1

429 10 14
                                    

KAREN

Je ne suis pas encore totalement réveillée, toujours dans les vapes. Au début je pense que c'est à cause de mon état que j'ai l'impression de sentir une secousse, du coup je n'y fais pas attention. Jusqu'à ce que j'en sente une autre. Puis encore une incessante. Et voilà qu'en plus je me mets à entendre des voix. Non une voix, mais je suis dans l'incapacité de décrypter ce qu'elle dit.

« Karen, Karen, réveille toi tu vas être en retard ! », c'est ma mère.

Je me tourne dans mon lit du coté opposé à elle pour savourer encore quelques instants mon sommeil.

Mais laisse moi dormir en paix !

« Je crois qu'on devrait lui verser de l'eau au visage ».

Matt qui apparaît subitement dans ma chambre.

À ces mots, je réagis :

- Je te signale que c'est déconseillé de verser de l'eau à quelqu'un qui est en train de dormir, je prends cette voix qu'utilise ma mère quand elle veut me faire la leçon.

Je me lève en ignorant le regard amusé que me jette mon frère, c'est dans ces moments là que je le déteste. Non mais à qui je mens ? En fait je l'adore. Mon frère et moi sommes très complices. Et nous le sommes depuis toujours. Nous avons une relation très fusionnelle et il est une des seules personnes qui me forcent à croire que la vie n'est pas totalement merdique.

Bon d'accord, je ne suis pas quelqu'un de très joyeux, je l'admets. Mais je ne suis pas non plus de ceux qui traînent dans les cimetières la nuit. Disons juste que je suis réaliste, c'est vrai je ne m'attends jamais à grand chose. Ça ne sert à rien après tout, lorsqu'on voit tout ce qui arrive aux gens tous les jours dans ce monde. Vous me direz que je suis un peu hypocrite de dire ça sachant qu'il ne m'est jamais rien arrivé de dramatique. Je sais, je n'ai jamais été prise en otage, je n'ai jamais été kidnappée, je n'ai même jamais vécu une rupture amoureuse. Mais le fait est que jamais rien n'arrive comme on l'espère, et ça je le sais.

Je finis par me diriger dans la salle de bain afin d'évaluer dans le miroir les dégâts du fait de m'être réveillée tard. Je me tripote le visage, décidément aujourd'hui ne sera pas mon jour : j'ai des cernes au bas de mes yeux, le regard fatigué et une haleine à faire peur, sans parler de mes cheveux qui ressemblent à un nid d'oiseaux.

Désespérée, j'entre dans la douche. L'eau chaude détend mes muscles, et je m'autorise à y rester quelques instants encore. Les cours reprennent et j'ai besoin de me détendre. Mais les coups insistants de mon frère sur la porte me font réagir et je me décide à sortir.

Comme chaque matin, j'ai de la peine à me coiffer. Je suis métisse, et mes cheveux me donnent du fil à retordre. Je ne me casse pas la tête plus longtemps et décide de les attacher en un chignon. Je n'apporte pas plus d'importance à l'aspect qu'à ce chignon et j'enfile mes vêtements : généralement un large t-shirt et un jean suivi de mes inséparables converses noires. Je ne me maquille pas, je ne me maquille jamais.

Je prends mon sac et je vais dans la cuisine. J'attrape le paquet de muesli au chocolat dans le placard, mais j'ai à peine le temps de dire "Ouf" que mon père m'informe que nous devons y aller, comme s'il avait choisi ce moment exprès.

- Quoi ?! Je n'ai même pas pris mon petit déjeuner !

- Fallait y penser avant de prendre tout ton temps pour te préparer, lance Matt.

Je lui fais une grimace, et il rit de moi.

Matt est plus âgé que moi de trois ans. Il est en troisième année d'université en commerce, mais fait actuellement un stage depuis septembre ce qui explique sa présence ici, et j'en suis ravie. Voir mon frère deux fois par an n'est vraiment pas terrible, et je me demande encore comment je vais faire quand il aura terminé son année ici car c'est lui mon pilier.

- Matt, laisse ta sœur tranquille, Kim apparaît dans un T-shirt de mon frère.

Bien que mon frère soit assez bel homme, il n'aime qu'une seule fille, sa copine Kim.

Apparemment il n'y a que moi que ça choque encore de la voir habiller avec rien d'autre qu'un t-shirt.

C'est une fille vraiment adorable avec qui il sort depuis à peu près deux ans et qui l'a carrément suivie ici pour faire son propre stage à ses côtés. En plus d'être adorable, avec ses yeux verts et ses longs cheveux ondulés, elle est splendide. Mes complexes resurgissent à chaque fois que je la regarde.

- Voilà, solidarité féminine ! je m'exclame.

Je m'installe dans la voiture de mon père. Je suis contrariée, j'ai déjà faim et mon estomac n'est pas prêt à endurer quatre heures de cours avant le repas. Et pour couronner le tout, j'ai oublié mon agenda.

Je descends à toute vitesse avant que la voiture ne démarre et me précipite pour aller chercher cet agenda dans ma chambre. Quand je reviens, mon père me foudroie du regard et je détourne le mien. De toute façon je sais déjà ce qu'il va me dire : « Karen, tu mets tout le monde en retard là ! Ça ne te suffit pas de mettre 2 heures à te préparer, il faut aussi que tu ailles chercher je ne sais quoi à la dernière minute alors que je t'ai dit une centaine de fois de préparer tes affaires la veille ! » sauf que j'ai préparé mes affaires la veille, j'ai juste oublié... l'agenda.

Nous parcourons les cinq minutes de trajet qui nous séparent du lycée. Il pleut à grosses gouttes. Génial ! Un petit embouteillage se crée dans la rue pavée qui nous mène à l'établissement, comme tous les matins. Mon père fini par se garer, j'ouvre mon parapluie en sortant, lui dis au revoir, et m'engouffre dans la masse d'élève qui se trouve déjà sous le préau pour se protéger de la pluie.

Je regarde autour de moi en essayant tant bien que mal de repérer mes amis malgré toutes ces personnes qui m'entourent. Alexia, Alexia, Alexia... Ah, la voilà ! Je lui fais signe, elle m'aperçoit et me rejoint. C'est à ce moment que la sonnerie retentit signe que nous devons rejoindre nos classes respectives.

Nous avons en premier cours de français, l'un des seuls cours que je trouve supportable. Je m'installe à côté d'Alexia. Elle me raconte alors ses vacances dans les Iles : la plage, le soleil, les vagues.. Elle ajoute aussi comment Yves - son petit-ami qui vit à trois heures d'ici - l'appelait sans cesse parce qu'il était jaloux du nombre de garçons qui auraient pu s'intéresser à elle. Je ris. Je ne peux pas le contredire puisque Alexia est superbe, avec ses longs cheveux châtains, sa peau mate et ses grands yeux verts, difficile de lui résister. Elle a collectionné de nombreux mecs, mais disons que Yves est celui qu'elle aime le plus à ce jour puisque c'est avec lui qu'elle est restée le plus longtemps. Alors que moi je suis en dernière année de lycée et mon expérience amoureuse n'a même pas encore commencée.

On peut donc affirmer que ce cours n'a en aucun cas servi à l'enrichissement de nos connaissances.

Nous avons ensuite cours de maths avec notre professeur principal, Monsieur Becker. Alexia s'assoit à côté de Bruno qui le lui demande. Bruno est ce meilleur ami dont la présence est indispensable, d'après ce que me dit Alexia. Il est sa version masculine. Pour moi, c'est juste un ami. J'ai du mal à faire confiance au gens, Alexia me l'a souvent reproché. Mais elle et mon frère sont les seules personnes à qui je peux parler et ce n'est pas ma faute si j'ai du mal avec d'autres.

Ce n'est pas grave, disons que les maths c'est mon point faible, j'ai donc l'obligation d'être totalement concentrée, d'après mon père.

Alors que les difficultés dont je suis victime depuis la quatrième réapparaissent petit à petit, on frappe à la porte. C'est un des surveillants qui vient pour je ne sais quoi. Il parle quelques secondes à l'oreille de Monsieur Becker, qui regarde un instant à l'extérieur. Il retourne son attention vers le surveillant. Celui-ci hoche la tête de temps à autres, ainsi de suite jusqu'à n'en plus finir. J'en ai marre de ce petit manège alors je me remets à mes exercices. Ce n'est seulement lorsque j'entends des exclamations féminines que je lève la tête.

Un garçon terriblement beau se tient devant nous.

____________________________________________________________

Voilà ! N'hésitez pas à commenter surtout. J'aimerais beaucoup savoir ce que vous en pensez :)

LiensOù les histoires vivent. Découvrez maintenant