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« Ne pas agir, c'est encore agir »

- Jean Paul SARTRE

À l'instant où je franchis les portes du hall, je fus recouverte de liquide rouge des pieds à la tête. J'eus un hoquet de surprise avant de me rendre compte que l'odeur qui imprégnait mes vêtements sentait étonnamment mauvais, un peu comme de la rouille. Et ça avait la couleur du sang.

- Fais un sourire, Rubis !

Juliette me prit en photo, riant à coeur ouvert, alors que la bonne moitié des élèves de l'école me voyait, aspergée et dégoulinante de sang au milieu du hall.

Mon coeur s'emballa, à la fois à cause de l'angoisse causée par la situation et de la colère monstrueuse que je ressentis à l'égard de Juliette. J'aperçus un éclair de cheveux sombres à l'étage supérieur, probablement l'acolyte de Juliette.

- Si tu veux tout savoir, renchérit-elle en reniflant comme un cochon, je crois que c'est du sang de porc.

Les larmes menaçaient de couler, de frustration, de rage, de détresse. Je voulais que ça cesse.

- Écartez-vous, s'écria une voix qui m'était un peu familière. Vous n'avez pas l'impression de perdre votre temps, allez en cours !

J'aperçus Jasmine alors que j'essayai de retirer mon sac, imbibé lui aussi de sang.

- Tu es fière de toi ? Lança-t-elle à Juliette, les poings sur les hanches.

- Je ne vois pas de quoi tu parles.

- Rubis ! Mon Dieu, mais qu'est-ce que...

Noah s'arrêta au milieu de sa phrase puis jeta un oeil au visage impassible de Juliette.

- Disparais, lui dit-il sur un ton d'une extrême froideur.

- Il ne faut pas le prendre comme ça, soupira Juliette en roulant des yeux. Elle n'est pas morte non plus.

J'avais envie d'arracher cet air dédaigneux de son visage. Les traits de Noah se figèrent de colère lorsqu'il s'approcha de Juliette.

- Tais-toi, gronda-t-il entre ses dents. Je jure que si tu dis un mot de plus, je vais te réduire en pièces. Tu profites de toutes les occasions possibles pour t'en prendre à elle parce que tu es jalouse, terriblement jalouse, et tu sais ce que ça fait de toi, Juliette ? Une pathétique petite garce.

La bouche de Juliette forma un O de surprise avant qu'elle ne la referme, visiblement incapable de savoir quoi dire.

- Viens, me dit gentiment Noah en attrapant mon poignet.

- Emmenons-là dans les douches, ajouta Jasmine en ouvrant la voie, laissant une Juliette bouillante de rage et totalement muette derrière elle.

Noah me prit la main, et il me serra contre lui sans un regard aux tâches qui maculeraient bientôt ses vêtements. La vision brouillée par le sang et l'anxiété, j'étais à peine consciente des mouvements autour de moi, des téléphones braqués sur mon visage lors de mon passage dans les couloirs. J'aurais aimé disparaitre.

J'aimerais qu'Arsène soit là.

Jasmine nous enferma dans les vestiaires et me tira immédiatement dans les douches, mais je percevais encore les rires et tous ces regards... Tous ces regards braqués sur moi, toutes ces photos qui devaient déjà circuler... L'humiliation rampait sur ma peau, elle s'insufflait dans mes pores, je la sentais partout, absolument partout, et ça me terrifiait.

l'Opéra : le lac des cygnes (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant