20.Retour

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J'entendis un bruit aigu sur la droite. Une voix qui criait des propos incompréhensibles. Surtout parce qu'ils étaient étouffés par une personne qui crachait ses poumons, quelque part sur ma gauche, pas très loin.

J'avais encore la tête qui tournait. Et ce n'était pas seulement le chlore. J'avais atterri je ne sais comment sur mon séant, trempé·e et frigorifié·e. Ce fut le vernis fuchsia sur mes ongles de pieds qui me ramena au présent. J'avais vraiment dû manquer sérieusement d'air pour être à ce point dans les vapes. Le bourdonnement dans mes oreilles diminua d'intensité et je pus enfin comprendre ce qu'on me disait, et surtout qui me parlait.

«—Tu l'as fait, Miss! Bravo, c'était magistrale!
—Merci, Tim, mais c'est loin d'être fini. Attends, ou sont passé les zombies?»

Ma vision était encore un peu floue, mais pas assez pour me rendre compte de l'absence assez soudaine et inexpliquée d'antagonistes présents quelques minutes auparavant.

«—Ils t'ont suivi·e dans la piscine.»

Tim pointa son bras en direction du bloc de résine translucide qu'était devenue l'eau de la piscine. On voyait distinctement les formes noires gigoter dans leur gangue, tels des poissons dans leur panure. Cette vision ne me rassura pas pour autant.

«—Comment on va faire, Tim? J'arriverai jamais à réparer ce merdier!»

Des bruits de pas mouillés en provenance de ma gauche s'intensifièrent.

«—Euh tu vas bien?»

C'était Max. Je l'avais complètement oublié. Il ressemblait à petit rat tout mouillé, la voix rauque, le souffle court et sans lunettes.

«—Ouais, ça peut aller. Tu devrais t'asseoir et récupérer. »

Toi, au moins, t'as plus à t'en faire.

«—Tu vas rire, mais je jurerai avoir entendu le nounours parler.
—Ce sera sans doute pas le truc le plus bizarre que tu auras vu aujourd'hui.»

Je repliai mes jambes contre moi, les bras autour. Un peu contre le froid, un peu par détresse.

Max se pencha et étala une serviette sur mes épaules, avant de s'asseoir à côté de moi, l'air perdu.

«—Merci, c'était classe comme sauvetage.»

Le regard bloqué sur la piscine et le cratère que j'avais laissé dans l'eau durcie me donnait envie de pleurer. Non, pas que ça en fait. Tout le reste. A quel point tout ça était de ma faute?

«—Ecoute, hum, j't'ai entendu·e et je crois que tu vas y arriver, t'sais... A réparer tout ça. J'ai confiance.
—Ah bon? Et c'est ça qui va m'aider? Hein? Toi? Le nounours?»

Le pauvre n'y était pour rien, mais là, il fallait que ça sorte. Et il allait tout prendre dans la poire.

«—Je reconnais ce nounours. Il est dur à oublier, c'est celui de mon pote Raphaël. Je ne sais pas quel lien tu as avec lui, mais tu le connais. Si tu peux l'aider lui aussi à s'en sortir, ce serait cool. Et peut être qu'à nous trois, on finira bien par trouver un truc. Non?»

Il me sourit, un peu bêtement mais avec une certaine chaleur que je ne lui connaissais pas. Même un peu niais, son discours me fit du bien au moral. Je m'essuyais les yeux avant de resserrer la serviette autour de mes épaules.

Comme une fille! [achevé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant