Les migrants

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On en parle, on oublie
et ça revient transi,
espèrant un abri,
qu'on leur offre un sursis
loin des pays qu'ils fuient
comme des troupeaux d'brebis
au milieu des chenis.
Des zombis dans la nuit.

Ces femmes, ces hommes d'ailleurs
connaissent toutes les frayeurs
du joug de l'oppresseur.
La teneur du malheur,
les famines dont on meurt,
le coeur gavé d'horreur
de n'avoir que douleur
à proposer aux leurs.

Tous ces gens maltraités
qu'on réduit sans pitié
au terme de sans-papiers.
Les déshumaniser
pour mieux les enterrer,
seuls ou dans des charniers,
mais qu'ils restent éloignés ;
Non à ces va-nu-pieds !

Ainsi s'élèvent les voix
au travers des claires-voies
qu'on entend quelques fois.
D'autres, un peu moins sournois,
sans trop de foi ni loi,
surtout le coeur trop froid
pour ne serait-ce qu'une fois
se détourner d'leur moi,

et c'est avec faconde
qu'ils rabrouent ces immondes.
Toute cette misère du monde
qu'on n' peut dans notre monde,
sans qu'ils ne nous inondent,
recueuillir à la ronde.
Certes, que les prières grondent
mais entre eux. Sans qu'elles frondent.

Si au bout c'est la mort,
est-ce de notre ressort ?
Qu'y pouvons-nous dès lors
que l'infortune est leur sort ?
Ils savent le fer de leurs mors
et enfantent à pléthore,
à croire qu'ils veulent encor
enrichir les croque-morts.

Voilà l'écho des hommes.
Voilà où nous en sommes,
sans même un minimum
de compassion pour l'homme
parce que sans décorum,
il n'y a plus d' post-scriptum.
Ce sont des bêtes de somme
avant d'être des personnes.

On détourne les yeux
de tous ces malheureux
alors qu'ils n'ont qu'un voeu ;
Mourir un peu plus vieux
sans vouloir être heureux,
mais seulement un peu mieux.
Ne plus périr sous l'feu
ou être coupé en deux.

C'est par entière poignée
que même l'immensité
d'la méditerranée,
au gré de ses marées,
rejette ces corps damnés
qui n' seront pas pleurés
mais à peine dénombré
par un journal télé.

Tous ces cadavres échoués,
esquilles de bois flottés.
Seuls quelques rescapés,
pour les moins ravagés,
survivants de l'épopée
d'un périple sans pitié,
se verront renvoyés
comme des chiens enragés.

A croire qu' c'est par plaisir,
qu' c'est par simples désirs
ou par caprices d'avenir
qu'ils sont prêts à mourir.
Tourner l'dos et s'enfuir
pour ne plus dépérir.
Pouvoir un jour sourire,
ne plus être à maudire.

Ceux qu'on traite d'indigents,
plus mal que des petites gens,
ces espèces de migrants
qu'on prend pour des rempants,
sont-ils si différents
d'certains de nos parents
venus en d'autres temps
de pays moins parlant ?

Devons-nous taire l'exode
à l'heure des noires périodes,
quelques autres épisodes
tout aussi incommodes ?
Se fermer à leurs causes
et garder portes closes ?
Ne pas s'remettre en cause,
c'est n'être pas grand chose...

Des petits riens pour un toutOù les histoires vivent. Découvrez maintenant