27.Rivalité

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Une femme plutôt jeune arrivait droit sur nous, la tête haute, la démarche conquérante. Elle avait les cheveux blond polaire, longs, sales et emmêlés qui tombaient sur son visage émacié. Elle était vêtue de haillons qui laissaient voir une musculature puissante, des abdos quadrillés, des biceps saillants. Au fur et à mesure qu'elle avançait, dans son sillage la suivait de plus en plus de clients, qui semblaient bien patraques.

«—C'est quoi ce délire? Je savais que le THC pouvait agir longtemps après, mais là, je me sens même pas défoncée. Il fait tout gris, mon frère se transforme en nana costumée et une autre débarque façon Mad Max. Si j'avais su, j'aurais tiré quelques lattes de plus...
—Stella, faut que tu partes te mettre à l'abri. C'est pas du tout une animation, ce sont de gros ennuis qui arrivent.»

Revenue de sa surprise initiale, elle m'annonçait ça à l'arrache. Le plus simple était de faire comme si je n'avait rien entendu. Un bref coup d'œil vers l'extérieur m'apprit que la stase s'était activée dans tout le centre commercial. 

«—Bon euh, c'est du sérieux, faut vraiment que tu barres. C'est pas une tendre et je pense qu'elle en a sous la pédale.»

Tim choisit ce moment pour appuyer mes dires, en sortant de mon sac.

«—Elle a raison, il faut que tu fuis!
—Alors là, c'est trop fort. Perchée ou pas, j'crois bien que plus jamais de ma vie j'dormirai avec une peluche.
—Oh, allez, on s'barre!»

J'attrapai Stella par le poignet pour l'éloigner de la nouvelle arrivante qui ne semblait pas animée des meilleures intentions du monde. Sans doute un rapport avec la manière dont elle nous regardait, en plus de sa tête de brute et de son sourire particulièrement agressif. Les dents pointues provoquaient en général cet effet.

«—Tu peux courir, "Miss", mais tu n'iras pas loin. Tu es piégé·e ici avec moi et... Cette délicieuse créature.»

Elle posa ses yeux blanchâtres et globuleux sur Stella, en passant une langue pointue et segmentée sur ses lèvres étirées en rictus.

«—Je crois que je suis en plein bad trip, Raph. Et celui-là est très réaliste.
—C'est du sérieux, Stella! Je deviens Miss pour botter les fesses de ce genre de créatures, tout ça à cause de Tim –la peluche– qui m'a refilé ces pouvoirs. Je peux me débrouiller seul·e mais ça sera plus difficile si je dois te protéger en plus. Tu comprends?»

Ma sœur me regarda, avec la tête d'une personne défenestrée qui aurait rebondi sans dommage sur le bitume. 

«—Ça fait combien de temps que ça dure? Et pourquoi t'as choisi mon frère, toi?
—C'est une longue histoire, mais pitié pas maintenant.
—Vois le bon côté des choses, t'arrêtes pas de dire que t'aurais préféré avoir une sœur. Et bah voilà.
—Ça ne m'amuse pas. T'aurais dû m'en parler, me mettre dans la confidence. Je me sens tellement conne!»

Namue rassemblait de plus en plus de clients zombis et ça, c'était alarmant. Pourtant, elle avait presque l'air de s'amuser et ne lançait pas ses troupes sur nous. En tout cas pas encore. Elle mijotait un sale coup et ça ne me plaisait pas du tout. Un large sourire étirait ses lèvres minces.

«—Je suppose que c'est toi, Namue?
—En chair et en os.»

Elle aurait pu ajouter «tout en muscle». Je devais détourner son attention de ma soeur, c'était donc le moment d'une petite provocation bien sentie.

«—Je ne sais pas ce que tu m'veux, mais ça m'intéresse pas. Je vais t'empêcher de nuire! En gros, je vais te tabasser. Mais laisse ma sœur en dehors de ça. Je t'avertis.
—Ta frangine?»

Comme une fille! [achevé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant